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21/03/2008 | FRANCE | N°284799

France | France, Conseil d'État, 8ème sous-section jugeant seule, 21 mars 2008, 284799


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 septembre 2005 et 6 janvier 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Louis A, demeurant ...; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 7 juillet 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à la réformation du jugement du 2 octobre 2000 du tribunal administratif de Nice en tant que le tribunal a partiellement rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxque

lles il a été assujetti au titre des années 1988 à 1990 ;

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 septembre 2005 et 6 janvier 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Louis A, demeurant ...; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 7 juillet 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à la réformation du jugement du 2 octobre 2000 du tribunal administratif de Nice en tant que le tribunal a partiellement rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1988 à 1990 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de lui accorder la décharge des impositions restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Patrick Quinqueton, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. A,

- les conclusions de Mme Nathalie Escaut, Commissaire du gouvernement ;



Considérant qu'il ressort des pièces soumises aux juges du fond que M. A a exploité personnellement jusqu'en 1971 un restaurant qu'il avait acquis, à Mandelieu, puis l'a donné en location-gérance à la SA des restaurants de l'Oasis dont il était président-directeur général et dont il détenait avec des membres de sa famille 99 % des parts ; que le 30 novembre 1990, M. A a vendu le fonds de commerce et les murs du restaurant ; qu'il a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des années 1988 à 1990 dont sont issus des redressements notifiés suivant la procédure contradictoire prévue par l'article L. 55 du livre des procédures fiscales ; que, par un jugement en date du 2 octobre 2000, le tribunal administratif de Nice, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence des sommes dégrevées en cours d'instance et diminué le montant de la redevance de location gérance à prendre en compte pour la détermination de son bénéfice commercial, a rejeté le surplus des conclusions de la requête de M. A ; que M. A demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 7 juillet 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à la réformation du jugement du 2 octobre 2000 du tribunal administratif de Nice en tant que le tribunal a partiellement rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1988 à 1990 ;

Sur la motivation de la notification de redressements :

Considérant en premier lieu qu'aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales : A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des redressements sont envisagés, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés dans la notification prévue à l'article L 57, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces redressements... ; que la cour a relevé, premièrement, que la notification de redressements en date du 30 octobre 1991 comporte pour les impositions contestées le montant des redressements, les droits après contrôle, les droits déjà payés et les droits rappelés en distinguant l'impôt sur le revenu de la taxe sur la valeur ajoutée, deuxièmement, que le montant de la contribution sociale généralisée réclamée à M. A au titre de l'année 1990 a fait l'objet d'un dégrèvement dans un contentieux distinct et, troisièmement, que la base et le taux de la plus-value nécessaires à son calcul figuraient dans la notification de redressements ; qu'en déduisant de ces circonstances, qu'elle a appréciées sans dénaturer les pièces du dossier, la cour, qui n'avait pas, une fois l'assiette commune déterminée, à expliciter séparément le mode de calcul de l'impôt sur le revenu, de la contribution sociale généralisée et du prélèvement de 1 %, n'a ni insuffisamment motivé son arrêt, ni violé les dispositions précitées de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales ;

Sur la réévaluation de la redevance perçue par M. A :

Considérant que M. A soutenait devant la cour que sa société et lui avaient conclu un accord tacite en vertu duquel la première avait renoncé à exploiter une partie du fonds de commerce - le restaurant - pour ne plus exploiter que la partie liée au conseil gastronomique, de sorte que la partie du fonds correspondant au restaurant était automatiquement revenue dans son patrimoine personnel, justifiant une baisse de la redevance ; que pour juger que la redevance de location-gérance perçue par M. A à raison de la mise en location ;gérance du fonds de commerce de restaurant précédemment exploité à titre individuel et des murs dont il était propriétaire était anormalement faible, la cour a relevé que la diminution constante des redevances perçues par M. A à titre personnel pour chacune des années 1988 à 1990 n'a été accompagnée pour lui d'aucune contrepartie, que s'il fait valoir que l'exploitation du restaurant a cessé, cette seule circonstance ne suffit pas, alors que M. A et la société des restaurants de l'Oasis étaient juridiquement indépendants, que le contrat de location-gérance, renouvelable annuellement, n'avait pas été modifié, et que la société locataire s'était engagée à gérer en bon père de famille le bien qui lui était confié, à justifier la baisse de redevance ainsi constatée ; qu'en procédant ainsi, la cour a exactement qualifié les faits qui lui étaient soumis, qu'elle n'a pas dénaturés ; que, pour le calcul de la redevance normalement due, la cour, qui, ce faisant, n'a pas apprécié le caractère anormal de cet acte de gestion commencé en 1988 au regard d'une situation postérieure, a pu sans erreur de droit ni dénaturation des pièces du dossier se référer au prix constaté en 1990 lors de la cession du fonds ; qu'il en résulte que c'est sans commettre d'erreur de droit que la cour a pu déduire de la circonstance, qu'elle a appréciée sans dénaturer les pièces du dossier, que le vérificateur s'était borné à constater que les redevances de location-gérance étaient manifestement inférieures à ce qu'elles auraient du être eu égard aux usages de la profession, au chiffre d'affaires de l'entreprise donnée en location gérance et à l'absence de circonstances particulières, que l'administration n'avait nul besoin de suivre la procédure prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales pour réintégrer dans les résultats de l'activité individuelle du contribuable la libéralité ainsi consentie ;

