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18/01/2008 | FRANCE | N°280573

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 18 janvier 2008, 280573


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 mai et 16 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Philippe A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 2 février 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 13 décembre 2001 du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au tit

re de l'année 1990 et, d'autre part, à la décharge des impositions contes...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 mai et 16 septembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Philippe A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 2 février 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 13 décembre 2001 du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1990 et, d'autre part, à la décharge des impositions contestées ;

2°) statuant au fond, de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Karin Ciavaldini, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Laugier, Caston, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A a fait l'objet en 1993 d'un examen contradictoire de l'ensemble de sa situation fiscale personnelle, qui a porté sur les années 1990, 1991 et 1992 ; que, dans le cadre de ce contrôle, l'administration fiscale a constaté d'importantes acquisitions immobilières, auxquelles M. A avait procédé à la suite d'une convention signée le 14 décembre 1989 avec la SARL ERIM Golf en vue de la réalisation d'un complexe de golf sur le territoire des communes de Landudec et de Plogastel-Saint-Germain (Finistère) ; que par lettre du 21 juin 1993, elle a demandé à M. A d'apporter toutes justifications sur l'origine et la nature de certaines opérations enregistrées au crédit de ses comptes bancaires ; que, par une réponse en date du 23 novembre 1993, M. A a indiqué au vérificateur que les sommes en cause, qui s'élevaient au total à 750 000 F pour 1990, correspondaient à des indemnités qui lui avaient été versées pour compenser le préjudice lié, d'une part, à la dépréciation des terrains concernés par le projet de création d'un complexe de golf et, d'autre part, à la perte de ses quotas laitiers et à la cessation de son activité d'éleveur ; que ces explications ont conduit l'administration fiscale à inclure ces sommes dans le revenu imposable de M. A au titre de l'année 1990, d'abord dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, par une notification de redressements du 24 décembre 1993, puis dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, par une notification de redressements du 18 novembre 1994 ; que M. A se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 2 février 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 13 décembre 2001 du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1990 ;

Sur la régularité de l'arrêt attaqué :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un mémoire enregistré au greffe de la cour le 16 avril 2003, M. A a reconnu ne pas avoir répondu dans le délai fixé par les textes à la seconde notification de redressements, en date du 18 novembre 1994 ; qu'il suit de là que la cour a pu à bon droit estimer que le requérant avait abandonné le moyen tiré de ce qu'il n'avait pas à supporter la charge de la preuve du caractère excessif des redressements qui lui avaient été assignés par cette notification et, par suite, s'abstenir d'y répondre ;

Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : Un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu (...) ne peut être engagé sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. / L'avis envoyé ou remis au contribuable avant l'engagement d'un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle peut comporter une demande des relevés de compte (...). ; que la cour a relevé, d'une part, que la seule circonstance que la notification de redressements envoyée à M. A le 18 novembre 1994 mentionnait que l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle avait commencé le 31 mars 1993 n'était pas, en elle-même, de nature à établir que, dès cette date, l'administration aurait procédé, pour les besoins de cet examen, à des démarches autres que celle consistant à demander à M. A de produire les extraits de ses comptes bancaires et, d'autre part, que la consultation, au sein du dossier fiscal du contribuable, des extraits d'actes relatifs aux acquisitions foncières réalisées par M. A en 1990 ne pouvait être rattachée aux opérations relatives à cet examen ; que par suite, en déduisant de ces faits, qu'elle a souverainement appréciés, que les opérations de contrôle n'avaient pu débuter avant l'entretien du 24 mai 1993, au cours duquel le contribuable a remis au vérificateur les relevés de ses comptes bancaires, la cour n'a pas dénaturé les pièces du dossier ;

Considérant, en deuxième lieu, que le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales interdit au vérificateur d'adresser la notification de redressements qui, selon l'article L. 48 du même livre, marquera l'achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les éléments qu'il envisage de retenir ; qu'en outre, dans sa version remise à M. A, la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, exige que le vérificateur ait recherché un tel dialogue avant même d'avoir recours à la procédure écrite et contraignante de l'article L. 16 du même livre ;

Considérant, d'une part, que la cour a relevé que le vérificateur a eu, le 13 octobre 1993, un entretien avec M. A, ayant trait aux renseignements recueillis et aux éléments faisant défaut, et qu'à la suite de cette rencontre, le contribuable a ensuite présenté divers documents et observations écrites, lesquels ont été examinés préalablement à la notification de redressements ; que c'est par une appréciation souveraine qu'elle en a alors déduit que le moyen tiré de l'absence de débat contradictoire entre le vérificateur et le contribuable vérifié manque en fait ;

Considérant, d'autre part, que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant qu'était sans incidence sur la régularité de la procédure la circonstance que le vérificateur se serait, en méconnaissance de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, refusé à tout débat contradictoire avant l'envoi de la demande de justifications en date du 21 juin 1993 adressée à M. A par l'administration sur le fondement de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, dès lors que le redressement n'a pas été établi suivant la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 69 du livre des procédures fiscales et applicable aux contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes de justifications formulées dans le cadre de l'article L. 16, mais suivant la procédure contradictoire, en se fondant sur les éléments fournis par le contribuable en réponse à la demande de justifications ;

Considérant, en troisième lieu, que, si M. A soutient que la cour aurait méconnu le principe de non-rétroactivité des peines et des sanctions en validant implicitement, en se fondant sur les dispositions de l'article L. 47 C du livre des procédures fiscales, les pénalités mises à sa charge, ce moyen manque en tout état de cause en fait, les droits rappelés étant seulement assortis d'intérêts de retard ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 92 du code général des impôts : 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou revenus (...) ;

Considérant que, pour rejeter la contestation par M. A de l'imposition, au titre des bénéfices non commerciaux, des indemnités en litige, la cour s'est fondée sur le fait qu'il n'établissait ni la réalité ni l'étendue du préjudice qu'il prétendait avoir subi en raison de la dépréciation des terrains et immeubles concernés par le projet de golf et de la cessation de ses activités d'éleveur ; qu'en attribuant ainsi à M. A la charge de la preuve, la cour n'a pas commis d'erreur de droit, dès lors qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le contribuable devait être regardé comme ayant accepté lesdits redressements, faute d'avoir répondu dans le délai de trente jours à la notification de redressements du 18 novembre 1994 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. A au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Philippe A et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 18 jan. 2008, n° 280573
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: Mme Karin Ciavaldini
Rapporteur public ?: M. Collin Pierre
Avocat(s) : SCP LAUGIER, CASTON

Origine de la décision
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Date de la décision : 18/01/2008
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 280573
Numéro NOR : CETATEXT000018072660 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2008-01-18;280573 ?
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