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05/12/2007 | FRANCE | N°286241

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 05 décembre 2007, 286241


Vu l'ordonnance du 17 octobre 2005, enregistrée le 19 octobre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président du tribunal administratif de Montpellier a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la demande présentée par Mme Annie BUSSIERE, demeurant ..., devant ce tribunal ;

Vu la demande, enregistrée le 19 juillet 2005 au greffe du tribunal administratif de Montpellier et le mémoire complémentaire, enregistré le 13 janvier 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés

pour Mme A ; Mme A demande au juge administratif :

1°) d'annule...

Vu l'ordonnance du 17 octobre 2005, enregistrée le 19 octobre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président du tribunal administratif de Montpellier a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la demande présentée par Mme Annie BUSSIERE, demeurant ..., devant ce tribunal ;

Vu la demande, enregistrée le 19 juillet 2005 au greffe du tribunal administratif de Montpellier et le mémoire complémentaire, enregistré le 13 janvier 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme A ; Mme A demande au juge administratif :

1°) d'annuler les décisions implicites par lesquelles le ministre l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et le président de l'université Montpellier III ont rejeté sa demande d'indemnité en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité de la délibération du 22 octobre 1999 par laquelle le conseil d'administration de cette université a demandé au conseil du diplôme d'études approfondies (DEA) d'espagnol d'organiser un scrutin en vue de l'élection de son responsable ;

2°) de condamner l'Etat et l'université Montpellier III à lui verser, en réparation des préjudices subis dans le déroulement et la reconstitution de sa carrière de professeur des universités, la somme de 120 000 euros au titre du préjudice moral et la somme de 474 431 euros au titre du préjudice matériel ;

3°) de mettre à la charge de l'université Montpellier III et de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'éducation ;

Vu l'arrêté interministériel du 30 mars 1992 relatif aux études de troisième cycle ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Barbat, Auditeur,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de Mme BUSSIERE et de Me Foussard, avocat de l'université Paul Valéry Montpellier III,

- les conclusions de M. Rémi Keller, Commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir soulevée par l'université Montpellier III :

Considérant que la demande adressée le 4 mars 2005 par Mme A au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et à l'université Montpellier III tendait à l'indemnisation du préjudice qu'elle estimait avoir subi du fait de l'illégalité de la délibération du 22 octobre 1999 par laquelle le conseil d'administration de l'université a demandé au conseil du diplôme d'études approfondies (DEA) d'espagnol d'organiser un scrutin en vue de l'élection de son responsable, dont un jugement, devenu définitif, du tribunal administratif de Montpellier du 1er octobre 2004 a prononcé l'annulation ; que cette demande avait le caractère d'une demande de plein contentieux pour laquelle, en application des dispositions de l'article R. 421-3 du code de justice administrative, seule une décision expresse de rejet fait courir le délai de recours ; qu'en l'absence d'une telle décision, la fin de non-recevoir soulevée par l'université Paul Valéry Montpellier III et tirée de la tardiveté de la demande ne peut qu'être rejetée ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'en vertu de l'article 3 de l'arrêté du 30 mars 1992 relatif aux études de troisième cycle, alors en vigueur, l'habilitation pour délivrer des DEA est accordée aux universités par le ministre de l'enseignement supérieur ; qu'en vertu de l'article 17 de ce même arrêté, le responsable du DEA est désigné par le chef d'établissement pour une période de quatre ans renouvelable une fois ; qu'en vertu de l'article 3 du même arrêté, la décision du ministre délivrant l'habilitation à l'université précise le nom du responsable désigné par l'université ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A, professeur des universités à l'université Montpellier III, a été, en application de ces dispositions, désignée par le président de l'université, responsable du DEA Etudes culturelles : Méditerranée et langues romanes et que cette désignation a été mentionnée dans l'arrêté du 2 juillet 1999 du ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie accordant à cette université l'habilitation de délivrer ce DEA pour une durée de quatre ans ; que le conseil d'administration de l'université a, par une délibération du 22 octobre 1999, invité le conseil du DEA à se prononcer par des élections sur le choix de son responsable ; qu'à la suite de ces élections, Mme A a perdu la responsabilité du DEA ; qu'après avoir poursuivi ses activités d'enseignant-chercheur, elle a demandé, en 2001, à bénéficier de façon anticipée de l'admission à la retraite ; que, par un jugement, devenu définitif, du 1er octobre 2004, le tribunal administratif de Montpellier a prononcé l'annulation de la délibération du 22 octobre 1999 du conseil d'administration de l'université au motif qu'elle instaurait un processus de désignation du responsable de DEA sans rapport avec les dispositions réglementaires applicables ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, Mme A s'étant vu privée des fonctions de responsable de DEA à la suite d'une délibération irrégulière du conseil d'administration de l'université, l'illégalité fautive de cette délibération n'est, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'Etat aurait commis une faute lourde dans l'exercice de son pouvoir de tutelle, imputable qu'à l'université Montpellier III ; qu'ainsi, Mme A est fondée à demander que l'université Montpellier III soit condamnée à réparer le préjudice résultant de cette illégalité ; que ses conclusions dirigées contre l'Etat doivent, en revanche, être rejetées ;

Sur le préjudice :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A a subi, du fait de l'illégalité fautive commise par l'université, et eu égard à l'atteinte portée à sa réputation et à la perte de reconnaissance par ses pairs, un préjudice moral ; qu'il en sera fait une juste appréciation en condamnant l'université Paul Valéry Montpellier III à verser à Mme A à ce titre une indemnité de 10 000 euros, y compris tous intérêts et intérêts des intérêts échus au jour de la présente décision ;

Considérant, en revanche, qu'il résulte de l'instruction qu'il n'existe pas de lien direct entre la décision de Mme A de demander sa radiation des cadres et la délibération litigieuse ; que, dans ces conditions, Mme A ne peut utilement alléguer un préjudice matériel à ce titre ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'université Montpellier III une somme de 3 500 euros au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ; que les mêmes dispositions font en revanche obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que l'université demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : La décision implicite de rejet du président de l'université Montpellier III est annulée.

Article 2 : L'université Montpellier III est condamnée à verser à Mme A la somme de 10 000 euros tous intérêts et intérêts des intérêts compris au jour de la présente décision.

Article 3 : L'université Montpellier III versera à Mme A la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de l'université Montpellier III tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mme Annie A, à l'université Montpellier III et au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.


Synthèse
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 286241
Date de la décision : 05/12/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 05 déc. 2007, n° 286241
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Philippe Barbat
Rapporteur public ?: M. Keller
Avocat(s) : FOUSSARD ; SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:286241.20071205
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