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17/10/2007 | FRANCE | N°292943

France | France, Conseil d'État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 17 octobre 2007, 292943


Vu la requête, enregistrée le 28 avril 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE ENDYMIS, représentée par son gérant en exercice, dont le siège est ZI Nord à Ruffec (16700) ; la SARL ENDYMIS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 28 février 2006 du ministre de l'agriculture et de la pêche refusant l'autorisation de mise sur le marché sollicitée le 17 mars 2003 pour le produit dénommé Botrex importé d'Espagne et d'Italie sous la dénomination Sumisclex 50 WP ;

2°) d'enjoindre au ministre de réexaminer la d

emande d'autorisation dans le délai de 20 jours à compter de la notification de l...

Vu la requête, enregistrée le 28 avril 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE ENDYMIS, représentée par son gérant en exercice, dont le siège est ZI Nord à Ruffec (16700) ; la SARL ENDYMIS demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 28 février 2006 du ministre de l'agriculture et de la pêche refusant l'autorisation de mise sur le marché sollicitée le 17 mars 2003 pour le produit dénommé Botrex importé d'Espagne et d'Italie sous la dénomination Sumisclex 50 WP ;

2°) d'enjoindre au ministre de réexaminer la demande d'autorisation dans le délai de 20 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le décret n° 2001-317 du 4 avril 2001 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Cabrera, Auditeur,

- les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SOCIETE ENDYMIS a demandé le 17 mars 2003 au ministre de l'agriculture d'autoriser, selon la procédure régie par le décret du 4 avril 2001 alors en vigueur, la mise sur le marché d'un produit phytopharmaceutique dénommé Botrex en provenance d'Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen ; que, par une décision du 5 octobre 2005, le Conseil d'Etat a annulé la décision de refus opposée le 25 mars 2004 à la demande de la SOCIETE ENDYMIS au motif qu'elle avait été prise selon une procédure irrégulière ; qu'à la suite de cette décision, saisi par la SOCIETE ENDYMIS aux fins que soit apportée une réponse à sa demande d'autorisation de mise sur le marché, le ministre de l'agriculture a indiqué à cette société le 12 décembre 2005 qu'il avait l'intention de prendre une décision de refus, qui lui serait notifiée par courrier faute pour la société de faire valoir ses éventuelles observations dans un délai de vingt-et-un jours à compter de la réception de cette lettre ; que, dans le délai qui lui avait été imparti, la SOCIETE ENDYMIS a adressé au ministre des observations , auxquelles il a été répondu par une lettre du ministre du 25 janvier 2006 ; que la SOCIETE ENDYMIS demande l'annulation de la décision du 28 février 2006 par laquelle, à la suite de ces échanges, le ministre a refusé d'accorder l'autorisation de mise sur le marché qu'elle sollicitait ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 253-52 du code rural, dans sa rédaction issue du décret du 4 avril 2001 : « L'introduction sur le territoire national d'un produit phytopharmaceutique en provenance d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen dans lequel il bénéficie déjà d'une autorisation de mise sur le marché délivrée conformément à la directive 91/414/CEE du Conseil du 15 juillet 1991, et identique à un produit dénommé ci-après produit de référence, est autorisée dans les conditions suivantes : / Le produit de référence doit bénéficier d'une autorisation de mise sur le marché délivrée par le ministre chargé de l'agriculture en application des dispositions des articles R. 253-13 à R. 253-17 et du paragraphe 1 de la sous-section 1 de la section 2 du chapitre III du présent titre. / L'identité du produit introduit sur le territoire national avec le produit de référence est appréciée au regard des trois critères suivants : / 1° Origine commune des deux produits en ce sens qu'ils ont été fabriqués, suivant la même formule, par la même société ou par des entreprises liées ou travaillant sous licence ; / 2° Fabrication en utilisant la ou les mêmes substances actives ; / 3° Effets similaires des deux produits compte tenu des différences qui peuvent exister au niveau des conditions agricoles, phytosanitaires et environnementales, notamment climatiques, liées à l'utilisation des produits. » ; que selon l'article R. 253-55 du même code : « L'autorisation de mise sur le marché du produit introduit sur le territoire national peut être refusée ou retirée : / 1° Pour des motifs tirés de la protection de la santé humaine et animale ainsi que de l'environnement ; / 2° Pour défaut d'identité, au sens de l'article R. 253-52 avec le produit de référence ; / 3° Pour non-conformité de l'emballage et de l'étiquetage aux conditions posées par les articles 1er à 4 du décret du 11 mai 1937 relatif à l'application de la loi du 4 août 1903 concernant la répression des fraudes dans le commerce des produits utilisés pour la destruction des ravageurs des cultures. / Préalablement à un refus ou à un retrait d'autorisation de mise sur le marché, le demandeur ou le titulaire de l'autorisation est mis en mesure de présenter ses observations au ministre chargé de l'agriculture. » ;

Sur la légalité externe de la décision :

