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30/05/2008 | FRANCE | N°286512

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 30 mai 2008, 286512


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 octobre 2005 et 28 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la SOCIETE CANAL 9, dont le siège est 37 bis rue Greneta à Paris (75002), représentée par son président directeur général en exercice ; la SOCIETE CANAL 9 demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les décisions du 19 juillet 2005 du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) rejetant sa candidature dans le cadre de l'appel lancé le 11 mars 2003 par le Conseil supérieur de l'audiovisuel en vu

e de l'exploitation de services de radiodiffusion sonore par voie hertzie...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 octobre 2005 et 28 février 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la SOCIETE CANAL 9, dont le siège est 37 bis rue Greneta à Paris (75002), représentée par son président directeur général en exercice ; la SOCIETE CANAL 9 demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les décisions du 19 juillet 2005 du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) rejetant sa candidature dans le cadre de l'appel lancé le 11 mars 2003 par le Conseil supérieur de l'audiovisuel en vue de l'exploitation de services de radiodiffusion sonore par voie hertzienne dans le ressort du comité technique radiophonique de Lille (zones de Château-Thierry, Valenciennes, Calais, Abbeville et Amiens) ;

2°) d'enjoindre au Conseil supérieur de l'audiovisuel de lui délivrer l'autorisation d'exploiter un service de radiodiffusion sonore par voie hertzienne dans le ressort du comité technique radiophonique de Lille pour les zones de Château-Thierry, Valenciennes, Calais, Abbeville et Amiens et d'assortir cette injonction d'une astreinte d'un montant de 300 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SOCIETE CANAL 9 de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;





Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, Conseiller d'Etat,



- les conclusions de Mme Catherine de Salins, Commissaire du gouvernement ;


Considérant que la SOCIETE CANAL 9 demande l'annulation des décisions du 19 juillet 2005 par lesquelles le Conseil supérieur de l'audiovisuel a rejeté sa candidature en vue de l'exploitation des services de radiodiffusion sonore par voie hertzienne terrestre dans le ressort du comité technique radiophonique de Lille (zone de Château-Thierry, Valenciennes, Calais, Abbeville et Amiens) ;

Sur la légalité externe :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, conformément aux dispositions du 1er alinéa de l'article 29-3 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le comité technique radiophonique de Lille a assuré l'instruction des demandes d'autorisation ; que la circonstance qu'il n'en est pas fait mention dans les décisions attaquées est sans incidence sur la légalité de celles-ci ;

Considérant que, comme il y était tenu, afin d'être en mesure d'apprécier l'intérêt respectif des différents projets qui lui étaient présentés, le Conseil a statué sur l'ensemble des candidatures dont il était saisi et a décidé de leur acceptation ou de leur rejet au cours d'une même séance ; qu'en procédant ainsi, il n'a pas omis d'examiner l'intérêt particulier de chaque projet ;

Considérant que la motivation de la décision attaquée, en tant qu'elle concerne la zone de Château-Thierry, se réfère au critère légal du principe de diversification des opérateurs et expose qu'elle écarte la candidature de la SOCIETE CANAL 9 pour le programme « Chante France » au profit du programme « Champagne FM » dont la catégorie n'est pas représentée dans la zone ; qu'ainsi, cette décision qui énonce les motifs de droit et de fait retenus par le Conseil, est suffisamment motivée ;

Sur la légalité interne :

En ce qui concerne la zone de Château-Thierry :

Considérant qu'aux termes du huitième alinéa de l'article 29 de la loi du 30 septembre 1986 modifiée : « Le conseil accorde les autorisations en appréciant l'intérêt de chaque projet pour le public, au regard des impératifs prioritaires que sont la sauvegarde du pluralisme des courants d'expression socio-culturels, la diversification des opérateurs, et la nécessité d'éviter les abus de position dominante ainsi que les pratiques entravant le libre exercice de la concurrence » ;

Considérant que pour la zone de Château-Thierry, le Conseil supérieur de l'audiovisuel, se fondant sur le critère de diversification des opérateurs, a rejeté la candidature de la SOCIETE CANAL 9 pour le programme « Chante France » et accordé la seule fréquence disponible à un service de catégorie B dénommé « Champagne FM », considération étant prise de ce que toute les catégories de services radiophoniques y étaient représentées à l'exception de la catégorie B ; qu'ainsi, le Conseil supérieur n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article 29 de la loi précitée ;

