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19/12/2007 | FRANCE | N°280244

France | France, Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 19 décembre 2007, 280244


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 mai 2005 et 26 août 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Marie A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 27 décembre 2004 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté son appel tendant à l'annulation du jugement du 11 mai 2004 du tribunal administratif d'Orléans qui avait rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été

assujetti au titre des années 1992 à 1994 ;

2°) réglant l'affaire au fond...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 mai 2005 et 26 août 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Marie A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 27 décembre 2004 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté son appel tendant à l'annulation du jugement du 11 mai 2004 du tribunal administratif d'Orléans qui avait rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1992 à 1994 ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 11 mai 2004 et de lui accorder la décharge des impositions litigieuses et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ensemble le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Fabienne Lambolez, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. Jean-Marie A,

- les conclusions de Mme Claire Landais, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. A se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 27 décembre 2004 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté son appel dirigé contre le jugement du tribunal administratif d'Orléans en date du 11 mai 2004 rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1992 à 1994 ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : « Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : (...) 4° rejeter les requêtes irrecevables pour défaut d'avocat, pour défaut de production de la décision attaquée, ainsi que celles qui sont entachées d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance » ; qu'aux termes de l'article R. 411-1 du même code : La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours. » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge d'appel que M. A a présenté, dans le délai de recours, un mémoire d'appel qui ne se bornait pas à reproduire la demande formulée devant le tribunal administratif d'Orléans et contenait des arguments nouveaux au soutien des moyens rejetés par les premiers juges ; que, par suite, en rejetant cette requête comme irrecevable, le président de la cour administrative d'appel de Nantes a dénaturé les termes de la requête dont il était saisi et commis une erreur de droit ; que, dès lors, son ordonnance doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Sur l'imposition des bénéfices non commerciaux au titre de l'année 1992 :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 du code général des impôts : « (...) 4. les époux font l'objet d'impositions distinctes : (...) b. Lorsqu'étant en instance de séparation de corps ou de divorce, ils ont été autorisés à avoir des résidences séparées » ; qu'aux termes de l'article 12 du même code : « L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année » ; qu'il résulte des dispositions combinées des articles 156, 158, 92 à 103 du même code que le montant net des bénéfices non commerciaux à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est déterminé au 31 décembre de l'année d'imposition ;

Considérant qu'il est constant que M. A, en instance de divorce, était séparé de son épouse au sens de l'article 6 précité du code général des impôts depuis le 14 mai 1992 ; qu'à compter de cette date, il devait faire l'objet d'une imposition distincte à l'impôt sur le revenu assis notamment sur les bénéfices nets tirés de son activité professionnelle non commerciale calculée au 31 décembre 1992 ;

Considérant que M. A se prévaut d'une instruction 5 B-10-85 du 18 février 1985 qui admet que les bénéfices non commerciaux soient, pour leur imposition, répartis entre les ex-époux en fonction de la date de séparation à la condition que les ex-époux en fassent la demande écrite ; que la lettre du 12 janvier 1998 par laquelle les ex-époux A se bornent à indiquer à l'administration qu'il y avait lieu d'établir une imposition commune pour la période du 1er janvier au 13 mai 1992 et une imposition distincte pour la période du 14 mai au 31 décembre 1992, sans faire mention ni de l'existence ni du montant net des bénéfices non commerciaux perçus par M. Jacquier en 1992, ne peut être regardée, compte tenu de l'imprécision de ses termes, comme manifestant l'accord exprès de Mme A à l'imposition commune d'une partie, déterminée prorata temporis, des bénéfices non commerciaux de M. Jacquier ; qu'invité par l'administration, par lettre du 27 avril 2000, à lui adresser une attestation établie conjointement avec son ex-épouse, demandant la répartition prorata temporis du bénéfice non commercial redressé de l'année 1992 sur les deux périodes d'imposition, antérieure et postérieure au 14 mai 1992, le contribuable n'a pas produit le document réclamé ; qu'ainsi, M. A n'est pas fondé à demander, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le bénéfice de l'instruction du 18 février 1985 dont il ne remplit pas les conditions ;

Sur la déduction des pensions alimentaires versées au titre des années 1992 et 1994 :

Considérant qu'aux termes de l'article 156 du code général des impôts : « L'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque contribuable. Ce revenu est déterminé (...) sous déduction : (...) II. Des charges ci-après : (...) 2° (...) pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211 du code civil (...) » ; qu'il appartient au contribuable, pour bénéficier de la déduction ainsi prévue, de justifier de la réalité des versements qu'il a effectués à titre de pension alimentaire ;

Considérant d'une part que, pour contester le refus de l'administration d'admettre en déduction le versement de pensions alimentaires pour un montant total de 48 000 F en 1992, M. A, qui était redevable envers son ex-épouse, pendant les années en cause, d'une pension mensuelle de 6 000 F en exécution de l'ordonnance de non-conciliation du 14 mai 1992, s'est borné à produire, devant le tribunal administratif, une attestation de son ex-épouse, dépourvue de toute précision sur les sommes effectivement perçues par elle ; que si le requérant a produit en appel la photocopie de quatre chèques libellés au profit de son ex-épouse et datés du 29 juillet 1992, pour un montant total de 39 000 F, il n'apporte aucune preuve de l'encaissement de ces chèques par leur bénéficiaire ou d'un débit correspondant au compte du tireur au cours de l'année 1992, non plus d'ailleurs qu'au cours des années ultérieures ; que dans ces conditions, alors, au demeurant, que l'intéressé demande en appel que le montant des pensions versées en 1992 soit réévalué de 48 000 F à 68 000 F, la réalité des versements ainsi allégués ne peut être tenue pour établie ;

Considérant d'autre part que, pour justifier le versement à titre de pension alimentaire d'une somme totale de 40 000 F en 1994, M. A produit en appel des récépissés d'envoi de mandats postaux pour un montant total de 26 000 F en 1994 et la copie du dossier établi en 1995 dans le cadre de l'instance ayant conduit à la révision à la baisse du montant de la pension par ordonnance du 27 novembre 1995, lequel dossier comporte notamment un récapitulatif établi par son ex-épouse des versements perçus par elle en 1993, 1994 et 1995, mentionnant un total de 40 000 F en 1994 ; que, dans ces conditions, la réalité du versement de la somme de 40 000 F au titre de pension alimentaire en 1994 peut être considérée comme établie ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des impositions correspondant à la réintégration d'une somme de 40 000 F déduite de ses revenus de l'année 1994, ainsi que des pénalités y afférentes ; qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A de la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du président de la cour administrative d'appel de Nantes en date du 27 décembre 2004 est annulée.

Article 2 : M. A est déchargé du supplément d'impôt sur le revenu correspondant à la réintégration de la somme de 40 000 F dans son revenu imposable de l'année 1994 ainsi que des pénalités y afférentes.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans en date du 11 mai 2004 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : L'Etat versera une somme de 3 000 euros à M. A en application de l'article L. 761 -1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de M. A est rejeté.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Marie A et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.


Synthèse
Formation : 10ème et 9ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 280244
Date de la décision : 19/12/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 19 déc. 2007, n° 280244
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: Mme Fabienne Lambolez
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:280244.20071219
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