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09/11/2007 | FRANCE | N°279685

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 09 novembre 2007, 279685


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 avril et 3 juin 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Saïd A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 14 mars 2005 par laquelle la commission centrale d'aide sociale a rejeté sa requête dirigée contre la décision du 18 février 2003 de la commission départementale d'aide sociale du Rhône rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 février 2002 par laquelle le directeur de la caisse d'allocation

s familiales de Lyon a mis fin à ses droits au revenu minimum d'insertion...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 18 avril et 3 juin 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par M. Saïd A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 14 mars 2005 par laquelle la commission centrale d'aide sociale a rejeté sa requête dirigée contre la décision du 18 février 2003 de la commission départementale d'aide sociale du Rhône rejetant sa demande tendant à l'annulation de la décision du 23 février 2002 par laquelle le directeur de la caisse d'allocations familiales de Lyon a mis fin à ses droits au revenu minimum d'insertion à compter du mois de février 2002 et l'a déclaré redevable d'un indu de 4 446,02 euros, correspondant aux sommes versées au titre de cette allocation entre les mois de novembre 2000 et de décembre 2001 ;

2°) statuant au fond, de faire droit à son appel et de lui accorder la réparation du préjudice moral et matériel que la décision du 23 février 2002 lui a causé ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son article 55 ;

Vu la déclaration de principes du 19 mars 1962 relative à la coopération économique et financière entre la France et l'Algérie, notamment son article 7 ;

Vu l'accord franco ;algérien du 27 décembre 1968 modifié par l'avenant et le protocole du 22 décembre 1985 ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988 ;

Vu le code de justice administrative ;




Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexandre Lallet, Auditeur,

- les conclusions de M. Luc Derepas, Commissaire du gouvernement ;





Considérant, d'une part, qu'en vertu des dispositions de l'article 8 de la loi du 1er décembre 1988, devenu l'article L. 262 ;9 du code de l'action sociale et des familles, et sous réserve de l'incidence des engagements internationaux introduits dans l'ordre juridique interne, une personne de nationalité étrangère ne peut se voir reconnaître le bénéfice du revenu minimum d'insertion que si elle est titulaire, à la date du dépôt de sa demande, soit d'une carte de résident ou d'un titre de séjour prévu par un accord international et conférant des droits équivalents, soit, à défaut, d'un titre de séjour l'autorisant à exercer une activité professionnelle, pour autant, dans ce dernier cas, que l'intéressé justifie en cette qualité d'une résidence non interrompue de trois années ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'article 7 de la déclaration de principes du 19 mars 1962 relative à la coopération économique et financière entre la France et l'Algérie que les ressortissants algériens résidant en France, en particulier les travailleurs, ont, à l'exception des droits politiques, les mêmes droits que les nationaux français, notamment au regard de la législation sur le revenu minimum d'insertion ; que, toutefois, l'article 7 de l'accord franco ;algérien du 27 décembre 1968, dans sa rédaction alors en vigueur, prévoit que les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention « salarié », qui constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française, et que les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle soumise à autorisation reçoivent, s'ils justifient l'avoir obtenue, un certificat de résidence valable un an renouvelable et portant la mention de cette activité ; que l'article 7 bis du même accord, alors en vigueur, prévoyait que : « … Le certificat de résidence valable dix ans (…) confère à son titulaire le droit d'exercer en France la profession de son choix, dans le respect des dispositions régissant l'exercice des professions réglementées (…) » ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions de la loi du 1er décembre 1988, puis de celles du code de l'action sociale et des familles, et des stipulations citées plus haut, et eu égard à la finalité de l'allocation de revenu minimum d'insertion, qu'une personne de nationalité algérienne résidant régulièrement en France peut, si elle remplit les autres conditions posées par cette loi ou par ce code, bénéficier du revenu minimum d'insertion si elle justifie, à la date du dépôt de sa demande, de la détention d'un certificat de résidence de dix ans ou d'un titre l'autorisant à exercer une activité professionnelle ;

Considérant que, pour estimer que M. A, ressortissant algérien à l'époque des faits et admis au séjour comme étudiant puis titulaire, à compter du 1er novembre 1999, d'un certificat de résidence portant la mention « commerçant » valable jusqu'au 31 octobre 2000, ne remplissait pas les conditions posées par l'article 8 de la loi du 1er décembre 1988 pour bénéficier du revenu minimum d'insertion au titre de la période courant du mois de novembre 2000 au mois de décembre 2001, la commission centrale d'aide sociale s'est fondée sur le fait que M. A, qui se prévalait devant elle des engagements internationaux entre la France et l'Algérie mentionnés ci ;dessus, ne justifiait pas d'un titre l'autorisant à exercer une activité professionnelle au cours des trois années précédant sa demande, formulée le 7 juillet 2000 ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci ;dessus qu'elle a, ce faisant, commis une erreur de droit ; que sa décision doit, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821 ;2 du code de justice administrative ;

Sur les droits de M. A :

Considérant qu'à la date du dépôt de sa demande d'allocation de revenu minimum d'insertion, M. A était titulaire d'un certificat de résidence portant la mention « commerçant » l'autorisant à exercer cette activité ; qu'il n'est pas soutenu que ce titre lui aurait été par la suite retiré ou n'aurait pas été renouvelé ; qu'il n'est pas contesté qu'il remplissait les autres conditions posées par la loi du 1er décembre 1988, puis par le code de l'action sociale et des familles, pour l'octroi de cette allocation jusqu'en décembre 2001 ; que, dans ces conditions, l'administration ne pouvait légalement lui réclamer le reversement des sommes qu'il avait perçues pendant la période litigieuse ni mettre fin à ses droits à compter du mois de février 2002 ; que M. A est, dès lors, fondé à demander l'annulation de la décision du 18 février 2003 de la commission départementale d'aide sociale du Rhône et celle de la décision du 23 février 2002 ; qu'il y a lieu de renvoyer M. A devant le président du conseil général du Rhône pour le calcul de ses droits à compter du mois de janvier 2002, en fonction de ses ressources propres, en tenant compte des intérêts moratoires dus sur la somme ainsi calculée ;