En ce qui concerne la zone de Valenciennes :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le Conseil supérieur de l'audiovisuel a retenu dans cette zone la candidature de « Nostalgie » au motif que ce format n'était pas représenté dans la zone alors que celui proposé par « Chante France » était déjà représenté par les programmes « RFM Nord » et « Radio Club » ; que si la société requérante fait valoir à bon droit que le service « Chante France » présente, du fait de la diffusion exclusive et continue de chansons françaises une spécificité par rapport à ces programmes, il ne ressort pas des pièces du dossier que le Conseil supérieur de l'audiovisuel ait commis une erreur d'appréciation en considérant que le candidat qu'il a retenu contribuerait davantage à l'enrichissement de l'offre locale de programmes ;

En ce qui concerne la zone de Calais :

Considérant que le Conseil supérieur de l'audiovisuel a retenu, dans cette zone, les candidatures de « Radio Classique » et « NRJ » en estimant que ces services répondaient à des attentes non satisfaites par les services « RFM Nord » et « RTL 2 » déjà présents dans les zones, diffusant un programme musical visant un public adulte ; que si la société requérante fait valoir encore ici à bon droit que le service « Chante France » présente une spécificité par rapport à ces derniers programmes, il ne ressort pas des pièces du dossier que le Conseil supérieur de l'Audiovisuel ait commis une erreur d'appréciation au regard des critères de l'intérêt des programmes pour le public ;

En ce qui concerne la zone d'Abbeville :

Considérant que la circonstance que les services « Rires et Chansons » et « RMC Info », au profit desquels la candidature de SOCIETE CANAL 9 a été écartée dans cette zone, bénéficieraient d'un plus grand nombre de fréquences dans le ressort du comité technique radiophonique de Lille, ne saurait, en l'espèce, faire regarder comme fondé le moyen tiré de la méconnaissance du critère de diversification des opérateurs, dès lors que ce dernier n'impose au Conseil supérieur de l'audiovisuel ni d'attribuer un nombre égal de fréquences à chaque service dans le ressort d'un tel comité, ni de leur assurer une couverture géographique équivalente ; que si la décision attaquée rejette la candidature de la SOCIETE CANAL 9 proposant un programme de catégorie D au profit des services « RMC Info » et « Rires et Chansons » appartenant à des catégories déjà représentées dans la zone, cette circonstance ne saurait faire regarder le principe de pluralisme des courants d'expression socio-culturels comme ayant été méconnu, eu égard à leurs caractéristiques spécifiques inédites dans la zone et au fait que le format musical de « Chante France », bien que spécifique, était proche de celui de services déjà autorisés dans cette même zone ;

En ce qui concerne la zone d'Amiens :

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, dans cette zone, le Conseil se soit livré à une inexacte appréciation de l'intérêt respectif des programmes proposés en estimant que le programme « Nostalgie » d'une part, lequel offre en sus de la diffusion de titres musicaux des émissions interactives et des informations, et le programme « FG » d'autre part, lequel diffuse tous les types de musiques avec de nouveaux artistes en exclusivité, étaient susceptibles de satisfaire un plus large public que le programme « Chante France » ; que la circonstance que le programme « Nostalgie » et le groupe NRJ, auquel il appartient, bénéficieraient d'un plus grand nombre de fréquences dans le ressort du comité technique radiophonique de Lille ne suffit pas à établir par elle-même une méconnaissance du principe de diversification des opérateurs ;

Considérant enfin que les décisions attaquées, qui résultent d'une exacte application des critères posés par la loi du 30 septembre 1986, ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui garantit à toute personne le droit à la liberté d'expression et celui de recevoir ou de communiquer des informations sans qu'il puisse y avoir d'ingérence d'autorités publiques ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE CANAL 9 n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions du Conseil supérieur de l'audiovisuel en date du 19 juillet 2005 ;

Sur les conclusions tendant à ce que le Conseil d'Etat enjoigne sous astreinte au Conseil supérieur de l'audiovisuel de délivrer à la SOCIETE CANAL 9 les autorisations lui permettant de diffuser le programme « Chante France » dans les zones susmentionnées :

Considérant que la présente décision rejetant les conclusions aux fins d'annulation présentées par la SOCIETE CANAL 9, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par la requérante ne peuvent, en tout état de cause, être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la SOCIETE CANAL 9 au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;




D E C I D E :
--------------

Article 1er : La requête de la SOCIETE CANAL 9 est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE CANAL 9 et au Conseil supérieur de l'audiovisuel.
Copie pour information en sera adressée à la ministre de la culture et de la communication.


Synthèse
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 286512
Date de la décision : 30/05/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 mai. 2008, n° 286512
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Hubac
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2008:286512.20080530
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