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12/12/2007 | FRANCE | N°290312

France | France, Conseil d'État, 6ème et 1ère sous-sections réunies, 12 décembre 2007, 290312


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 février et 13 juin 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE SENE (56860), représentée par son maire ; la COMMUNE DE SENE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 25 octobre 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 25 septembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de l'association Urbanisme ou Environnement, de

venue Environnement 56, la délibération du 26 juin 1998 par laquelle l...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 février et 13 juin 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la COMMUNE DE SENE (56860), représentée par son maire ; la COMMUNE DE SENE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 25 octobre 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 25 septembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de l'association Urbanisme ou Environnement, devenue Environnement 56, la délibération du 26 juin 1998 par laquelle le conseil municipal a approuvé la révision partielle du plan d'occupation des sols communal, d'autre part, au rejet de la demande présentée par l'association Environnement 56 devant le tribunal administratif de Rennes et à la condamnation de cette association à lui verser une somme de 2 300 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de mettre à la charge de l'association « Environnement 56 » le versement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Richard Senghor, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Parmentier, Didier, avocat de la COMMUNE DE SENE,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;


Considérant que, par un jugement du 25 septembre 2003, le tribunal administratif de Rennes a annulé, à la demande de l'association « Urbanisme ou environnement » devenue « Environnement 56 », la délibération du 26 juin 1998 par laquelle le conseil municipal de Séné a approuvé la révision partielle du plan d'occupation des sols de la commune, qui a pour objet d'ouvrir à l'urbanisation, en les classant en zone Nae, des terrains précédemment classés en zone Nca, NA et Nda, et de créer un emplacement réservé pour la réalisation d'une nouvelle voie ; que, par un arrêt du 25 octobre 2005, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté la requête de la COMMUNE DE SENE tendant à l'annulation de ce jugement ;

Sur les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 146-4 et de l'article R. 123-17 du code de l'urbanisme :

Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 3 janvier 1986 alors applicable, désormais codifié à l'article L. 321-2 du code de l'environnement : « Sont considérées comme communes littorales, au sens du présent chapitre, les communes de métropole et des départements d'outre-mer : 1° Riveraines des mers et océans, des étangs salés, des plans d'eau intérieurs d'une superficie supérieure à 1 000 hectares... » ; qu'il est constant que la COMMUNE DE SENE , bordée au sud par le golfe du Morbihan, est une commune littorale au sens de ces dispositions ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 146-1 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse : « Les dispositions du présent chapitre ont valeur de loi d'aménagement et d'urbanisme au sens de l'article L. 111-1-1. Elles déterminent les conditions d'utilisation des espaces terrestres, maritimes et lacustres : - dans les communes littorales définies à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral ... » ; et qu'aux termes du II de l'article L. 146-4 du même code, « L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 précitée doit être justifiée et motivée, dans le plan d'occupation des sols, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau (...) » ;

Considérant, d'une part, que la cour n'a pas commis d'erreur de droit ni entaché son arrêt de dénaturation en jugeant, après avoir précisément exposé la situation géographique des parcelles concernées par la délibération litigieuse, situées aux abords de la ria de Noyalo, que celles-ci devaient, eu égard à leur localisation et à la topographie des lieux, être regardées comme des espaces proches du rivage ; que la COMMUNE DE SENE ne peut, dès lors, utilement se prévaloir de ce qu'à la date de la délibération litigieuse, la liste des estuaires les plus importants n'avait pas encore été établie par décret en Conseil d'Etat pour soutenir que les dispositions de l'article L. 146-4 -II du code de l'urbanisme n'étaient pas applicables ;

Considérant, d'autre part, que, pour estimer que les constructions litigieuses ne pouvaient être regardées comme une extension limitée de l'urbanisation au sens des dispositions du II de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme, c'est sans commettre d'erreur de droit que la cour s'est fondée sur l'importance et la densité de l'opération litigieuse envisagée, ainsi que sur les caractéristiques géographiques spécifiques de la partie concernée de la commune ; qu'en estimant, au regard de ces critères, que les opérations litigieuses ne pouvaient être regardées comme constituant une extension limitée de l'urbanisation, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des faits, qui n'est pas, en l'absence de dénaturation, susceptible d'être discutée devant le juge de cassation ;

Considérant enfin qu'aux termes de l'article R. 123-17 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée: « le rapport de présentation (...) 4.° Justifie que les dispositions du plan d'occupation des sols sont compatibles avec les lois d'aménagement et d'urbanisme et les prescriptions prises pour leur application (...) » ;

