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16/07/2008 | FRANCE | N°300839

France | France, Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 16 juillet 2008, 300839


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 janvier et 20 mars 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Jacques A, demeurant ... ; M et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 22 novembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a partiellement rejeté leur requête tendant à l'annulation du jugement du 8 février 2005 du tribunal administratif de Rouen rejetant leurs demandes en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujett

is au titre des années 1995, 1996, 1997, 1998 et 1999 ;

2°) réglant ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 22 janvier et 20 mars 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Jacques A, demeurant ... ; M et Mme A demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 22 novembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a partiellement rejeté leur requête tendant à l'annulation du jugement du 8 février 2005 du tribunal administratif de Rouen rejetant leurs demandes en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1995, 1996, 1997, 1998 et 1999 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Yves Salesse, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Ghestin, avocat de M. Jacques A,

- les conclusions de Mlle Célia Verot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme A étaient associés de la SARL JMSFB, créée en 1995, qui avait opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes en application de l'article 239 bis AA du code général des impôts ; que l'administration fiscale a remis en cause le bénéfice de ce régime au motif que la SARL avait pour seule activité la gestion de ses participations dans la SNC « Le Prieuré » qui exploitait une maison de retraite médicalisée ; qu'elle a en conséquence réintégré dans les revenus imposables de M. et Mme A le montant des déficits de la SARL qu'ils avaient imputés sur leur revenu global ; qu'elle leur a, en outre, refusé la réduction d'impôt prévue par l'article 199 terdecies 0A du code général des impôts ;

En ce qui concerne l'imputation des déficits de la société JMSFB :

Considérant qu'aux termes de l'article 206 du code général des impôts : « 1. (...) sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, (...) les sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes (...) » ; qu'aux termes de l'article 239 bis AA du même code, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : « Les sociétés à responsabilité limitée exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole, et formées uniquement entre personnes parentes en ligne directe ou entre frères et soeurs, ainsi que les conjoints, peuvent opter pour le régime fiscal des sociétés de personnes mentionné à l'article 8 (...) » ;

Considérant que, par une appréciation souveraine des faits qui lui étaient soumis, la cour administrative d'appel a relevé que la SARL JMSFB, associée de la SNC « Le Prieuré », ne participait ni à la gestion de celle-ci, qui avait été confiée à la société IGSA, ni à l'exploitation de la maison de retraite médicalisée ; qu'en jugeant que dans ces conditions la SARL, qui ne pouvait utilement se prévaloir de la qualité de commerçant que lui conférait son statut d'associé de la SNC, n'exerçait pas une activité à caractère commercial, de sorte que l'administration avait pu remettre en cause l'option qu'elle avait exercée en faveur du régime fiscal des sociétés de personne, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit ; que l'arrêt attaqué est suffisamment motivé sur ce point ;

Considérant que, par une appréciation souveraine des faits qui lui étaient soumis, la cour administrative d'appel a relevé que le différend opposant les contribuables et l'administration sur l'imputation des déficits de la SARL JMSFB ne portait que sur la question de la qualification juridique à donner à l'activité de la SARL, à l'exclusion de tout désaccord sur les questions de fait ; qu'elle a pu en déduire sans erreur de droit que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'était pas compétente pour en connaître ;

En ce qui concerne la réduction d'impôt liée à la souscription de parts de fonds commun de placement (FCPI) :

Considérant que l'article 199 terdecies 0A du code général des impôts instaure, par son I, une réduction d'impôt sur le revenu égale à 25 % des souscriptions en numéraire au capital de société non cotées ; que son VI a étendu l'avantage, à compter de l'imposition des revenus de 1997, aux personnes physiques qui souscrivent des parts de fonds communs de placement dans l'innovation mentionnés à l'article 22-1 de la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 et qui prennent l'engagement de conserver les parts de fonds pendant cinq ans au moins à compter de leur souscription ; que son V dispose qu' « un décret fixe les modalités d'application du présent article, notamment les obligations déclaratives incombant aux contribuables et aux sociétés » ; que si l'article 46 AI quater de l'annexe III au même code prévoit que le contribuable joint à sa déclaration de revenus, outre l'état individuel de souscription de parts de fonds communs de placement dans l'innovation, une copie de l'engagement de conservation de ces parts, cette disposition ne peut avoir pour effet d'interdire de régulariser la situation, dans le délai de réclamation prévu aux articles R. 196-1 et R. 196-3 du livre des procédures fiscales, au cas où la copie de l'engagement n'aurait pas été jointe à la déclaration de revenus ; que, dès lors, en jugeant que les requérants, faute d'avoir joint à leur déclaration de revenus une copie de l'engagement de conservation des parts qu'ils avaient souscrites, n'étaient pas fondés à demander le bénéfice de la réduction d'impôt prévue par l'article 199 terdecies 0A du code général des impôts, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ; que son arrêt doit être annulé sur ce point ;

Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, le tribunal administratif ne pouvait refuser aux requérants le bénéfice de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 terdecies 0A au seul motif qu'ils n'avaient pas joint à leur déclaration l'engagement de conserver les parts de fonds pendant cinq ans comme le prévoit l'article 46 AI quater susmentionné ; qu'il est constant que les contribuables ont produit ce document le 11 mai 2001, dans le délai de réclamation ; que dès lors, ils sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté leur demande en décharge de l'imposition supplémentaire établie au titre de l'année 1999, provenant du refus de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 terdecies 0A ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par M. et Mme A et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 22 novembre 2006 de la cour administrative de Douai est annulé en ce qui concerne la réduction d'impôt liée à la souscription de parts de fonds communs de placement dans l'innovation.

Article 2 : Il est accordé à M. et Mme A la décharge du supplément d'impôt sur le revenu mis à leur charge au titre de l'année 1999 correspondant à la réduction d'impôt liée à la souscription de parts de fonds communs de placement dans l'innovation.

Article 3 : Le jugement du 8 février 2005 du tribunal administratif de Rouen est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 2.

Article 4 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à M. et Mme A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Jacques A et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.


Synthèse
Formation : 10ème et 9ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 300839
Date de la décision : 16/07/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - TEXTES FISCAUX - LÉGALITÉ DES DISPOSITIONS FISCALES - DÉCRETS - RÉDUCTION D'IMPÔT SUR LE REVENU PRÉVUE EN CAS DE SOUSCRIPTION DE PARTS DE FONDS COMMUNS DE PLACEMENT DANS L'INNOVATION - CONDITION - ENGAGEMENT DE CONSERVATION DES PARTS PENDANT UN DÉLAI MINIMAL DE CINQ ANS (ART - 199 TERDECIES-0 A DU CGI) - DISPOSITIONS PRÉVOYANT QU'UNE COPIE DE CET ENGAGEMENT DOIT ÊTRE JOINTE PAR LE CONTRIBUABLE À SA DÉCLARATION (ART - 46 AI QUATER DE L'ANNEXE III AU CGI) - PORTÉE - INTERDICTION DE RÉGULARISER LA SITUATION DANS LE DÉLAI DE RÉCLAMATION PRÉVU AUX ARTICLES R - 196-1 ET R - 196-3 DU LPF - ABSENCE [RJ1].

19-01-01-01-02 L'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts prévoit une réduction d'impôt sur le revenu en cas de souscription de parts de fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI), soumise à la condition que le souscripteur s'engage à conserver ces parts pendant une période minimale de cinq ans. Aux termes de l'article 46 AI quater de l'annexe III au même code, pris pour l'application de ces dispositions, le contribuable qui entend bénéficier de cette réduction d'impôt doit joindre à sa déclaration de revenus une copie de l'engagement de conservation des parts de FCPI qu'il a souscrites. Ces dernières dispositions ne peuvent avoir pour effet d'interdire au contribuable de régulariser sa situation dans le délai de réclamation prévu aux articles R. 196-1 et R. 196-3 du livre des procédures fiscales. Ainsi, le contribuable était en l'espèce fondé à demander le bénéfice de la réduction d'impôt, dès lors que, bien qu'il n'eût pas joint à sa déclaration l'engagement de conservation des parts, il avait produit ce document dans le délai de réclamation.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - RÉCLAMATIONS AU DIRECTEUR - RÉDUCTION D'IMPÔT SUR LE REVENU PRÉVUE EN CAS DE SOUSCRIPTION DE PARTS DE FONDS COMMUNS DE PLACEMENT DANS L'INNOVATION - CONDITION - ENGAGEMENT DE CONSERVATION DES PARTS PENDANT UN DÉLAI MINIMAL DE CINQ ANS (ART - 199 TERDECIES-0 A DU CGI) - DISPOSITIONS PRÉVOYANT QU'UNE COPIE DE CET ENGAGEMENT DOIT ÊTRE JOINTE PAR LE CONTRIBUABLE À SA DÉCLARATION (ART - 46 AI QUATER DE L'ANNEXE III AU CGI) - PORTÉE - INTERDICTION DE RÉGULARISER LA SITUATION DANS LE DÉLAI DE RÉCLAMATION PRÉVU AUX ARTICLES R - 196-1 ET R - 196-3 DU LPF - ABSENCE [RJ1].