Sur les conclusions aux fins d'indemnisation :

Considérant que les conclusions tendant à l'engagement de la responsabilité des autorités administratives du fait des décisions qu'elles prennent en matière d'aide sociale, qui soulèvent un litige distinct de celles qui tendent à la réformation de ces décisions, relèvent des juridictions administratives de droit commun et non du juge de l'aide sociale ; qu'il suit de là que les conclusions aux fins d'indemnisation présentées par M. A ne sauraient être accueillies ;



D E C I D E :
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Article 1er : La décision de la commission centrale d'aide sociale en date du 14 mars 2005 est annulée.

Article 2 : La décision de la commission départementale d'aide sociale en date du 18 février 2003, ensemble la décision du 23 février 2002 supprimant les droits de M. A au revenu minimum d'insertion, sont annulées.

Article 3 : M. A est déchargé du paiement de la somme de 4 446,02 euros mise à sa charge par le préfet du Rhône.

Article 4 : M. A est renvoyé devant le président du conseil général du Rhône afin qu'il soit statué, selon les modalités énoncées dans les motifs de la présente décision, sur ses droits à l'allocation de revenu minimum d'insertion à compter du 1er janvier 2002.

Article 5 : Le surplus des conclusions présentées par M. A est rejeté.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Saïd A, au département du Rhône et au ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 279685
Date de la décision : 09/11/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

AIDE SOCIALE - DIFFÉRENTES FORMES D'AIDE SOCIALE - REVENU MINIMUM D'INSERTION (RMI) - CONDITIONS DU DROIT À L'ALLOCATION - ALGÉRIENS - INCLUSION - DÉTENTION D'UN CERTIFICAT DE RÉSIDENCE DE DIX ANS OU D'UN TITRE DE SÉJOUR L'AUTORISANT À EXERCER UNE ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE EN FRANCE.

En vertu des dispositions de l'article 8 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988, devenu l'article L. 262-9 du code de l'action sociale et des familles, et sous réserve de l'incidence des engagements internationaux introduits dans l'ordre juridique interne, une personne de nationalité étrangère ne peut se voir reconnaître le bénéfice du revenu minimum d'insertion que si elle est titulaire, à la date du dépôt de sa demande, soit d'une carte de résident ou d'un titre de séjour prévu par un accord international et conférant des droits équivalents, soit, à défaut, d'un titre de séjour l'autorisant à exercer une activité professionnelle, pour autant, dans ce dernier cas, que l'intéressé justifie en cette qualité d'une résidence non interrompue de trois années. S'agissant des ressortissants algériens, il résulte de la combinaison de ces dispositions et des stipulations, d'une part, de l'article 7 de la déclaration de principes du 19 mars 1962 relative à la coopération économique et financière entre la France et l'Algérie et, d'autre part, des articles 7 et 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, et eu égard à la finalité de l'allocation de revenu minimum d'insertion, qu'une personne de nationalité algérienne résidant régulièrement en France peut, si elle remplit les autres conditions posées par la loi ou par le code, bénéficier du revenu minimum d'insertion si elle justifie, à la date du dépôt de sa demande, de la détention d'un certificat de résidence de dix ans ou d'un titre l'autorisant à exercer une activité professionnelle.

AIDE SOCIALE - DIFFÉRENTES FORMES D'AIDE SOCIALE - REVENU MINIMUM D'INSERTION (RMI) - DROITS SOCIAUX - REVENU MINIMUM D'INSERTION - CONDITIONS DU DROIT À L'ALLOCATION - ALGÉRIENS - INCLUSION - DÉTENTION D'UN CERTIFICAT DE RÉSIDENCE DE DIX ANS OU D'UN TITRE DE SÉJOUR L'AUTORISANT À EXERCER UNE ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE EN FRANCE.

En vertu des dispositions de l'article 8 de la loi n° 88-1088 du 1er décembre 1988, devenu l'article L. 262-9 du code de l'action sociale et des familles, et sous réserve de l'incidence des engagements internationaux introduits dans l'ordre juridique interne, une personne de nationalité étrangère ne peut se voir reconnaître le bénéfice du revenu minimum d'insertion que si elle est titulaire, à la date du dépôt de sa demande, soit d'une carte de résident ou d'un titre de séjour prévu par un accord international et conférant des droits équivalents, soit, à défaut, d'un titre de séjour l'autorisant à exercer une activité professionnelle, pour autant, dans ce dernier cas, que l'intéressé justifie en cette qualité d'une résidence non interrompue de trois années. S'agissant des ressortissants algériens, il résulte de la combinaison de ces dispositions et des stipulations, d'une part, de l'article 7 de la déclaration de principes du 19 mars 1962 relative à la coopération économique et financière entre la France et l'Algérie et, d'autre part, des articles 7 et 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, et eu égard à la finalité de l'allocation de revenu minimum d'insertion, qu'une personne de nationalité algérienne résidant régulièrement en France peut, si elle remplit les autres conditions posées par la loi ou par le code, bénéficier du revenu minimum d'insertion si elle justifie, à la date du dépôt de sa demande, de la détention d'un certificat de résidence de dix ans ou d'un titre l'autorisant à exercer une activité professionnelle.


Publications
Proposition de citation : CE, 09 nov. 2007, n° 279685
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Alexandre Lallet
Rapporteur public ?: M. Derepas Luc

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:279685.20071109
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