Considérant qu'après avoir ainsi relevé que l'opération envisagée était située dans un espace proche du rivage, la cour en a déduit sans erreur de droit que le rapport de présentation du plan d'occupation des sols devait justifier de sa compatibilité avec les dispositions de la loi littoral ; qu'après avoir exactement constaté que ce rapport ne comportait aucune justification à cet égard, elle n'a commis aucune erreur de droit en jugeant qu'il ne satisfaisait pas aux dispositions du 4° de l'article R. 123-17 du code de l'urbanisme ;

Sur les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 146-7 du code de l'urbanisme :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 146-7 du code de l'urbanisme, dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée : « La réalisation de nouvelles routes est organisée par les dispositions du présent article. /Les nouvelles routes de transit sont localisées à une distance minimale de 2.000 mètres du rivage. /La création de nouvelles routes sur les plages, cordons lagunaires, dunes ou en corniche est interdite. /Les nouvelles routes de desserte locale ne peuvent être établies sur le rivage, ni le longer. /Toutefois, les dispositions des deuxième, troisième et quatrième alinéas ne s'appliquent pas en cas de contraintes liées à la configuration des lieux ou, le cas échéant, à l'insularité. La commission départementale des sites est alors consultée sur l'impact de l'implantation de ces nouvelles routes sur la nature. / En outre, l'aménagement des routes dans la bande littorale définie à l'article L. 146-4 est possible dans les espaces urbanisés ou lorsqu'elles sont nécessaires à des services publics ou à des activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le projet de desserte routière inscrit dans la délibération attaquée doit être implanté, ainsi qu'ils l'ont relevé, à une distance inférieure à 2000 m par rapport au rivage ;

Considérant, d'une part, que la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des faits en jugeant que cet équipement, qui constitue le troisième tronçon d'un axe routier important, dans le prolongement de la « pénétrante » sud-est de Vannes, présente le caractère d'une route de transit ;

Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le choix du tracé répond à la nécessité de prolonger un axe de circulation important desservant l'agglomération vannetaise et est ainsi motivé par un objectif d'amélioration du trafic routier et non par les contraintes liées à la configuration des lieux qui permettraient d'écarter les restrictions imposées par l'article L. 146-7 du code de l'urbanisme ; que, dès lors, en jugeant que la création d'un emplacement réservé au profit de la commune en vue d'ouvrir cette voie méconnaissait ces restrictions, la cour administrative d'appel de Nantes n'a pas dénaturé les circonstances de l'espèce ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE SENE n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué qui est suffisamment motivé ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;




D E C I D E :
--------------

Article1er : La requête de la COMMUNE DE SENE est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE SENE et à l'association Environnement 56.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

PROCÉDURE - VOIES DE RECOURS - CASSATION - CONTRÔLE DU JUGE DE CASSATION - RÉGULARITÉ INTERNE - APPRÉCIATION SOUVERAINE DES JUGES DU FOND - CARACTÈRE DE ROUTE DE TRANSIT (L - 146-7 CODE DE L'URBANISME).

54-08-02-02-01-03 Relève de l'appréciation souveraine des juges du fond le caractère de route de transit pour l'application de l'article L. 146-7 du code de l'urbanisme.

URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE - RÈGLES GÉNÉRALES D'UTILISATION DU SOL - RÈGLES GÉNÉRALES DE L'URBANISME - PRESCRIPTIONS D'AMÉNAGEMENT ET D'URBANISME - LOI DU 3 JANVIER 1986 SUR LE LITTORAL - CARACTÈRE DE ROUTE DE TRANSIT (L - 146-7 CODE DE L'URBANISME) - APPRÉCIATION SOUVERAINE DES JUGES DU FOND.

68-001-01-02-03 Relève de l'appréciation souveraine des juges du fond le caractère de route de transit pour l'application de l'article L. 146-7 du code de l'urbanisme.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 12 déc. 2007, n° 290312
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: M. Richard Senghor
Rapporteur public ?: M. Guyomar Mattias
Avocat(s) : SCP PARMENTIER, DIDIER

Origine de la décision
Formation : 6ème et 1ère sous-sections réunies
Date de la décision : 12/12/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 290312
Numéro NOR : CETATEXT000018007932 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2007-12-12;290312 ?
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