La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/05/2008 | FRANCE | N°288541

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 21 mai 2008, 288541


Vu le pourvoi sommaire, le mémoire complémentaire et le nouveau mémoire, enregistrés les 26 décembre 2005, 27 avril 2006 et 18 juillet 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Muriel A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 10 mars 2005 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), en exécution du jugement du même tribunal administratif du 16 octobre 2003, de reconstituer sa carrière d'infirmière,

de lui verser la prime de service et de liquider l'astreinte prononcé...

Vu le pourvoi sommaire, le mémoire complémentaire et le nouveau mémoire, enregistrés les 26 décembre 2005, 27 avril 2006 et 18 juillet 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme Muriel A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 10 mars 2005 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), en exécution du jugement du même tribunal administratif du 16 octobre 2003, de reconstituer sa carrière d'infirmière, de lui verser la prime de service et de liquider l'astreinte prononcée par ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

Vu le décret n° 88-1077 du 30 novembre 1988 ;

Vu l'arrêté interministériel du 24 mars 1967 fixant les conditions d'attribution de primes de service aux personnels de certains établissements d'hospitalisation, de soins ou de cure publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Marc Lambron, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Gaschignard, avocat de Mme A et de Me Foussard, avocat de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un jugement du 9 janvier 2003, le tribunal administratif de Paris, après avoir jugé que Mme A, infirmière absente du service pendant la période du 17 mai 1993 au 2 mai 2001, aurait dû bénéficier alors d'un congé pour maladie imputable au service, a renvoyé l'intéressée devant l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) afin que celle-ci lui verse une indemnité égale au montant des traitements qu'elle aurait perçu si elle avait bénéficié d'un tel congé ; que, par un jugement du 16 octobre 2003, le tribunal administratif a, en application des dispositions de l'article L. 911-4 du code de justice administrative, enjoint à l'AP-HP d'exécuter complètement le jugement du 9 janvier 2003 en reconstituant la carrière de Mme A pendant cette période et en lui versant le complément d'indemnité correspondant ; que, Mme A estimant que les mesures auxquelles avait procédé l'AP-HP étaient insuffisantes pour assurer l'exécution complète de ce deuxième jugement, a saisi le tribunal administratif d'une demande tendant à ce qu'il enjoigne à l'AP-HP, d'une part, de procéder à une reconstitution de carrière plus favorable et, d'autre part, de lui verser des primes de service dont elle avait été privée pendant sa période d'absence du service ; que le tribunal administratif a rejeté cette demande par un jugement du 10 mars 2005 contre lequel Mme A se pourvoit en cassation ;

Sur les conclusions de Mme A relatives à la reconstitution de sa carrière :

Considérant en premier lieu que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a jugé que l'AP-HP avait reconstitué la carrière de Mme A dans le respect des dispositions du décret du 30 novembre 1988 portant statut particulier des personnels infirmiers de la fonction publique hospitalière, dès lors notamment que, nommée au 7ème échelon de la classe normale au 1er août 1993, l'intéressée avait été nommée au 8ème échelon au 23 novembre 1996 ;

Considérant que, si le tribunal administratif a ensuite mentionné que Mme A avait été nommée au 8ème échelon de la classe normale au 27 septembre 2000, ce n'est pas sur cette date erronée qu'il s'est fondé pour juger que la reconstitution de carrière avait été effectuée dans le respect des dispositions statutaires mais sur la date, exacte, du 23 novembre 1996 ; que l'erreur qu'il a commise est demeurée dès lors sans incidence sur le rejet qu'il a prononcé de la demande dont il était saisi ;

