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15/04/2008 | FRANCE | N°314117

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 15 avril 2008, 314117


Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SASP BLAGNAC SPORTING CLUB RUGBY, dont le siège est Rue du Moulin Stade Argeles à Blagnac (31700), représentée par son président directeur général en exercice, pour M. Jean-Louis A, demeurant ... et pour la SAS EURELOC, dont le siège est 29 rue Jean Monnet à Saint Jean (31240) ; les requérants demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution d

e la décision du 27 février 2008 par laquelle le comité directeur de la L...

Vu la requête, enregistrée le 10 mars 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SASP BLAGNAC SPORTING CLUB RUGBY, dont le siège est Rue du Moulin Stade Argeles à Blagnac (31700), représentée par son président directeur général en exercice, pour M. Jean-Louis A, demeurant ... et pour la SAS EURELOC, dont le siège est 29 rue Jean Monnet à Saint Jean (31240) ; les requérants demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution de la décision du 27 février 2008 par laquelle le comité directeur de la Ligue nationale de rugby a modifié les articles 58 et 59 des règlements de cette ligue ;

2°) de mettre à la charge de la Ligue nationale de rugby la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;


les requérants soutiennent qu'il y a urgence, dès lors qu'en application du règlement contesté, les dirigeants des sociétés en cause encourent des sanctions pouvant aller jusqu'à la radiation, et que la Ligue nationale de rugby pourrait interdire à la SASP BLAGNAC SPORTING CLUB RUGBY tout recrutement de joueur professionnel pour la saison prochaine, compromettant ainsi son avenir sportif ; qu'il existe un doute quant à la légalité de la décision contestée ; qu'en effet, la Fédération française de rugby (FFR), qui n'est pas compétente pour édicter des règles relatives à l'administration des sociétés sportives et à leur prise de participation, ne pouvait déléguer à la Ligue nationale de rugby compétence en ces matières ; que la décision litigieuse, qui a ajouté aux dispositions du code du sport et du code du commerce en restreignant les possibilités et les modalités de prise de contrôle et de participation au sein d'une société sportive, est intervenue en méconnaissance des articles 34 et 37 de la Constitution, dans la mesure où seule la loi peut déterminer les principes fondamentaux des droits réels et des obligations civiles et commerciales ; qu'elle a entendu modifier les champs d'application respectifs de l'article L. 122-7 du code du sport et de l'article L. 233-16 du code de commerce ; que cette décision méconnaît enfin les articles L. 122-2 à L. 122-11 du code du sport ainsi que l'article L. 233-16 du code du commerce ;


Vu le règlement dont la suspension est demandée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 avril 2008, présenté pour la Ligue nationale de rugby, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise solidairement à la charge des requérants une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que la requête est irrecevable en l'absence de saisine préalable du comité national olympique et sportif français (CNOSF) ; qu'il n'y a pas urgence, dès lors que les requérants ne démontrent pas en quoi leurs intérêts seraient lésés d'une manière grave ou immédiate, que M. A s'est mis en conformité avec le nouveau règlement en démissionnant de ses fonctions de président du club d'Albi et que ces nouvelles dispositions sont justifiées par des considérations d'intérêt général qui exigent que le nouveau règlement soit immédiatement appliqué ; que les dispositions contestées ont été édictées en vertu d'une subdélégation accordée par la Fédération française de rugby à la Ligue nationale de rugby et relèvent bien de sa compétence ; qu'elles ne méconnaissent pas les dispositions du code du sport et du code du commerce, mais qu'elles les complètent de manière proportionnée afin de sauvegarder l'éthique du rugby professionnel et de garantir la sincérité des compétitions sportives ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 7 avril 2008, présenté pour la SASP BLAGNAC SPORTING CLUB et autres, qui reprennent les conclusions de leur requête et les mêmes moyens ; ils soutiennent en outre que la saisine du comité national olympique et sportif français n'était pas obligatoire, s'agissant d'une décision réglementaire ; que la circonstance que M. A a démissionné de la présidence du club d'Albi est sans incidence sur l'urgence, dès lors que l'intéressé demeure administrateur de la SASP Sporting club Albigeois et que la SAS EURELOC est administrateur des deux sociétés sportives de Blagnac et d'Albi ; que la balance des intérêts penche en faveur de la suspension de la décision attaquée ;


Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la SASP BLAGNAC SPORTING CLUB RUGBY, M. Jean-Louis A et la SAS EURELOC et, d'autre part, la Ligue nationale de rugby et le ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 8 avril 2008 à 11 heures 30 au cours de laquelle ont été entendus, Me Spinosi, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat des requérants et Me Defrénois, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la Ligue nationale de rugby, et à l'issue de laquelle l'instruction a été prolongée ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 9 avril 2008, présenté pour la SASP BLAGNAC SPORTING CLUB et autres, qui reprennent les conclusions de leur requête et les mêmes moyens ; ils soutiennent en outre que M. A est administrateur et président du conseil d'administration de la SASP BLAGNAC SPORTING CLUB ; que la SAS EURELOC n'est pas administrateur de cette société sportive ; que la SAS EURELOC n'est pas administrateur de la SASP Sporting club Albigeois ; que M. A a démissionné de ses fonctions d'administrateur et de président du conseil d'administration de cette société sportive ; que ces démissions sont intervenues pour éviter les sanctions pouvant être infligées par la Ligue nationale de rugby en application du règlement contesté ;

Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 9 avril 2008, présenté pour la Ligue nationale de rugby, qui reprend les conclusions de son précédent mémoire et les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 9 avril 2008, présenté pour la Ligue nationale de rugby ;

Vu la Constitution, et notamment ses articles 34 et 37 ;

Vu le code du commerce ;

Vu le code du sport ;
Vu le code de justice administrative ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : « Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision » ;

Considérant que l'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celle-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; que l'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire ;

Considérant que, par décision du 27 février 2008, le comité directeur de la Ligue nationale de rugby a modifié les articles 58 et 59 des règlements généraux de cette ligue ; qu'avant cette modification, l'article 58 de ce règlement interdisait à tout dirigeant d'une société sportive d'être, directement ou par représentation, dirigeant d'une autre association sportive participant à un championnat organisé par la Fédération française de rugby ; qu'après cette modification, cet article 58 interdit à une même personne physique et morale, directement ou indirectement, en droit ou en fait, d'être membre de l'organe de direction (conseil d'administration ou directoire) et/ou de surveillance de plusieurs sociétés sportives membres de la Ligue nationale de rugby ; qu'en vertu de cette décision du 27 février 2008 les personnes et clubs concernés disposent, pour se mettre en conformité avec ces nouvelles règles, d'un délai expirant le 30 avril 2008 ;

Considérant que, pour justifier de l'urgence à suspendre cette décision, la SASP BLAGNAC SPORTING CLUB, qui gère le club de rugby de Blagnac, M. A et la SAS EURELOC invoquent le risque de sanctions en cas de méconnaissance des nouvelles règles ainsi que les conséquences de la nouvelle interdiction ; que toutefois, s'ils soutiennent dans leurs dernières écritures, contrairement à leurs mémoires et déclarations antérieurs, que M. A et la SAS EURELOC ne détiennent plus de fonctions de nature à tomber sous le coup de la nouvelle interdiction, ils ne justifient pas que l'application de la décision du 27 février 2007 aurait pour eux des conséquences économiques ou personnelles d'une gravité suffisante pour caractériser une situation d'urgence ; qu'ainsi, la condition d'urgence n'étant pas remplie, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les moyens présentés à l'encontre de la décision contestée, les conclusions à fin de suspension ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Ligue nationale de rugby, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demandent les requérants au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants la somme que demande la Ligue nationale de rugby au même titre ;



O R D O N N E :
------------------
Article 1er : La requête de la SASP BLAGNAC SPORTING CLUB, de M. A et de la SAS EURELOC est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la Ligue nationale de rugby tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la SASP BLAGNAC SPORTING CLUB, à M. Jean-Louis A, à la SAS EURELOC et à la Ligue nationale de rugby.
Copie en sera adressée pour information au ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 314117
Date de la décision : 15/04/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 avr. 2008, n° 314117
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Philippe Martin
Avocat(s) : SPINOSI ; SCP DEFRENOIS, LEVIS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2008:314117.20080415
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