La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/03/2008 | FRANCE | N°297860

France | France, Conseil d'État, 2ème sous-section jugeant seule, 19 mars 2008, 297860


Vu l'ordonnance du 26 septembre 2006, enregistrée le 2 octobre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président du tribunal administratif de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351 ;2 du code de justice administrative, la requête présentée à ce tribunal par la COMMUNE DE BINNINGEN (Suisse) ;

Vu la requête, enregistrée le 21 septembre 2006 au greffe du tribunal administratif de Paris, présentée par la COMMUNE DE BINNINGEN ; la COMMUNE DE BINNINGEN demande au juge administratif :

1

°) d'annuler l'arrêté du 25 avril 2006 du ministre des transports, de ...

Vu l'ordonnance du 26 septembre 2006, enregistrée le 2 octobre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président du tribunal administratif de Paris a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351 ;2 du code de justice administrative, la requête présentée à ce tribunal par la COMMUNE DE BINNINGEN (Suisse) ;

Vu la requête, enregistrée le 21 septembre 2006 au greffe du tribunal administratif de Paris, présentée par la COMMUNE DE BINNINGEN ; la COMMUNE DE BINNINGEN demande au juge administratif :

1°) d'annuler l'arrêté du 25 avril 2006 du ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, portant création d'une procédure d'approche aux instruments de précision en piste 34 de l'aéroport de Bâle-Mulhouse (Haut-Rhin) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative ;



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention d'Espoo du 25 février 1991 sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte trans-frontière ;

Vu la convention d'Aarhus du 25 juin 1998 sur l'accès à l'information, la participation du public aux processus décisionnels et l'accès à la justice en matière d'environnement ;

Vu la convention franco-suisse du 4 juillet 1949 relative à la construction et à l'exploitation de l'aéroport de Bâle-Mulhouse ;

Vu le code de l'aviation civile ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le décret n° 2002-895 du 15 mai 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jérôme Marchand-Arvier, Auditeur,

- les conclusions de M. Frédéric Lenica, Commissaire du gouvernement ;



Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre ;

Sur la légalité externe de l'arrêté attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article D. 131 ;2 du code de l'aviation civile : « La circulation aérienne comprend : / - La circulation aérienne générale qui relève de la compétence du ministre chargé de l'aviation civile ; / - La circulation aérienne militaire qui relève de la compétence de la défense » ; qu'aux termes de l'article D. 131 ;6 du même code : « (…) le ministre chargé de l'aviation civile et le ministre chargé de la défense établissent la réglementation propre à la circulation aérienne qui relève de leurs compétences respectives » ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 15 mai 2002 relatif aux attributions du ministre de l'écologie et du développement durable, le ministre : « (…) 12° … participe à la détermination et à la mise en oeuvre de la politique en matière d'urbanisme, d'équipement, de transports et de grandes infrastructures, en particulier en ce qui concerne la prévention et la réduction des risques écologiques » ; qu'il résulte des dispositions combinées de ces articles que le ministre chargé de l'aviation civile a seul compétence pour établir la réglementation en matière de circulation aérienne générale ; qu'ainsi, l'arrêté attaqué, qui crée une procédure d'approche aux instruments de précision de l'aéroport de Bâle-Mulhouse, n'avait pas à être contresigné par le ministre de l'écologie et du développement durable ;

Considérant que, faute d'être assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé, le moyen tiré du caractère incomplet du dossier de consultation du projet de la nouvelle procédure d'approche ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'office fédéral de l'aviation civile suisse a été consulté sur ce projet ; qu'ainsi, et en tout état de cause, le moyen tiré du défaut de sa consultation manque en fait ;

Considérant que les stipulations du paragraphe 4 de l'article 6 de la convention sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement, signée à Aarhus le 25 juin 1998, selon lesquelles : « Chaque Partie prend des dispositions pour que la participation du public commence au début de la procédure, c'est-à-dire lorsque toutes les options et solutions sont encore possibles et que le public peut exercer une réelle influence », celles du paragraphe 8 du même article, aux termes desquelles : « Chaque Partie veille à ce que, au moment de prendre sa décision, les résultats de la procédure de participation du public soient dûment pris en considération » et celles de l'article 8 de ladite convention, selon lesquelles : « Chaque Partie s'emploie à promouvoir une participation effective du public à un stade approprié - et tant que les options sont encore ouvertes - durant la phase d'élaboration par des autorités publiques des dispositions réglementaires et autres règles juridiquement contraignantes d'application générale qui peuvent avoir un effet important sur l'environnement (...) », créent seulement des obligations entre les Etats parties à la convention et ne produisent pas d'effets directs à l'égard d'autres personnes dans l'ordre juridique interne ; qu'elles ne peuvent, par suite être utilement invoquées ;

