La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/06/2008 | FRANCE | N°304197

France | France, Conseil d'État, 2ème et 7ème sous-sections réunies, 27 juin 2008, 304197


Vu la requête, enregistrée le 29 mars 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Diougal A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 19 mars 2007 par laquelle le ministre des affaires étrangères, après saisine de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, a rejeté son recours dirigé contre la décision du 19 octobre 2004 par laquelle les autorités consulaires françaises à Nouakchott ont rejeté sa demande tendant à la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en France

Mme Souadou B et aux enfants Galo et Thiedel C ;

Vu les autres pièc...

Vu la requête, enregistrée le 29 mars 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Diougal A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 19 mars 2007 par laquelle le ministre des affaires étrangères, après saisine de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, a rejeté son recours dirigé contre la décision du 19 octobre 2004 par laquelle les autorités consulaires françaises à Nouakchott ont rejeté sa demande tendant à la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en France à Mme Souadou B et aux enfants Galo et Thiedel C ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 2000-1093 du 10 novembre 2000, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Yves Doutriaux, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Emmanuelle Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant que M. A, de nationalité mauritanienne, auquel la qualité de réfugié a été reconnue le 17 avril 2002, demande l'annulation de la décision du 19 mars 2007 par laquelle le ministre des affaires étrangères a rejeté son recours dirigé contre la décision du 19 octobre 2004 des autorités consulaires de France en Mauritanie refusant d'accorder des visas de long séjour permettant à Mme B et aux jeunes Galo et Thiedel C de le rejoindre en France ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'office est habilité à délivrer, après enquête s'il y a lieu, aux réfugiés et apatrides les pièces nécessaires pour leur permettre soit d'exécuter les divers actes de la vie civile, soit de faire appliquer les dispositions de la législation interne ou des accords internationaux qui intéressent leur protection, notamment les pièces tenant lieu d'actes d'état civil. L'office est habilité à délivrer dans les mêmes conditions les mêmes pièces aux bénéficiaires de la protection subsidiaire lorsque ceux-ci sont dans l'impossibilité de les obtenir des autorités de leur pays. Le directeur général de l'office authentifie les actes et documents qui lui sont soumis. Les actes et documents qu'il établit ont la valeur d'actes authentiques. Ces diverses pièces suppléent à l'absence d'actes et de documents délivrés dans le pays d'origine... » ; qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 111-6 du même code, dans sa version alors en vigueur : « Les agents diplomatiques et consulaire peuvent..., de leur propre initiative, procéder... à la vérification de tout acte d'état civil étranger en cas de doute sur l'authenticité de ce document, lorsqu'ils sont saisis d'une demande de visa... » ;

Considérant que, pour confirmer le refus de visa opposé à Mme B ainsi qu'à Galo et Thiedel C, le ministre des affaires étrangères s'est fondé sur ce que, eu égard au caractère apocryphe de l'acte de mariage produit, aux déclarations contradictoires de l'intéressé sur ses relations avec Mme B et aux discordances entre les actes de naissance produits et les déclarations de l'intéressé à l'office français de protection des réfugiés et apatrides, ni le mariage, ni la filiation avec les enfants n'étaient établis ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris a ordonné à l'office français de protection des réfugiés et apatrides de mentionner le mariage de l'intéressé avec Mme B, le 15 août 1991 à Nouakchott, sur le certificat de naissance délivré par l'office à M. A en application de l'article L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que cette mention avait, en vertu du même article, un caractère authentique qui fait obstacle à ce que les autorités consulaires la contestent sur le fondement de l'article L. 111-6 du même code qui concerne les actes d'état civil étrangers ; que, si les autorités consulaires pouvaient se prévaloir du caractère frauduleux du mariage, celui-ci n'est pas en l'espèce établi par les déclarations successives et d'ailleurs non contradictoires de l'intéressé sur ses relations avec Mme B ; qu'il ressort, en outre, des pièces du dossier que la discordance de date de naissance entre l'extrait d'acte de naissance de la jeune Galo et la copie intégrale issue du recensement national résulte d'une simple erreur matérielle dans la transcription de l'année de naissance sur l'un des documents ; qu'enfin, l'administration ne soutient pas que les actes produits en ce qui concerne la jeune Thiedel seraient entachés d'irrégularité ; que, par suite, en déniant tout caractère authentique aux documents établis par l'OFPRA produits par M. A, le ministre a commis une erreur de droit ; qu'en estimant que ces documents et les autres pièces produites par l'intéressé n'étaient pas de nature à établir avec certitude ses liens de mariage et de filiation, le ministre a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation ; qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à demander l'annulation de la décision attaquée ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du 19 mars 2007 du ministre des affaires étrangères rejetant le recours de M. A est annulée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Diougal A et au ministre des affaires étrangères et européennes.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-005-01 ÉTRANGERS. ENTRÉE EN FRANCE. VISAS. - VÉRIFICATION DE L'AUTHENTICITÉ D'ACTES ÉTRANGERS D'ÉTAT CIVIL PAR LES AGENTS DIPLOMATIQUES ET CONSULAIRES (ART. L. 111-6 DU CODE DE L'ENTRÉE ET DU SÉJOUR DES ÉTRANGERS) - CHAMP - ACTES ET DOCUMENTS ÉTABLIS PAR LE DIRECTEUR DE L'OFPRA EN APPLICATION DE L'ARTICLE L. 721-3 DU CODE DE L'ENTRÉE ET DU SÉJOUR DES ÉTRANGERS - EXCLUSION.

335-005-01 L'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'autorise pas les agents diplomatiques et consulaires à vérifier l'authenticité des actes et documents établis par le directeur de l'office français de protection des réfugiés et apatrides en application de l'article L. 721-3 du même code, mais seulement à vérifier tout acte d'état civil étranger en cas de doute sur son authenticité.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 27 jui. 2008, n° 304197
Mentionné aux tables du recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: M. Yves Doutriaux
Rapporteur public ?: Mme Prada Bordenave Emmanuelle

Origine de la décision
Formation : 2ème et 7ème sous-sections réunies
Date de la décision : 27/06/2008
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 304197
Numéro NOR : CETATEXT000019081257 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2008-06-27;304197 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award