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27/06/2008 | FRANCE | N°293488

France | France, Conseil d'État, 8ème sous-section jugeant seule, 27 juin 2008, 293488


Vu, enregistrée le 17 mai 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'ordonnance du 15 mai 2006 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le dossier de la requête dont cette cour a été saisi par M. et Mme Bernard C, demeurant ...;

Vu la requête sommaire, enregistrée le 5 mai 2006 au greffe de cour administrative d'appel de Bordeaux et le mémoire complémentaire, enregistré le 7 juillet 2006 au secrétariat du contentieux

; M. et Mme C demandent :

1°) d'annuler le jugem...

Vu, enregistrée le 17 mai 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'ordonnance du 15 mai 2006 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le dossier de la requête dont cette cour a été saisi par M. et Mme Bernard C, demeurant ...;

Vu la requête sommaire, enregistrée le 5 mai 2006 au greffe de cour administrative d'appel de Bordeaux et le mémoire complémentaire, enregistré le 7 juillet 2006 au secrétariat du contentieux ; M. et Mme C demandent :

1°) d'annuler le jugement du 9 février 2006 par lequel le tribunal administratif de Toulouse, statuant sur la question préjudicielle soulevée par le jugement du tribunal de grande instance de Rodez du 6 janvier 2004, a déclaré que les délibérations du conseil municipal de la commune de Laissac du 25 septembre 1990 et du 13 décembre 1990 n'ont pas créé de droits définitivement acquis et que ces délibérations sont illégales ;

2°) de déclarer que la délibération du 25 septembre 1990 a créé des droits définitivement acquis, auxquels la délibération du 13 décembre 1990 ne pouvait porter atteinte en aucune manière, de sorte qu'il n'a pas lieu de statuer sur la seconde question préjudicielle ;



Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Eliane Chemla, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de M. et Mme C, de la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de M. A et de la SCP Vincent, Ohl, avocat de la commune de Laissac,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, Commissaire du gouvernement ;


Considérant que, par jugement du 6 janvier 2004, le tribunal de grande instance de Rodez a sursis à statuer, dans l'instance pendante entre M. et Mme A, d'une part, la commune de Laissac (Aveyron) et M. et Mme C d'autre part, jusqu'à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur la question préjudicielle de savoir si les délibérations des 25 septembre et 13 décembre 1990, par lesquelles le conseil municipal de Laissac avait consenti à vendre à la soeur de M. C, Mme B, une parcelle de terrain située sur la place de l'église, avaient acquis un caractère définitif et, dans l'hypothèse d'une réponse négative à cette première question, si ces délibérations étaient illégales ; que M. et Mme C, qui ont acquis la propriété de Mme B, relèvent appel du jugement du 9 février 2006 par lequel le tribunal administratif de Toulouse, statuant sur la demande introduite par M. et Mme C, a déclaré que les délibérations en cause n'avaient pas créé de droits définitivement acquis et qu'elles étaient illégales ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par sa délibération du 25 septembre 1990, le conseil municipal de la commune de Laissac a donné son accord à la demande de Mme B tendant à ce que la commune lui cède la parcelle de terrain susmentionnée attenant à sa maison ; que, par une seconde délibération en date du 13 décembre 1990, le conseil municipal a confirmé cet accord, décidé la désaffectation de ces 20 m² du domaine public et donné pouvoir au maire pour prendre l'arrêté municipal prescrivant l'enquête publique, conclure cette enquête et, le cas échéant, signer l'acte de vente (...) ; qu'en jugeant, en réponse à la seconde question préjudicielle que à défaut de décision de déclassement de la parcelle en litige, ce bien n'est pas sorti du domaine public de sorte que les délibérations du 25 septembre et du 13 décembre 1990 décidant la vente de la parcelle et, pour la seconde, habilitant le maire à signer l'acte de vente (...) ont méconnu le principe d'inaliénabilité des biens relevant du domaine public, après avoir néanmoins relevé, en réponse à la première question préjudicielle, qu'il ressortait de la délibération du 13 décembre 1990 liant la confirmation de la décision de vendre la parcelle à la désaffectation de ce bien (...) et à l'effectivité d'une enquête publique préalable au déclassement du domaine publique, que le conseil municipal a implicitement et nécessairement soumis cette décision de vendre la parcelle à la condition que ce bien soit préalablement déclassé du domaine public (...), le tribunal administratif a entaché son jugement d'une contradiction entre les motifs des réponses apportées à chacune des deux questions ; que, par suite, M. C est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat d'évoquer et de répondre aux questions préjudicielles posées dans le jugement en date du 6 janvier 2004 du tribunal de grande instance de Rodez ;

Sur la première question préjudicielle :

Considérant qu'il ressort de l'instruction, et qu'il n'est pas contesté, que les deux délibérations en cause ne sont plus susceptibles d'être attaquées par la voie du recours pour excès de pouvoir, le délai du recours contentieux de deux mois à compter de leur publication régulière étant expiré ; que néanmoins, et ainsi qu'il a été déjà dit, ces délibérations ont subordonné implicitement mais nécessairement la vente à la condition que le bien en cause fasse l'objet d'une décision préalable de déclassement du domaine public ; que du fait de l'existence de cette condition, et jusqu'à ce que cette dernière soit effectivement réalisée, les délibérations contestées n'ont pu créer de droits définitivement acquis à M. et Mme C ;

Sur la seconde question préjudicielle :

Considérant qu'aux termes de l'article L.141-3 du code de la voirie routière, dans sa rédaction applicable à la date des faits : Le classement et le déclassement des voies communales sont prononcés par le conseil municipal (...) Les délibérations du conseil municipal prévues à l'alinéa précédent interviennent après enquête publique (...) ;

Considérant que si la vente du bien à Mme B, par actes du 29 décembre 1990 et du 20 mars 1991, est intervenue alors que le bien en cause n'avait pas fait l'objet d'une décision expresse de déclassement du domaine public en application des dispositions susmentionnées, les délibérations susmentionnées, dès lors qu'elles s'inscrivent dans la procédure de déclassement, à laquelle concourent, à la fois, la décision de désaffectation et l'engagement de l'enquête publique, et qu'elles subordonnent ainsi nécessairement l'habilitation donnée au maire, le cas échant, de signer l'acte de vente, à l'intervention préalable de cette décision, ne sont pas entachées de l'illégalité invoquée ; que le détournement de pouvoir invoqué par M. et Mme A à l'encontre des délibérations contestées n'est pas établi ; qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que ces délibérations seraient illégales ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme C, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demandent M. et Mme A au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;




D E C I D E :
--------------

Article 1er : Le jugement en date du 9 février 2006 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 2 : Il est déclaré que les délibérations des 25 septembre et 13 décembre 1990 du conseil municipal de la commune de Laissac doivent être interprétées dans le sens des observations qui précèdent.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. et Mme A au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Bernard C, à M. et Mme Jean-Claude A et à la commune de Laissac.


Synthèse
Formation : 8ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 293488
Date de la décision : 27/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Appréciation de la légalité

Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2008, n° 293488
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Le Roy
Rapporteur ?: Mme Eliane Chemla
Rapporteur public ?: M. Olléon Laurent
Avocat(s) : SCP THOUIN-PALAT, BOUCARD ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN ; SCP VINCENT, OHL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2008:293488.20080627
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