Considérant qu'il résultait des articles 3 et 4 du décret du 30 novembre 1988, dans leur rédaction en vigueur à compter du 1er août 1993, que la classe normale comportait huit échelons et que l'ancienneté moyenne dans le 7ème échelon était de quatre ans ; que, comme l'a relevé le tribunal administratif pour juger que Mme A n'avait pas été nommée trop tardivement au 8ème échelon, celle-ci a été promue à cet échelon moins de quatre ans après avoir été nommée au 7ème échelon ; qu'il en résulte que, si le tribunal administratif s'est aussi fondé sur la durée maximale d'ancienneté de cinq ans dans le 7ème échelon qui résultait de la combinaison des articles 4 et 37 du décret du 30 novembre 1988, cette référence à l'ancienneté maximale est en tout état de cause demeurée sans incidence sur le rejet qu'il a prononcé de la demande dont il était saisi ;

Considérant en deuxième lieu que, pour écarter un moyen tiré de ce que la date du 1er janvier 2002 à laquelle Mme A a été nommée à la classe supérieure prévue par l'article 3 du décret du 30 novembre 1988 aurait été trop tardive, le tribunal administratif a affirmé que son jugement du 16 octobre 2003 n'impliquait pas la promotion demandée par la requérante ; que celle-ci n'est dès lors pas fondée à soutenir qu'il aurait omis de répondre à ce moyen ;

Considérant que, si la requérante reprend ce moyen devant le juge de cassation, elle ne conteste pas l'interprétation faite par le tribunal administratif de la portée du jugement du 16 octobre 2003 ; que, dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que la réponse apportée à ce moyen par les juges du fond serait entachée d'erreur de droit ;

Considérant enfin que, contrairement à ce que soutient la requérante, l'arrêté de l'AP-HP du 1er avril 2003 portant reconstitution de sa carrière ne l'a pas nommée au 23 novembre 1996 au 4ème échelon de la classe supérieure mais au 8ème échelon de la classe normale ; qu'ayant été promue par le même arrêté à la classe supérieure au 1er janvier 2002, directement au 5ème échelon, le moyen tiré de ce qu'elle serait demeurée au 4ème échelon manque en fait ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il rejette ses conclusions relatives à la reconstitution de sa carrière ;

Sur les conclusions de Mme A relatives à la prime de service :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté interministériel du 24 mars 1967 relatif aux primes de service des personnels de certains établissements d'hospitalisation de soins ou de cure publics, pris sur le fondement de l'article R. 813 du code de la santé publique alors en vigueur : « ...les personnels titulaires et stagiaires ainsi que les agents des services hospitaliers recrutés à titre contractuel peuvent recevoir des primes de service liées à l'accroissement de la productivité de leur travail ... » ; qu'aux termes de l'article 2 : « ... les montants individuels de la prime de service sont fixés, pour un service annuel complet, en considération de la valeur professionnelle et de l'activité de chaque agent... . » ; qu'aux termes de l'article 3 : « La prime de service ne peut être attribuée au titre d'une année qu'aux agents ayant obtenu pour l'année considérée une note au moins égale à 12,5... le montant de la prime varie proportionnellement aux notes obtenues ... / Pour tenir compte des sujétions journalières réelles, toute journée d'absence entraîne un abattement d'un cent quarantième du montant de la prime individuelle. Toutefois, n'entraînent pas d'abattement les absences résultant : du congé annuel de détente ; d'un déplacement dans l'intérêt du service ; d'un congé consécutif à un accident du travail ou à une maladie professionnelle ; d'un congé de maternité ...» ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le bénéfice de la prime annuelle de service à laquelle peuvent prétendre les personnels hospitaliers est lié à l'exercice effectif de fonctions pendant l'année considérée ; que, si elles prévoient que l'abattement d'un cent quarantième par journée d'absence n'est pas applicable en cas d'absence pour maladie imputable au service, elles ne mentionnent en revanche aucune exception à la condition d'exercice effectif de fonctions pendant l'année considérée ; que le tribunal administratif n'a pas, dès lors, commis d'erreur de droit en jugeant que l'exécution du jugement du 16 octobre 2003, qui avait expressément exclu le droit pour Mme A au versement des indemnités liées à l'exécution du service, n'impliquait pas que l'AP-HP lui verse la prime de service prévue par l'arrêté interministériel du 24 mars 1967 au titre d'années au cours desquelles elle n'avait effectué aucun service ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il rejette ses conclusions relatives à la prime de service ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme A la somme que demande l'AP-HP au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font en revanche obstacle à ce que soit mise à la charge de l'AP-HP, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande Mme A au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de Mme A est rejeté.

