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04/02/2008 | FRANCE | N°304253

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 04 février 2008, 304253


Vu le recours, enregistré le 30 mars 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 1er de l'arrêt du 8 février 2007 en tant que la cour administrative d'appel de Paris, faisant partiellement droit à la requête d'appel de M. Robert A contre le jugement du 20 octobre 2004 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il

a été assujetti au titre des années 1991 à 1993 et réformant l...

Vu le recours, enregistré le 30 mars 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 1er de l'arrêt du 8 février 2007 en tant que la cour administrative d'appel de Paris, faisant partiellement droit à la requête d'appel de M. Robert A contre le jugement du 20 octobre 2004 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1991 à 1993 et réformant ledit jugement, a accordé à M. A la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1991 ;

2°) statuant au fond, de rejeter la requête d'appel de M. A en tant qu'elle porte sur l'année 1991 et de remettre à sa charge la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Caroline Martin, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. A,

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A a, au cours des années 1991 à 1993, détourné des fonds de la Banque nationale de Paris (BNP) dont il était le salarié ; que ces détournements de fonds ont été imposés en tant que bénéfices non commerciaux ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE se pourvoit en cassation contre l'article 1er de l'arrêt par lequel la cour administrative d'appel de Paris, réformant le jugement du tribunal administratif de Paris qui avait rejeté les prétentions de M. A, a déchargé celui-ci de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1991 au motif que la procédure d'évaluation d'office suivie était irrégulière et que la substitution de base légale demandée par le ministre ne pouvait être accueillie ; que M. A présente des conclusions incidentes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1992 et 1993 ;

Sur le recours du ministre :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le ministre a fait valoir en appel que l'administration avait suivi la procédure contradictoire définie à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales ; que la cour, après avoir jugé que la procédure d'évaluation d'office était irrégulière, devait, contrairement à ce que soutient M. A, répondre à la demande de substitution de base légale formulée par le ministre en recherchant s'il résultait des pièces versées au dossier, et notamment des mentions relatives à la procédure suivie, si cette demande ne privait pas le contribuable des garanties prévues par la loi ; qu'elle a commis une erreur de droit en jugeant que la notification de redressement du 20 décembre 1994, qui indiquait que les redressements procédaient de l'exercice du droit de communication, ne comportait pas les conséquences de ces redressements et méconnaissait de ce fait les dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, alors que cet article ne s'applique qu'aux vérifications de comptabilité et examen de situation fiscale personnelle ; que, par suite, par ce moyen, qui n'est pas nouveau en cassation, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du recours, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à demander l'annulation de l'article 1er de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris déchargeant M. A de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1991 ;

Sur les conclusions incidentes :

Considérant que les conclusions du pourvoi incident de M. A sont relatives aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 1992 et 1993, alors que le pourvoi principal porte sur la cotisation supplémentaire mise à sa charge au titre de l'année 1991 ; que, par suite, ces conclusions qui soulèvent un litige distinct sont irrecevables ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond dans la limite de l'annulation prononcée par la présente décision ;

Considérant que si en vertu de l'article L. 68 du livre des procédures fiscales, l'administration n'est pas tenue d'adresser une mise en demeure préalable au contribuable qui ne s'est pas fait connaître d'un centre de formalités des entreprises, il résulte des dispositions de l'article 371 AA de l'annexe II au code général des impôts alors applicable que, parmi les titulaires de bénéfices non commerciaux, seuls les membres des professions libérales étaient astreints à cette formalité ; que M. A n'étant pas membre d'une profession libérale, il n'avait pas à se faire connaître d'un tel centre ; que, par suite, l'administration était tenue, avant d'évaluer d'office les revenus du contribuable, de lui adresser une mise en demeure ; qu'en l'absence de l'envoi de ce document, M. A ne pouvait faire l'objet d'une procédure d'évaluation d'office ;

Considérant que l'administration, qui est en droit, à tout moment d'une procédure, de faire état d'une base légale différente de celle qu'elle a initialement retenue dès lors que cette substitution de base légale ne prive le contribuable d'aucune des garanties prévues par la loi en ce qui concerne cette procédure, fait valoir qu'elle a suivi la procédure contradictoire de redressement ; qu'il résulte de l'instruction que la notification de redressement, si elle ne mentionnait pas la procédure suivie, précisait que le contribuable pouvait présenter des observations dans le délai de trente jours ; qu'ainsi qu'il a été dit, les dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales n'étaient pas applicables aux redressements litigieux, dès lors qu'ils procédaient d'un contrôle sur pièces de la déclaration du contribuable et de la mise en oeuvre du droit de communication prévus par les articles L. 82 et L. 101 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, et alors même que M. A n'a pas présenté d'observations, la demande de substitution de base légale doit être accueillie ;

Considérant qu'il appartient à M. A, qui n'a pas répondu à la notification de redressement, d'apporter la preuve de l'exagération de l'imposition mise à sa charge ;

Considérant qu'en se bornant à soutenir qu'il a reversé les sommes détournées à la société Corfec dont il était le gérant, il n'établit pas ne pas avoir personnellement appréhendé les sommes détournées qui ont été portées sur ses comptes bancaires en 1991 ; que la circonstance qu'il a remboursé à la BNP une partie des sommes détournées en exécution d'un jugement du tribunal de grande instance de Versailles en date du 16 juin 1996 le condamnant à indemniser la BNP est sans influence sur le caractère imposable de ces sommes au titre de l'année 1991 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1991 ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme que M. A demande sur ce fondement ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 1er de l'arrêt du 8 février 2007 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.

Article 2 : La cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. A a été assujetti au titre de l'année 1991 et les pénalités correspondantes sont remises à sa charge.

Article 3 : Les conclusions incidentes de M. A devant le Conseil d'Etat ainsi que ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le jugement du 20 octobre 2004 du tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE et à M. Robert A.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 04 fév. 2008, n° 304253
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Delarue
Rapporteur ?: Mme Caroline Martin
Rapporteur public ?: Mme Escaut Nathalie
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Date de la décision : 04/02/2008
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 304253
Numéro NOR : CETATEXT000018259768 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2008-02-04;304253 ?
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