Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 février et 9 mai 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jacques A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 décembre 2006 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 16 décembre 2002 et du 28 avril 2003 du maire de Bordeaux portant opposition à travaux et rejet de son recours gracieux ;
2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler les décisions du 16 décembre 2002 et du 28 avril 2003 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laure Bédier, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat de M. A et de Me Odent, avocat de la commune de Bordeaux,
- les conclusions de Mlle Anne Courrèges, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article L. 422-2 du code de l'urbanisme, alors en vigueur, et de l'article R. 111-21 du même code que le maire peut s'opposer à une déclaration de travaux exemptés de permis de construire si la construction projetée est de nature à porter atteinte au caractère des lieux avoisinants ; que, lorsque la déclaration n'a pas fait l'objet d'opposition dans le délai prévu à l'article L. 422-2, la décision tacite qui en résulte ne peut être retirée qu'à la condition, notamment, qu'elle soit entachée d'illégalité ; que, au regard des dispositions de l'article R. 111-21, la décision tacite de non-opposition aux travaux n'est entachée d'illégalité que si elle repose sur une erreur manifeste dans l'appréciation de l'atteinte au caractère des lieux avoisinants ;
Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a écarté le moyen tiré de l'absence d'atteinte portée au caractère des lieux avoisinants par le projet de M. A en se bornant à relever que celui-ci n'établissait pas que le maire aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en retirant la décision litigieuse ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de contrôler la légalité de ce retrait en recherchant si l'autorisation initiale était elle-même entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son jugement doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 : « Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n°79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) » ; qu'il résulte de ces dispositions que les décisions qui retirent une décision créatrice de droits doivent être motivées et que les personnes intéressées doivent avoir au préalable été mises à même de présenter leurs observations écrites ;
Considérant que la décision implicite de non-opposition à travaux dont a bénéficié M. A le 17 novembre 2002 a créé des droits ; que, dès lors, la décision du 16 décembre 2002 retirant cette décision créatrice de droits est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière, faute pour le maire de Bordeaux d'avoir préalablement mis M. A à même de présenter des observations ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à demander l'annulation de la décision du maire de Bordeaux du 16 décembre 2002 retirant la décision implicite de non-opposition à travaux et celle du 28 avril 2003 rejetant son recours gracieux ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la commune de Bordeaux le versement à M. A de la somme de 2 000 euros ; que ces dispositions font en revanche obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. A, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 6 décembre 2006 et les décisions du 16 décembre 2002 et du 28 avril 2003 du maire de Bordeaux sont annulés.
Article 2 : La commune de Bordeaux versera à M. A la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Bordeaux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jacques A et à la commune de Bordeaux.