Considérant que la lettre du ministre du 12 décembre 2005 ne saurait être regardée comme annonçant une décision déjà prise ni comme créant une procédure dérogatoire de rejet tacite ; qu'elle avait pour seul objet de mettre la société ENDYMIS en mesure de présenter ses observations, conformément à ce qu'impose le dernier alinéa de l'article R. 253-55 du code rural ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les observations produites par la société dans les délais qui lui avaient été impartis n'auraient pas été prises en compte ; que la décision de refus n'a été prise par le ministre qu'à l'issue de ces échanges ; qu'ainsi, la société ENDYMIS n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée aurait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;

Sur la légalité interne de la décision :

Considérant que, lorsqu'il est saisi d'une demande d'autorisation de mise sur le marché d'un produit phytosanitaire dans les conditions prévues par les dispositions précitées du code rural, il appartient au ministre de l'agriculture, ainsi que l'a d'ailleurs jugé la cour de justice des communautés européennes dans son arrêt du 11 mars 1999 « The Queen and Ministry of agriculture, fisheries and food », de vérifier, outre l'existence d'une origine commune au produit phytosanitaire en cause et au « produit de référence », que ces deux produits, « sans être en tous points identiques, ont, à tout le moins, été fabriqués suivant la même formule et en utilisant la même substance active et ont en outre les mêmes effets compte tenu des différences qui peuvent exister au niveau des conditions agricoles, phytosanitaires et environnementales, notamment climatiques, intéressant l'utilisation du produit » ;

Considérant que le ministre a fondé le refus d'autorisation de mise sur le marché qu'il a opposé à la SOCIETE ENDYMIS sur l'absence d'identité entre les produits importés que la société entendait commercialiser sous la dénomination BOTREX et le produit SUMISCLEX, « produit de référence » au sens des dispositions précitées de l'article R. 253-52 du code rural ; qu'il a en effet estimé que le produit importé d'Espagne sous la dénomination SUMISCLEX 50 WP contenait des formulants de nature différente de ceux que contenait le produit de référence, ce qui était susceptible d'entraîner des risques pour la santé, d'une part, et, d'autre part, que le produit importé d'Italie sous la dénomination SUMISCLEX 50 WP présentait une composition intégrale différente de celle du produit de référence, ce qui était de nature à porter atteinte à la protection de la santé humaine et animale ainsi qu'à l'environnement ;

Considérant qu'en retenant de tels motifs, le ministre de l'agriculture n'a pas, contrairement à ce que soutient la société requérante, fondé sa décision sur d'autres critères que ceux prévus par les dispositions des articles R. 253-52 et R. 253-55 du code rural, interprétées à la lumière de la jurisprudence précitée de la cour de justice des communautés européennes ; que si, en ce qui concerne le produit SUMISCLEX 50 WP importé d'Italie, la décision attaquée fait état d'une « composition intégrale » différente de celle du produit de référence, il ressort des pièces du dossier que le ministre a fondé son refus non sur le fait que les deux produits n'étaient pas en tous points identiques, mais sur le fait que des différences suffisantes justifiaient qu'ils ne fussent pas regardés comme « identiques » au sens des dispositions du code rural dont la portée a été précisée ci-dessus ;

Considérant par ailleurs que, si la société requérante soutient que le contrôle ainsi exercé par le ministre pour vérifier l'identité du produit dont la mise sur le marché était demandée avec le produit de référence aurait été au-delà du contrôle exercé lors d'une demande d'autorisation de mise sur le marché d'un produit pharmaceutique importé, un tel moyen ne saurait en tout état de cause être retenu, compte tenu notamment des conditions d'utilisation différentes des produits phytosanitaires et des produits pharmaceutiques ;

Considérant enfin que la société ENDYMIS soutient que la décision attaquée méconnaît le principe d'égalité devant la loi, dès lors qu'une autorisation de mise sur le marché aurait été délivrée à une autre société pour l'importation d'Italie, sous le nom commercial PROMIDI+, du même produit SUMISCLEX 50WP ; que toutefois, elle n'apporte aucun élément de nature à établir que le produit d'origine italienne commercialisé sous la dénomination PROMIDI+, dont le ministre indique d'ailleurs qu'il ne bénéficiait plus d'autorisation de mise sur le marché quand la décision attaquée a été prise, serait identique au produit qu'elle entendait commercialiser sous la dénomination BOTREX ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société ENDYMIS n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision du 28 février 2006 par laquelle le ministre de l'agriculture et de la pêche a refusé de lui accorder l'autorisation de mise sur le marché qu'elle sollicitait pour les produits importés d'Espagne et d'Italie sous la dénomination Sumisclex 50 WP qu'elle entendait commercialiser sous la dénomination Botrex ; que, par suite, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la SOCIETE ENDYMIS demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la SOCIETE ENDYMIS est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE ENDYMIS et au ministre de l'agriculture et de la pêche.


Synthèse
Formation : 3ème et 8ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 292943
Date de la décision : 17/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 17 oct. 2007, n° 292943
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: M. Laurent Cabrera
Rapporteur public ?: M. Séners

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:292943.20071017
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