Considérant que ne créent également des obligations qu'entre les Etats parties et ne produisent pas d'effet direct à l'égard d'autres personnes dans l'ordre juridique interne les stipulations des paragraphes 2 et 6 de l'article 2 de la convention sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte trans-frontière, signée à Espoo le 25 février 1991, selon lesquelles : « …2. Chaque Partie prend les mesures nécessaires pour mettre en oeuvre les dispositions de la présente convention y compris en ce qui concerne (…) l'établissement d'une procédure d'évaluation de l'impact sur l'environnement permettant la participation du public et la constitution du dossier d'évaluation de l'impact sur l'environnement décrit dans l'appendice II. (…) / 6 (…) la partie d'origine offre au public des zones susceptibles d'être touchées la possibilité de participer aux procédures pertinentes d'évaluation de l'impact sur l'environnement des activités proposées et veille à ce que la possibilité offerte au public de la Partie touchée soit équivalente à celle qui est offerte à son propre public », et celles du paragraphe 2 de l'article 4 de la même convention, selon lesquelles : « Les Parties concernées prennent des dispositions pour que le dossier soit distribué aux autorités et au public de la Partie touchée dans les zones susceptibles d'être touchées et pour que les informations formulées soient transmises à l'autorité compétente de la Partie d'origine soit directement soit, s'il y a lieu, par l'intermédiaire de la Partie d'origine, dans un délai raisonnable avant qu'une décision définitive soit prise au sujet de l'activité proposée » ; que, par suite, ces stipulations ne peuvent être utilement invoquées ;

Sur la légalité interne de l'arrêté attaqué :

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que des erreurs de fait aient été commises dans l'évaluation des nuisances sonores susceptibles d'être engendrées par le projet en cause ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée, qui se borne au demeurant à arrêter le principe d'une nouvelle procédure d'approche dont les modalités seront ultérieurement définies, reposerait sur une appréciation erronée des circonstances de fait ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en substituant à la procédure actuellement en vigueur de manoeuvres d'approche à vue imposée, dite « MVI », le système de guidage radioélectrique, dit « ILS », permettant des atterrissages de précision, le ministre ait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que la modification ainsi introduite dans la procédure d'approche de l'aéroport de Bâle-Mulhouse porterait, en elle-même, indépendamment de ses modalités, qui restent à définir, une atteinte excessive à la vie privée et familiale des habitants des environs de l'aéroport compte-tenu de l'objectif de sécurité publique qui la justifie ; qu'ainsi, la commune n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant que si, aux termes de l'article L. 414 ;1 du code de l'environnement, les sites « Natura 2000 » font l'objet de mesures de prévention appropriées pour éviter la détérioration des habitats naturels et les perturbations de nature à affecter de façon significative les espèces de faune et de flore sauvages, il ne ressort pas de pièces du dossier que la nouvelle procédure d'approche, dont le principe a été arrêté par la décision attaquée et qui ne conduira pas au survol direct par les avions de la zone classée « Natura 2000 » de « la vallée du Rhin, d'Artzenheim à Village Neuf », est susceptible de porter une atteinte significative à l'environnement ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de cet article doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE BINNINGEN n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 25 avril 2006 du ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, portant création d'une procédure d'approche aux instruments de précision en piste 34 de l'aéroport de Bâle-Mulhouse ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la COMMUNE DE BINNINGEN demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;



D E C I D E :
--------------
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE BINNINGEN est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE BINNINGEN et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 19 mar. 2008, n° 297860
Inédit au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Honorat
Rapporteur ?: M. Jean-François Mary

Origine de la décision
Formation : 2ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 19/03/2008
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 297860
Numéro NOR : CETATEXT000018396791 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2008-03-19;297860 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award