19-02-02 L'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts prévoit une réduction d'impôt sur le revenu en cas de souscription de parts de fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI), soumise à la condition que le souscripteur s'engage à conserver ces parts pendant une période minimale de cinq ans. Aux termes de l'article 46 AI quater de l'annexe III au même code, pris pour l'application de ces dispositions, le contribuable qui entend bénéficier de cette réduction d'impôt doit joindre à sa déclaration de revenus une copie de l'engagement de conservation des parts de FCPI qu'il a souscrites. Ces dernières dispositions ne peuvent avoir pour effet d'interdire au contribuable de régulariser sa situation dans le délai de réclamation prévu aux articles R. 196-1 et R. 196-3 du livre des procédures fiscales. Ainsi, le contribuable était en l'espèce fondé à demander le bénéfice de la réduction d'impôt, dès lors que, bien qu'il n'eût pas joint à sa déclaration l'engagement de conservation des parts, il avait produit ce document dans le délai de réclamation.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES - RÈGLES GÉNÉRALES - IMPÔT SUR LE REVENU - ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - RÉDUCTIONS D'IMPÔT - RÉDUCTION D'IMPÔT SUR LE REVENU PRÉVUE EN CAS DE SOUSCRIPTION DE PARTS DE FONDS COMMUNS DE PLACEMENT DANS L'INNOVATION - CONDITION - ENGAGEMENT DE CONSERVATION DES PARTS PENDANT UN DÉLAI MINIMAL DE CINQ ANS (ART - 199 TERDECIES-0 A DU CGI) - DISPOSITIONS PRÉVOYANT QU'UNE COPIE DE CET ENGAGEMENT DOIT ÊTRE JOINTE PAR LE CONTRIBUABLE À SA DÉCLARATION (ART - 46 AI QUATER DE L'ANNEXE III AU CGI) - PORTÉE - INTERDICTION DE RÉGULARISER LA SITUATION DANS LE DÉLAI DE RÉCLAMATION PRÉVU AUX ARTICLES R - 196-1 ET R - 196-3 DU LPF - ABSENCE [RJ1].

19-04-01-02-05-03 L'article 199 terdecies-0 A du code général des impôts prévoit une réduction d'impôt sur le revenu en cas de souscription de parts de fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI), soumise à la condition que le souscripteur s'engage à conserver ces parts pendant une période minimale de cinq ans. Aux termes de l'article 46 AI quater de l'annexe III au même code, pris pour l'application de ces dispositions, le contribuable qui entend bénéficier de cette réduction d'impôt doit joindre à sa déclaration de revenus une copie de l'engagement de conservation des parts de FCPI qu'il a souscrites. Ces dernières dispositions ne peuvent avoir pour effet d'interdire au contribuable de régulariser sa situation dans le délai de réclamation prévu aux articles R. 196-1 et R. 196-3 du livre des procédures fiscales. Ainsi, le contribuable était en l'espèce fondé à demander le bénéfice de la réduction d'impôt, dès lors que, bien qu'il n'eût pas joint à sa déclaration l'engagement de conservation des parts, il avait produit ce document dans le délai de réclamation.


Références :

[RJ1]

Comp. 6 novembre 2006, Dufoin, n° 279831, inédite au Recueil, RJF 1/07 n° 24.


Publications
Proposition de citation : CE, 16 jui. 2008, n° 300839
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Yves Salesse
Rapporteur public ?: Mlle Verot Célia
Avocat(s) : SCP GHESTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2008:300839.20080716
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