Sur l'inscription des comptes à terme à l'actif professionnel de M. A :

Considérant que la cour a jugé qu'en soutenant que le paiement d'un prélèvement libératoire pour le produit de ses comptes à terme manifestait que c'est involontairement qu'il les avait inscrits à son bilan professionnel, M. A ne critiquait pas utilement le raisonnement par lequel les premiers juges avaient jugé que l'inscription des comptes litigieux au bilan professionnel du requérant aurait procédé d'une décision de gestion, et non d'une erreur de fait ; qu'en rejetant le moyen, déjà soulevé devant les premiers juges, par adoption des motifs retenus par ceux-ci, la cour n'a dénaturé ni les termes du jugement de première instance, ni les écritures d'appel ;

Sur la déduction des taxes d'habitation afférentes au logement personnel de M. A :

Considérant que c'est sans dénaturation des écritures d'appel que la cour a jugé que M. A ne critiquait pas utilement le jugement attaqué en tant qu'il a trait à la déduction des taxes d'habitation afférentes à son logement personnel, dès lors que l'appelant ne critiquait pas le jugement en tant qu'il relevait qu'en tout état de cause, un loueur de fonds ne peut pas être amené à déduire la taxe d'habitation ;

Sur la plus-value née de la vente du fonds :

Considérant qu'en refusant à M. A l'exonération de la plus-value née de la vente de son fonds au motif que le seuil d'exonération devait s'apprécier à la hauteur des sommes qu'il aurait pu percevoir s'il avait fixé la redevance de location-gérance au montant préconisé par l'administration, la cour n'a nullement violé les dispositions des articles 151 septies et 302 bis du code général des impôts ;

Sur la réintégration dans les bénéfices industriels et commerciaux de recettes omises au titre de contrats de conseiller technique :

Considérant que l'administration ne peut, en principe, fonder le redressement des bases d'imposition d'un contribuable sur des renseignements et des documents qu'elle a obtenus de tiers sans l'avoir informé, avant la mise en recouvrement, de la teneur et de l'origine de ces renseignements ; que, toutefois, lorsque l'administration fonde le redressement d'un contribuable, personne physique, sur des renseignements fournis par cette même personne mais obtenus dans le cadre d'une vérification de la comptabilité de la société dont elle est le mandataire social, les renseignements obtenus ne peuvent être regardés comme provenant de tiers ; que, dès lors, la cour n'a commis aucune erreur de droit en jugeant que les contrats présentés au vérificateur par M. A ne pouvaient être regardés comme des renseignements recueillis auprès de tiers, alors même qu'elle relevait que ces contrats avaient été présentés par M. A dans le cadre de la vérification de la comptabilité de la SA A, qu'il dirigeait ;

Considérant que si M. A soutient que la cour a omis de répondre au moyen tiré de ce que l'administration n'établissait pas que M. A avait perçu sur ses comptes bancaires personnels les recettes correspondant aux contrats litigieux, il ressort des écritures d'appel que M. A ne soulevait sur ce point devant la cour que le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de la notification de redressements ; que, par suite, le moyen manque en fait ;

Considérant que M. A soutient que la cour a omis de répondre au moyen tiré de ce que, d'une part, il aurait donné en location-gérance à la société les contrats qu'il avait signés en son nom propre et, d'autre part, il n'exploitait nulle entreprise industrielle ou commerciale susceptible de justifier l'application de l'article 155 du code général des impôts ; que, toutefois, dès lors que la cour relevait dans son arrêt que, d'une part, les contrats étaient signés au nom propre du contribuable et non au nom de sa société, l'acte de cession du fonds de commerce portait sur l'ensemble des contrats de conseil signés par le cédant à l'exception du contrat de location-gérance et, d'autre part, le caractère indifférencié des sommes perçues au titre de ces contrats permettait de les rattacher à la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, le moyen manque en fait ;

Considérant que c'est sans erreur de droit que la cour a pu déduire de la circonstance, qu'elle relevait, que l'administration, tirant la conséquence de ce que ces mêmes contrats avaient été passés par M. A en son nom propre, s'est bornée à réintégrer les recettes perçues par M. A en provenance de ces sociétés dans les résultats de l'activité individuelle du contribuable sans écarter ces contrats, que l'administration n'avait pas eu implicitement recours à la procédure de répression des abus de droit ;

Sur les pénalités de mauvaise foi :

Considérant que c'est sans insuffisance de motivation ni erreur de droit que la cour a pu écarter comme inopérant au regard du présent litige le moyen tiré de ce que les pénalités de mauvaise foi avaient fait l'objet d'une décharge dans le contentieux, distinct, relatif à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant qu'en déduisant la mauvaise foi du requérant de la nature et de l'importance des omissions dénoncées ainsi que de la circonstance que les pratiques mises en oeuvre par le contribuable révèlent qu'il ne pouvait en ignorer le caractère proscrit, la cour a très exactement qualifié les faits qui lui étaient soumis ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. A ne peut qu'être rejetée ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;




D E C I D E :
--------------

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Louis A et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.


Synthèse
Formation : 8ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 284799
Date de la décision : 21/03/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 21 mar. 2008, n° 284799
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Le Roy
Rapporteur ?: M. Patrick Quinqueton
Rapporteur public ?: Mme Escaut Nathalie
Avocat(s) : SCP WAQUET, FARGE, HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2008:284799.20080321
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