Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, enregistré le 27 janvier 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 7 novembre 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, infirmant le jugement du tribunal administratif d'Orléans en date du 20 mai 2003, a déchargé la société Groupe Monin du complément d'imposition forfaitaire annuelle (IFA) mis à sa charge au titre de l'année 1997 ainsi que des pénalités correspondantes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Anne Egerszegi, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 7 novembre 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, infirmant le jugement du tribunal administratif d'Orléans en date du 20 mai 2003, a remis à la charge de la société Groupe Monin le complément d'imposition forfaitaire annuelle (IFA) auquel elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1997 ainsi que les pénalités correspondantes ;
Considérant d'une part, qu'aux termes de l'article 223 septies du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années en litige : Les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés sont assujetties à une imposition forfaitaire annuelle d'un montant fixé à : (…)10 500 F pour les personnes morales dont le chiffre d'affaires est compris entre 2 000 000 F et 5 000 000 F ; 14 500 F pour les personnes morales dont le chiffre d'affaires est compris entre 5 000 000 F et 10 000 000 F ; (…) ; /Le chiffre d'affaires à prendre en considération s'entend du chiffre d'affaires, tous droits et taxes compris, du dernier exercice clos.(…) ; qu'aux termes de l'article 1668 A du même code : L'imposition forfaitaire visée à l'article 223 septies doit être payée spontanément à la caisse du comptable du Trésor chargé du recouvrement de l'impôt sur les sociétés, au plus tard le 15 mars. /Le recouvrement de l'imposition ou de la fraction d'imposition non réglée est poursuivi, le cas échéant, en vertu d'un rôle émis par le directeur des services fiscaux. ;
Considérant d'autre part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : (…), lorsque l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dues en vertu du code général des impôts, les redressements correspondants sont effectués suivant la procédure de redressement contradictoire définie aux articles L. 57 à L. 61 A. ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Groupe Monin, qui avait déclaré sur la liasse fiscale déposée au titre de l'exercice clos en 1996 un chiffre d'affaires de 5 666 812 F TTC et qui, en application du barème en vigueur, aurait dû acquitter 14 500 F au titre de l'imposition forfaitaire annuelle, a calculé le montant de son versement en retenant son chiffre d'affaires hors taxes ; que l'administration fiscale, reprenant le montant toutes taxes comprises déclaré par la société, a procédé à la mise en recouvrement par voie de rôle d'une imposition complémentaire d'un montant de 4 000 F au titre de la fraction d'imposition forfaitaire annuelle non réglée ;
Considérant que le recouvrement de la fraction d'imposition non réglée par la société ne procède pas d'une insuffisance, d'une inexactitude, d'une omission ou d'une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul de l'impôt, au sens des dispositions de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi, la cour administrative d'appel de Nantes a commis une erreur de droit en jugeant la procédure d'imposition irrégulière au motif que l'erreur commise par la société devait s'analyser comme une inexactitude au sens de ces dispositions nécessitant, préalablement à la mise en recouvrement de l'impôt, la notification au contribuable, selon la procédure contradictoire, de la nature et des motifs du redressement correspondant ; que par suite, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'en jugeant que le défaut de paiement de l'intégralité du montant de l'imposition forfaitaire annuelle ne présente pas le caractère d'une insuffisance, d'une inexactitude, d'une omission ou d'une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul de l'impôt au sens des dispositions de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, le tribunal administratif d'Orléans a répondu aux moyens de la requête et suffisamment motivé sa décision ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été jugé ci-dessus, la mise en recouvrement de la fraction de l'imposition forfaitaire annuelle non payée n'est pas subordonnée à la notification préalable d'un redressement selon la procédure prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales ;
Considérant en deuxième lieu, que l'administration fiscale, qui s'est bornée, par application du barème défini à l'article 1668 A précité, à mettre en recouvrement la fraction d'imposition forfaitaire annuelle non payée, sans rectifier les éléments de base déclarés par le redevable, n'était pas tenue de permettre à celui-ci de présenter des observations préalables ;
Considérant en troisième lieu, que la société ne peut utilement se prévaloir de la doctrine administrative 4-L-632 n° 8 du 30 août 1997 qui ne donne pas des textes susmentionnés une interprétation différente de celle qui a été ci-dessus retenue ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Groupe Monin n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 20 mai 2003, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément d'imposition forfaitaire annuelle auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1997 et des pénalités correspondantes ;
Sur les conclusions présentées par la société Groupe Monin au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à la société la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes en date du 7 novembre 2005 est annulé.
Article 2 : La requête de la société Groupe Monin présentée devant la cour administrative d'appel de Nantes est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE et à la société Groupe Monin.