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19/12/2007 | FRANCE | N°258305

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 19 décembre 2007, 258305


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juillet 2003 et 7 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG, dont le siège est 100, avenue de Suffren, BP 552 à Paris Cedex 15 (75725) ; l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 8 avril 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, réformant le jugement du tribunal administratif de Paris du 4 avril 2000, l'a condamné à payer une somme de 53 642,90 euros à la caisse

primaire d'assurance maladie du Cher, augmentée des intérêts légaux ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juillet 2003 et 7 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG, dont le siège est 100, avenue de Suffren, BP 552 à Paris Cedex 15 (75725) ; l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 8 avril 2003 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, réformant le jugement du tribunal administratif de Paris du 4 avril 2000, l'a condamné à payer une somme de 53 642,90 euros à la caisse primaire d'assurance maladie du Cher, augmentée des intérêts légaux capitalisés, en remboursement des débours que cette dernière a exposés pour M. Bernard A à raison de sa contamination par le virus de l'hépatite C ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel présenté par la caisse primaire d'assurance maladie du Cher devant la cour administrative d'appel de Paris ;




Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG et de la SCP Boutet, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du Cher,

- les conclusions de M. Terry Olson, Commissaire du gouvernement ;



Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, saisi d'une demande de la caisse primaire d'assurance maladie du Cher tendant à la condamnation de l'Assistance Publique ;Hôpitaux de Paris à lui verser une somme de 254 627,03 F (38 817,64 euros) en remboursement des débours exposés du fait de la contamination de M. A par le virus de l'hépatite C à l'occasion d'une intervention chirurgicale, le tribunal administratif de Paris, par un jugement du 4 avril 2000, a limité à 60 570,42 F (9 233,90 euros) la condamnation qu'il a prononcée ; que, par l'arrêt attaqué du 8 avril 2003, la cour administrative de Paris, après avoir confirmé la condamnation de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, substitué à l'Assistance Publique ;Hôpitaux de Paris, à réparer la totalité des conséquences dommageables de la contamination, a porté le montant de l'indemnité due à la caisse primaire d'assurance maladie du Cher à la totalité de la somme demandée par la caisse en première instance et en appel, soit 53 642,90 euros ;

Considérant que, pour justifier le montant des sommes demandées pour la première fois en appel, la caisse primaire d'assurance maladie du Cher a produit devant la cour administrative d'appel les relevés chiffrés des prestations qu'elle avait servies, qui avaient tous été signés par son directeur avant la date de la clôture de l'instruction devant le tribunal administratif ; qu'il en résulte que la caisse, qui était en mesure de demander dès la première instance la condamnation de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG à lui rembourser les prestations figurant dans ces relevés, n'était pas recevable à présenter cette demande pour la première fois en appel ; que, dès lors, en incluant ces sommes dans la condamnation qu'elle a prononcée, la cour administrative d'appel a entaché son arrêt d'erreur de droit ; que l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG est par suite fondé à en demander l'annulation ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond ;

Considérant que, dans le dernier état de ses conclusions, L'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG ne conteste plus que sa responsabilité est engagée en raison de la contamination de M. A par le virus de l'hépatite C ;

Considérant en premier lieu qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions par lesquelles la caisse primaire d'assurance maladie du Cher demande que l'indemnité que le tribunal administratif a condamné l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG à lui verser soit portée à une somme supérieure à celle qu'elle avait demandée en première instance sont irrecevables ;

Considérant en second lieu que la caisse primaire d'assurance maladie justifie par les pièces qu'elle a produites en appel que la totalité des sommes demandées par elle en première instance, soit 38 817,64 euros, correspond à des dépenses de santé qu'elle a prises en charge au nom de son assuré et qui sont directement liées aux conséquences de la contamination de l'intéressé ; qu'elle est dès lors fondée à demander que la somme que le tribunal administratif a condamné l'Assistance Publique ;Hôpitaux de Paris, à laquelle est substitué l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, à lui verser soit portée à 38 817,64 euros ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie a droit aux intérêts de la somme de 38 817,64 euros à compter du 5 mars 1999, date de l'enregistrement de sa demande devant le tribunal administratif de Paris ;