Article 2 : Les conclusions de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Muriel A et à l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP).


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 288541
Date de la décision : 21/05/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - DISPOSITIONS PROPRES AUX PERSONNELS HOSPITALIERS - PERSONNEL PARAMÉDICAL - INFIRMIERS ET INFIRMIÈRES - MONTANTS INDIVIDUELS DE PRIME DE SERVICE - ABATTEMENT PAR JOURNÉE D'ABSENCE - CHAMP D'APPLICATION - EXCLUSION - CONGÉ CONSÉCUTIF À UN ACCIDENT DU TRAVAIL OU MALADIE PROFESSIONNELLE - CONDITION D'EXERCICE EFFECTIF - EXCEPTIONS - ABSENCE.

36-11-03-01 L'arrêté interministériel du 24 mars 1967 relatif aux primes de service des personnels de certains établissements d'hospitalisation de soins ou de cure publics, pris sur le fondement de l'article R. 813 du code de la santé publique alors en vigueur, dispose que les montants individuels de la prime de service sont fixés, pour un service annuel complet, en considération de la valeur professionnelle et de l'activité de chaque agent. Il prévoit également que la prime de service ne peut être attribuée au titre d'une année qu'aux agents ayant obtenu pour l'année considérée une note au moins égale à 12,5. Si l'abattement d'un cent quarantième par journée d'absence n'est pas applicable, notamment, en cas de congé consécutif à un accident du travail ou de maladie professionnelle, aucune exception n'est en revanche prévue à la condition d'exercice effectif de fonctions pendant l'année considérée. Dès lors, l'agent n'a pas droit au versement de la prime de service lorsqu'il n'a exercé aucun service au titre d'une année donnée.

SANTÉ PUBLIQUE - ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ - PERSONNEL (VOIR FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS) - INFIRMIERS - MONTANTS INDIVIDUELS DE PRIME DE SERVICE - ABATTEMENT PAR JOURNÉE D'ABSENCE - CHAMP D'APPLICATION - EXCLUSION - CONGÉ CONSÉCUTIF À UN ACCIDENT DU TRAVAIL OU MALADIE PROFESSIONNELLE - CONDITION D'EXERCICE EFFECTIF - EXCEPTIONS - ABSENCE.

61-06-03 L'arrêté interministériel du 24 mars 1967 relatif aux primes de service des personnels de certains établissements d'hospitalisation de soins ou de cure publics, pris sur le fondement de l'article R. 813 du code de la santé publique alors en vigueur, dispose que les montants individuels de la prime de service sont fixés, pour un service annuel complet, en considération de la valeur professionnelle et de l'activité de chaque agent. Il prévoit également que la prime de service ne peut être attribuée au titre d'une année qu'aux agents ayant obtenu pour l'année considérée une note au moins égale à 12,5. Si l'abattement d'un cent quarantième par journée d'absence n'est pas applicable, notamment, en cas de congé consécutif à un accident du travail ou de maladie professionnelle, aucune exception n'est en revanche prévue à la condition d'exercice effectif de fonctions pendant l'année considérée. Dès lors, l'agent n'a pas droit au versement de la prime de service lorsqu'il n'a exercé aucun service au titre d'une année donnée.


Publications
Proposition de citation : CE, 21 mai. 2008, n° 288541
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: M. Marc Lambron
Rapporteur public ?: M. Thiellay Jean-Philippe
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD ; FOUSSARD

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2008:288541.20080521
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award