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19/12/2008 | FRANCE | N°284065

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 19 décembre 2008, 284065


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 août et 12 décembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Joël A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 3 de l'arrêt du 7 juin 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles, après avoir constaté un non-lieu partiel à statuer à concurrence de la somme de 153 057,14 euros dégrevée en cours d'instance, a rejeté sa requête tendant à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels la SARL Gallois

Electricité Industrielle a été assujettie pour la période du 1er janvier 199...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 août et 12 décembre 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Joël A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'article 3 de l'arrêt du 7 juin 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles, après avoir constaté un non-lieu partiel à statuer à concurrence de la somme de 153 057,14 euros dégrevée en cours d'instance, a rejeté sa requête tendant à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels la SARL Gallois Electricité Industrielle a été assujettie pour la période du 1er janvier 1991 au 31 décembre 1994 et des pénalités correspondantes, dont il a été déclaré solidairement responsable du paiement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de prononcer la décharge des impositions en litige et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Maître Ricard d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Benoit Bohnert, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Ricard, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Pierre Collin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'une vérification de comptabilité qui a porté, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 1er janvier 1991 au 31 décembre 1994, l'administration fiscale a, sur le fondement des dispositions combinées du 2 de l'article 272 du code général des impôts et du 4 de l'article 283 du même code, remis en cause la déduction par la SARL Gallois Electricité Industrielle (GEI) de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux factures émises par des sous-traitants de cette société et assorti les droits supplémentaires ainsi mis à la charge de la SARL GEI de la pénalité de 80 % prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts en cas de manoeuvres frauduleuses ; que par un arrêt du 29 septembre 1998, M. A a été condamné, en sa qualité de gérant de la SARL GEI, au paiement solidaire des droits éludés par cette société et des pénalités correspondantes ; que l'intéressé se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 7 juin 2005 de la cour administrative d'appel de Versailles, en tant que, après avoir constaté un non-lieu partiel à statuer à concurrence des sommes dégrevées en cours d'instance par l'administration fiscale et annulé le jugement du 24 octobre 2002 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, il a par son article 3 rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable à la période en litige : Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public à tout redevable de sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité. / L'avis de mise en recouvrement est individuel ou collectif. Il est signé et rendu exécutoire par l'autorité administrative désignée par décret. (...) ; qu'aux termes de l'article L. 275 du livre des procédures fiscales : La notification d'un avis de mise en recouvrement interrompt la prescription courant contre l'administration et y substitue la prescription quadriennale. ; qu'aux termes de l'article R. 256-5 du même livre, dans sa version applicable à la période en litige : La notification de l'avis de mise en recouvrement comporte l'envoi au redevable, soit au lieu de son domicile, de sa résidence ou de son siège, soit à l'adresse qu'il a lui-même fait connaître au service des impôts ou au service des douanes et droits indirects compétent, de l'ampliation si l'avis de mise en recouvrement est individuel ou de l'extrait s'il est collectif. ; qu'il résulte de la combinaison des textes précités que l'avis de mise en recouvrement, titre exécutoire authentifiant la créance de l'administration qui, d'une part, interrompt la prescription de l'action en répétition et, d'autre part, ouvre le délai de la prescription de l'action en recouvrement pour les sommes qui sont énoncées sur ce titre, ne produit ces effets qu'à compter de la date à laquelle il a été régulièrement notifié au contribuable concerné ; que par suite, en jugeant, dans le cadre d'un litige portant sur l'assiette d'une imposition, que le moyen tiré par M. A de ce que l'avis de mise en recouvrement n'aurait pas été notifié à la SARL GEI selon les modalités définies aux articles L. 256, R. 256-6 et R. 256-7 du livre des procédures fiscales était inopérant dès lors qu'une telle circonstance est sans effet sur l'existence même de la créance fiscale qui est authentifiée par l'émission de cet avis de mise en recouvrement, indépendamment des conditions de sa notification, la cour administrative d'appel de Versailles a commis une erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à demander l'annulation de l'article 3 de l'arrêt qu'il attaque ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond dans la limite de l'annulation prononcée ci-dessus et de statuer sur la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 du livre des procédures fiscales n'interrompt la prescription de l'action en répétition de l'administration à l'égard du contribuable qu'à la condition qu'il ait été régulièrement notifié à ce dernier et à compter de la date de cette notification ; qu'aux termes de l'article R. 256-7 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable à la période en litige : L'avis de mise en recouvrement individuel ou collectif est réputé avoir été notifié : / a) Dans le cas où l'ampliation ou l'extrait a été effectivement remis par les services postaux au redevable ou à son fondé de pouvoir, le jour même de cette remise ; / b) Lorsque la lettre recommandée n'a pu être distribuée du fait du redevable, le jour où en a été faite la première présentation. ; que selon de l'article R. 256-6 du même livre, lorsque la lettre recommandée ne peut, pour quelque cause que ce soit, être remise au destinataire, il est demandé à La Poste de renvoyer au service le pli non distribué annoté, d'une part, de la date de sa première présentation, d'autre part, du motif de sa non-délivrance, la notification de l'avis de mise en recouvrement pouvant également être effectuée par le ministère d'un huissier ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le pli comportant la notification de l'avis de mise en recouvrement du 8 août 1997 a été retourné à l'expéditeur revêtu du cachet non réclamé ; que le requérant soutient que ce pli ne lui a pas été effectivement présenté ; qu'en l'absence de mention sur le pli retourné de ce que le contribuable a été avisé de ce que ce pli était à sa disposition au bureau de poste, et en l'absence de tout autre élément de preuve de sa présentation, l'administration n'apporte pas la preuve de la notification de l'ampliation de l'avis de mise en recouvrement dans les conditions fixées par les dispositions précitées du livre des procédures fiscales ; que la remise de cette pièce, sans décharge signée par le représentant de la société, au cours d'un entretien qui s'est déroulé à la demande de la SARL GEI le 8 septembre 1997, à la supposer établie, ne saurait être regardée comme valant notification de l'ampliation dans le délai de reprise de trois ans prévu par l'article L. 176 du livre des procédures fiscales ; que, dans ces conditions, M. A est fondé à demander la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes restant en litige ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par M. A devant le Conseil d'Etat, la cour administrative d'appel de Versailles et le tribunal administratif de Cergy-Pontoise et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 3 de l'arrêt du 7 juin 2005 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.

Article 2 : M. A est déchargé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée restant à la charge de la SARL Gallois Electricité industrielle (GEI) au titre de la période du 1er janvier 1991 au 31 décembre 1994 et des pénalités correspondantes.

Article 3 : L'Etat versera à M. A une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Joël A et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 19 déc. 2008, n° 284065
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Benoit Bohnert
Rapporteur public ?: M. Collin Pierre
Avocat(s) : RICARD

Origine de la décision
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Date de la décision : 19/12/2008
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 284065
Numéro NOR : CETATEXT000019989574 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2008-12-19;284065 ?
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