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07/05/2008 | FRANCE | N°303931

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 07 mai 2008, 303931


Vu l'ordonnance du 6 mars 2007 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée le 2 août 2006 par M. Raymond A devant cette cour ;

Vu le pourvoi enregistré le 2 août 2006 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et le mémoire complémentaire, enregistré le 2 juillet 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. Raymond A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :


1°) d'annuler le jugement du 8 juin 2006 du tribunal adm...

Vu l'ordonnance du 6 mars 2007 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée le 2 août 2006 par M. Raymond A devant cette cour ;

Vu le pourvoi enregistré le 2 août 2006 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et le mémoire complémentaire, enregistré le 2 juillet 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour M. Raymond A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 8 juin 2006 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire de procéder à sa réintégration dans le grade de brigadier de la police nationale au titre de l'année 2001 et de procéder à la reconstitution de sa carrière ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à la demande d'injonction présentée devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, le versement de la somme de 1500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;

Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Bruno Chavanat, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Yann Aguila, Commissaire du gouvernement ;


Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumises au juge du fond que M. A, gardien de la paix affecté au service de la police aux frontières de « Marseille-port », a signé le 30 janvier 2001 un engagement à accepter, en cas de promotion, le poste qui lui serait proposé dans son nouveau grade ; qu'il a été inscrit au tableau d'avancement de l'année 2001 pour le grade de brigadier de la police nationale puis promu, par arrêté du 6 août 2001, au grade de brigadier de police et affecté, par arrêté du 27 novembre 2001, à la circonscription de sécurité publique de Palaiseau à compter du 1er décembre 2001 ; que le ministre de l'intérieur a pris, le 10 décembre 2001, un arrêté prononçant sa radiation du tableau d'avancement de l'année 2001 et rapportant les dispositions des arrêtés des 6 août et 27 novembre 2001 le concernant, au motif qu'il n'avait pas rejoint l'affectation qui lui avait été assignée dans son nouveau grade ; que, par un jugement du 8 juin 2006, le tribunal administratif de Marseille a, dans son article 1er, annulé l'arrêté du 10 décembre 2001 du ministre de l'intérieur ainsi que la décision implicite par laquelle ce dernier a refusé de le retirer, et, dans son article 2, rejeté les conclusions aux fins d'injonction tendant à sa réintégration dans le grade de brigadier de police au titre de l'année 2001 et à la reconstitution de sa carrière ; que M. A se pourvoit contre l'article 2 de ce jugement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 18 du décret n° 95-654 du 9 mai 1995 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale : « Les fonctionnaires postulant à un avancement de grade sont tenus de souscrire préalablement l'engagement d'accepter le poste qui leur sera proposé dans leur nouveau grade. Les fonctionnaires qui n'ont pas souscrit un tel engagement ne sont pas pris en compte pour l'établissement du tableau d'avancement. (…)Les fonctionnaires ayant souscrit un tel engagement et inscrits au tableau d'avancement qui refusent de rejoindre le poste proposé par l'administration sont radiés du tableau d'avancement (....) » ;

Considérant que le tribunal administratif, par un jugement définitif sur ce point, a annulé l'arrêté du 10 décembre 2001 ainsi que la décision de rejet opposée par le ministre de l'intérieur à la demande de M. A de retrait de cet arrêté, au motif que l'intéressé « ne peut être regardé comme s'étant vu proposer et assigner un poste à la suite de son inscription au tableau d'avancement ni a fortiori comme ayant refusé de rejoindre le poste » ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (…) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure, assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; que pour rejeter les conclusions aux fins d'injonction, le tribunal administratif s'est fondé, d'une part, sur la circonstance que M. A a été promu au grade de brigadier à compter du 1er février 2004 et, d'autre part, sur ce qu'il n'établit pas qu'il aurait accepté l'affectation qui lui a été assignée à la suite de son inscription au tableau d'avancement au titre de l'année 2001 ;

Considérant, en premier lieu, que le jugement attaqué n'a pu légalement déduire le rejet de ses conclusions tendant à bénéficier, dès 2001, d'une réintégration dans ce grade et, à compter de cette date, d'une reconstitution de sa carrière de la circonstance que l'intéressé a bénéficié, au cours de l'année 2004, d'une promotion au grade de brigadier de police ;

Considérant, en second lieu, que si, en vertu des dispositions précitées de l'article 18 du décret n° 95-954 du 9 mai 1995, le refus opposé par un fonctionnaire de police de rejoindre le poste d'avancement qui lui est proposé par l'administration fait obstacle à son avancement, il résulte de l'énoncé même du jugement attaqué que M. A ne peut être regardé comme ayant refusé de rejoindre un poste qui lui aurait été proposé ; que la circonstance qu'il n'ait pas eu connaissance de ce que l'administration lui aurait proposé un poste correspondant à son grade d'avancement ne saurait être considérée, au sens des dispositions de l'article 18, comme un refus de sa part de rejoindre le poste qu'il s'était, au contraire, engagé par avance à accepter ; qu'il suit de là que le requérant est fondé à soutenir qu'en jugeant qu'il n'établit ni n'allègue qu'il aurait accepté l'affectation qui lui a été assignée à la suite de son inscription au tableau d'avancement, le tribunal a dénaturé les pièces du dossier ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête, que M. A est fondé à demander l'annulation dans cette mesure du jugement attaqué ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que l'annulation de l'arrêté du 10 décembre 2001 prononçant la radiation de M. A du tableau d'avancement de l'année 2001 et rapportant les dispositions des arrêtés des 6 août et 27 novembre 2001 en vertu desquels il a été promu au grade de brigadier de police et a reçu une nouvelle affectation impliquent nécessairement sa nomination au titre de l'année 2001 dans le grade de brigadier de police et la reconstitution de sa carrière, à compter de la date de sa promotion ; que dans ces conditions, il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales de procéder à la nomination de M. A dans le grade de brigadier de la police nationale au titre de l'année 2001 et de reconstituer sa carrière à compter de sa nomination dans ce grade ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande présentée par M. A et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le requérant et non compris dans les dépens ;




D E C I D E :
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Article 1er : L'article 2 du jugement du 8 juin 2006 du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales de procéder à la nomination de M. A dans le grade de brigadier de la police nationale au titre de l'année 2001 et de reconstituer sa carrière à compter de la date de sa nomination dans ce grade.

Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Raymond A et à la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 303931
Date de la décision : 07/05/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 07 mai. 2008, n° 303931
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Schrameck
Rapporteur ?: M. Bruno Chavanat
Rapporteur public ?: M. Aguila Yann
Avocat(s) : SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2008:303931.20080507
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