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21/12/2007 | FRANCE | N°310849

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 21 décembre 2007, 310849


Vu la requête, enregistrée le 23 novembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. et Mme Lahcen A, agissant au nom et pour le compte de leur fils M. El Mustafa A, et demeurant ...) ; M. et Mme A demandent au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de la décision implicite par laquelle le consul général de France à Fès (Maroc) a refusé de délivrer à M. El Mustafa A un visa de long séjour ;

2°) d'enjoindre au consulat général de

France à Fès de délivrer le visa demandé ou, à titre subsidiaire, de réexaminer l...

Vu la requête, enregistrée le 23 novembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. et Mme Lahcen A, agissant au nom et pour le compte de leur fils M. El Mustafa A, et demeurant ...) ; M. et Mme A demandent au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de la décision implicite par laquelle le consul général de France à Fès (Maroc) a refusé de délivrer à M. El Mustafa A un visa de long séjour ;

2°) d'enjoindre au consulat général de France à Fès de délivrer le visa demandé ou, à titre subsidiaire, de réexaminer la demande de visa dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

ils soutiennent que la condition d'urgence est remplie, dès lors que la décision attaquée porte une atteinte grave et immédiate aux intérêts qu'ils défendent ; qu'en effet, ils sont les tuteurs légaux de M. El Mustafa A et en assument la charge financière ; que les troubles dont ce dernier est atteint requièrent qu'il bénéficie d'un environnement familial ; que son isolement les contraint à se rendre régulièrement au Maroc ; que la décision attaquée est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'elle est entachée d'une erreur de droit ou, à tout de moins, d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de M. El Mustafa A ; qu'en effet, ce dernier entre dans la catégorie des enfants majeurs effectivement à la charge de ressortissants français, pour lesquels l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit la délivrance d'une carte de résident de plein droit ; que la décision attaquée porte une atteinte disproportionnée au respect du droit à une vie familiale normale, protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la décision dont la suspension est demandée et la copie du recours présenté à la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 décembre 2007, présenté par le ministre des affaires étrangères et européennes qui conclut au rejet de la requête ; le ministre soutient que M. El Mustafa A souffre des mêmes troubles psychologiques depuis vingt-et-un an et qu'aucun élément du dossier ne prouve que son état de santé s'est aggravé ; que sa situation de solitude n'est pas établie ; que les requérants ayant une résidence secondaire au Maroc, leurs séjours sur place ne sauraient être considérés comme visant exclusivement à entourer M. El Mustafa A ; qu'ainsi la condition d'urgence ne peut être regardée comme remplie ; qu'aucun défaut de motivation de la décision implicite attaquée ne peut être reproché, les requérants n'ayant effectué aucune demande de communication des motifs de cette décision ; que la prise en charge effective et régulière de M. El Mustafa A ne peut être considérée comme établie de manière probante ; qu'aucun document produit n'indique que ce dernier serait dans l'incapacité complète de subvenir à ses besoins ; qu'il a été en charge d'un petit commerce pendant près de dix ans et jusqu'au mois d'octobre 2006 ; qu'il a d'ailleurs formé une première demande de visa en qualité de commerçant en mai 2006 ; que la procédure ayant conduit au placement sous tutelle de ce dernier est à l'évidence opportune ; qu'il en résulte que la décision attaquée n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation ; que les requérants ne sauraient se prévaloir de la protection prévue à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et les libertés fondamentales, dès lors qu'ils ont librement organisé la situation de vie de M. El Mustafa A au Maroc pendant plus de vingt ans, et qu'ils y effectuent de fréquents séjours ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. et Mme A et, d'autre part, le ministre des affaires étrangères et européennes ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du mercredi 19 décembre 2007 à 11 heures, au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Bouzidi, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M. et Mme A ;

- M. et Mme A ;

- le représentant du ministre des affaires étrangères et européennes ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision » ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre des affaires étrangères et européennes ;

Considérant que pour justifier l'urgence à suspendre l'exécution de la décision refusant à leur fils, M. El Mustafa A, l'octroi d'un visa d'entrée en France en qualité d'enfant majeur à charge d'un ressortissant français, les requérants font valoir que celui-ci souffre de troubles psychologiques qui nécessitent qu'il bénéficie d'un environnement familial dont il est dépourvu au Maroc, seul un de ses frères se trouvant encore dans ce pays mais ne résidant pas dans la même ville que lui, et le reste de sa famille étant établi en France, et que sa récente mise sous tutelle et sa dépendance financière totale vis à vis de ses parents rendent indispensables sa présence auprès de ces derniers ; qu'il résulte cependant de l'instruction que M. El Mustafa A, âgé de 38 ans, est atteint desdits troubles psychologiques depuis 1986, et que ses parents sont établis en France depuis trente-six ans, pour ce qui est de son père, et dix-huit ans, pour ce qui est de sa mère ; que, par ailleurs, il a sollicité en mai 2006 un visa d'entrée en France en qualité de commerçant, activité qu'il a depuis lors interrompue ; que par suite, même si les requérants allèguent que les membres de la famille qui résident encore au Maroc ne pourraient plus comme par le passé prendre soin de l'intéressé et si ce dernier a été placé récemment sous la tutelle de ses parents, la condition d'urgence ne peut être regardée comme remplie ; qu'il y a lieu dès lors de rejeter les conclusions aux fins de suspension et d'injonction présentées par M. et Mme Lahcen A, ainsi que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. et Mme Lahcen est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. et Mme Lahcen et au ministre des affaires étrangères et européennes.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 310849
Date de la décision : 21/12/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 21 déc. 2007, n° 310849
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Chantepy
Rapporteur ?: M. Christophe Chantepy
Avocat(s) : SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2007:310849.20071221
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