Considérant que la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ;

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie du Cher a demandé la capitalisation des intérêts dès le 5 mars 1999, date de l'enregistrement de sa demande devant le tribunal administratif de Paris ; qu'à cette date il n'était pas dû une année d'intérêts ; qu'il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation à la date du 5 mars 2000 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

Sur l'indemnité prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi du 21 décembre 2006 relative au financement de la sécurité sociale pour 2007 applicable à la date de la présente décision : « … En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget (…) » ; qu'aux termes de l'article 1 de l'arrêté du 20 décembre 2006 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376 ;1 et L. 454 ;1 du code de la sécurité sociale : « Les montants maximum et minimum de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376 ;1 et L. 454 ;1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 926 euros et à 93 euros à compter du 1er janvier 2007 » ; qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG l'indemnité forfaitaire prévue par ces dispositions, soit 926 euros au profit de la caisse primaire d'assurance maladie du Cher ;

Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu de faire application de ces dispositions et mettre à la charge de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG la somme de 900 euros au titre des frais exposés par elle en appel et non compris dans les dépens ;



D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative de Paris en date du 8 avril 2003 est annulé.

Article 2 : La somme de 60 570,42 F (9 233,90 euros) que l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, substitué à l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, a été condamné à payer à la caisse primaire d'assurance maladie du Cher est portée à la somme de 38 817,64 euros, assortie des intérêts légaux à compter du 5 mars 1999. Les intérêts échus à la date du 5 mars 2000 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 4 avril 2000 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : Le surplus des conclusions de l'appel de la caisse primaire d'assurance maladie du Cher est rejeté.

Article 5 : L'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG versera à la caisse primaire d'assurance maladie du Cher la somme de 926 euros au titre des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

Article 6 : L'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG versera à la caisse primaire d'assurance maladie du Cher la somme de 900 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : La présente décision sera notifiée à l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG, à la caisse primaire d'assurance maladie du Cher et au ministre de la santé et de la jeunesse et des sports.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

SÉCURITÉ SOCIALE - PRESTATIONS - PRESTATIONS D'ASSURANCE MALADIE - ARTICLE L - DU CODE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE - PORTÉE - RÉVISION DU MONTANT DE L'INDEMNITÉ FORFAITAIRE PAR ARRÊTÉ INTERMINISTÉRIEL - CONSÉQUENCE - OBLIGATION POUR LA CAISSE D'ACTUALISER LE MONTANT DE SES CONCLUSIONS - ABSENCE (SOL - IMPL - ).

L'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 relative au financement de la sécurité sociale pour 2007, dispose que : « … En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget (…) ». Lorsque, par application de cet article, le montant de l'indemnité forfaitaire est relevé par arrêté interministériel, la caisse n'est pas obligée d'actualiser devant le juge le montant de ses conclusions.

SÉCURITÉ SOCIALE - CONTENTIEUX ET RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - ARTICLE L - DU CODE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE - PORTÉE - RÉVISION DU MONTANT DE L'INDEMNITÉ FORFAITAIRE PAR ARRÊTÉ INTERMINISTÉRIEL - CONSÉQUENCE - OBLIGATION POUR LA CAISSE D'ACTUALISER LE MONTANT DE SES CONCLUSIONS - ABSENCE (SOL - IMPL - ).

L'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 relative au financement de la sécurité sociale pour 2007, dispose que : « … En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget (…) ». Lorsque, par application de cet article, le montant de l'indemnité forfaitaire est relevé par arrêté interministériel, la caisse n'est pas obligée d'actualiser devant le juge le montant de ses conclusions.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 19 déc. 2007, n° 258305
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Delarue
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle
Rapporteur public ?: M. Olson Terry
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE ; SCP BOUTET

Origine de la décision
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Date de la décision : 19/12/2007
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 258305
Numéro NOR : CETATEXT000018007815 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2007-12-19;258305 ?
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