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21/03/2008 | FRANCE | N°303157

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 21 mars 2008, 303157


Vu la requête, enregistrée le 5 mars 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Annie A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) de condamner la SCP Richard, venant aux droits de la SCP Richard et Mandelkern, à lui verser la somme de 60.000 euros, augmentée des intérêts légaux capitalisés, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de ne pas avoir été correctement conseillée et défendue par cette société d'avocats dans le litige l'opposant à l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, nonobsta

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Vu la requête, enregistrée le 5 mars 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Annie A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) de condamner la SCP Richard, venant aux droits de la SCP Richard et Mandelkern, à lui verser la somme de 60.000 euros, augmentée des intérêts légaux capitalisés, en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de ne pas avoir été correctement conseillée et défendue par cette société d'avocats dans le litige l'opposant à l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, nonobstant l'avis émis le 9 mars 2006 par le conseil de l'Ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;

2°) de mettre à la charge de la SCP Richard le versement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance du 10 septembre 1817, modifiée par le décret du 11 janvier 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Rémi Decout-Paolini, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Delvolvé, Delvolvé, avocat de Mme A et de Me Hemery, avocat de la SCP Richard,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;


Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 13 de l'ordonnance du 10 septembre 1817, modifiée par le décret du 11 janvier 2002 : « Les actions en responsabilité civile professionnelle engagées à l'encontre d'un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation sont portées, après avis du conseil de l'ordre, devant le Conseil d'Etat, quand les faits ont trait aux fonctions exercées devant le Tribunal des conflits et les juridictions de l'ordre administratif, et devant la Cour de cassation dans les autres cas » ; que Mme A recherche la responsabilité de la SCP Richard et Mandelkern, sur le fondement de ces dispositions, à la suite du rejet de l'action engagée par elle devant le tribunal administratif de Paris tendant à la mise en jeu de la responsabilité de l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris pour avoir refusé d'avoir recours à ses services dans le cadre de l'hospitalisation à domicile ;

Considérant que Mme A soutient que la SCP Richard et Mandelkern a manqué à son obligation de conseil en ne l'avertissant pas de la durée et des aléas de la procédure qu'elle entendait engager contre l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, et notamment du risque d'échec qu'elle encourait ; qu'elle a négligé le traitement de son dossier, omettant de se saisir d'arguments propres à assurer utilement sa défense ; qu'elle a également manqué à son obligation de diligence en omettant de répondre pertinemment à des éléments de faits inexacts avancés par la partie adverse, empêchant ainsi le tribunal administratif de Paris d'apprécier le caractère abusif et discriminatoire du refus de collaboration que lui opposait l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, ainsi que l'ampleur du préjudice né de cette situation ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A, sage-femme exerçant sa profession à titre libéral, a sollicité l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris afin que celle-ci lui adresse une clientèle dans le cadre de son service de l'hospitalisation à domicile ; que cette demande a fait l'objet d'une décision de refus le 7 février 1996 ; que, s'estimant victime d'un comportement discriminatoire, la requérante a sollicité l'avis juridique de sa mutuelle, le Sou Médical, laquelle s'est tournée vers son conseil, la SCP Richard et Mandelkern ; que cette dernière a émis, le 29 mars 1996, un premier avis négatif quant aux chances de succès d'une action en réparation de Mme A contre l'établissement public ; qu'à la suite de l'échec de son initiative tendant à trouver une solution amiable avec l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, la SCP Richard et Mandelkern a confirmé sa première analyse par un courrier du 10 mai 1996 ; que Mme A a néanmoins décidé d'engager une action en réparation à l'encontre de l'établissement public, qui a fait l'objet d'un rejet par le tribunal administratif de Paris par un jugement du 27 mars 2003 ; que la requérante a suivi la recommandation qui lui a été faite par la SCP Richard et Mandelkern de ne pas interjeter appel de ce jugement ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte des faits rappelés ci-dessus que, dès avant l'ouverture d'une action contentieuse devant le tribunal administratif de Paris, la SCP Richard et Mandelkern a loyalement informé Mme A de ce que sa demande ne pourrait prospérer ; qu'en sa qualité de conseil de la requérante, elle a établi sans retard deux mémoires argumentés tant en droit qu'en fait, visant notamment à exposer le préjudice dont s'estimait victime Mme A ; que le moyen tiré du manquement à l'obligation de conseil ne peut donc qu'être écarté ;

Considérant, d'autre part, que si la requérante soutient que la SCP Richard et Mandelkern aurait omis de mentionner certains faits établissant le caractère discriminatoire de la décision litigieuse, il résulte de l'instruction que la SCP Richard et Mandelkern avait bien soulevé devant le tribunal administratif le moyen tiré de la violation du principe d'égalité, en l'appuyant de l'argumentation qui lui semblait la plus appropriée, et que la requérante n'établit nullement que des faits déterminants à cet égard auraient été omis ; que, par suite, aucun manquement à l'obligation de diligence ne saurait être retenu à son encontre ;

Considérant qu'il résulte de qui précède que Mme A n'est pas fondée à rechercher la responsabilité de la SCP Richard et Mandelkern à raison d'une perte de chance sérieuse d'obtenir une décision plus favorable du tribunal administratif de Paris ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


D E C I D E :
--------------


Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Annie A, à la SCP Richard et Mandelkern.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 21 mar. 2008, n° 303157
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Schrameck
Rapporteur ?: M. Rémi Decout-Paolini
Rapporteur public ?: M. Guyomar Mattias
Avocat(s) : SCP DELVOLVE, DELVOLVE ; SCP BARADUC, DUHAMEL ; HEMERY

Origine de la décision
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 21/03/2008
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 303157
Numéro NOR : CETATEXT000018397110 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2008-03-21;303157 ?
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