Vu la requête, enregistrée le 11 juin 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Jean-Christophe B, demeurant ... ; M. B demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 15 mai 2008 par lequel le tribunal administratif de Besançon, faisant droit à la protestation de M. Jean-Paul A, a annulé son élection en qualité de conseiller municipal de la commune de Doulaize, commune associée d'Eternoz, lors des opérations électorales qui se sont déroulées le 9 mars 2008 dans cette commune ;
2°) de mettre à la charge de M. A la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 16 décembre 2008, présentée par M. ;
Vu le code électoral ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Xavier de Lesquen, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que s'il résulte des dispositions combinées de l'article R. 773-1 du code de justice administrative et des articles R. 119 et R. 120 du code électoral que, par dérogation aux dispositions de l'article R. 611-1 du code de justice administrative, les tribunaux administratifs ne sont pas tenus d'ordonner la communication des mémoires en défense des conseillers municipaux dont l'élection est contestée aux auteurs des protestations ainsi que des autres mémoires ultérieurement enregistrés et qu'il appartient seulement aux parties, si elles le jugent utile, de prendre connaissance desdites défenses et mémoires ultérieurs au greffe du tribunal administratif, un tribunal ne peut sans entacher son jugement d'irrégularité se fonder sur des éléments nouveaux contenus dans un mémoire enregistré après la clôture de l'instruction s'il n'a pas mis celui-ci à disposition des parties après réouverture de l'instruction ;
Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que M. A, auteur de la protestation dirigée contre l'élection de M. B en qualité de conseiller municipal de la commune de Doulaize, a adressé un mémoire en réplique enregistré le 24 avril 2008 au greffe du tribunal administratif de Besançon, après la clotûre de l'instruction fixée au 23 avril 2008 par une ordonnance du président de ce tribunal ; que le tribunal a tenu compte des éléments nouveaux contenus dans ce mémoire, relatifs à l'intérêt pour agir de M. A, sans mettre à même M. B d'en prendre connaissance ; que son jugement est par suite entaché d'irrégularité et doit pour ce motif être annulé ;
Considérant que le délai imparti au tribunal administratif par l'article R. 120 du code électoral pour statuer sur la protestation de M. A est expiré ; que, dès lors, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de statuer immédiatement sur cette protestation ;
Sur la recevabilité de la protestation :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 248 du code électoral : Tout électeur et tout éligible a le droit d'arguer de nullité les opérations électorales de la commune devant le tribunal administratif ;
Considérant que M. A était électeur dans la commune d'Eternoz ; qu'il avait dès lors qualité pour contester l'élection des conseillers municipaux de la commune, quelle que soit la section électorale dans laquelle ils avaient été élus ; qu'il est par suite recevable à contester celle de M. B, élu de la section électorale de la commune associée de Doulaize ;
Sur le grief relatif à l'inéligibilité de M. B :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 231 du code électoral : Ne peuvent être élus conseillers municipaux dans les communes situées dans le ressort où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois : (...) 8° Les directeurs de cabinet du président du conseil général et du président du conseil régional, les directeurs généraux, les directeurs, les directeurs adjoints, chefs de service et chefs de bureau de conseil général et de conseil régional (...) ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. B exerçait, à la date de l'élection, les fonctions de directeur général adjoint en charge de la délégation économie et développement des compétences au conseil régional de Franche-Comté ; que cette délégation regroupe, au vu de l'organigramme des services de la région, trois directions ; qu'il doit, dès lors, être regardé comme assumant des responsabilités au moins équivalentes à celles de directeur ; que l'exercice de ces fonctions le rendait inéligible en vertu des dispositions de l'article L. 231 du code électoral au mandat de conseiller municipal dans les communes situées dans le ressort du conseil régional de Franche-Comté ; que, par suite, M. A est fondé à demander l'annulation de l'élection de M. B ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y pas a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de M. B le versement à M. A de la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. B, tant en première instance qu'en appel, et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon en date du 15 mai 2008 est annulé.
Article 2 : L'élection de M. Jean-Christophe B en qualité de conseiller municipal de la commune de Doulaize, commune associée d'Eternoz, est annulée.
Article 3 : Les conclusions de M. B et de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Christophe B, à M. Jean-Paul A et à la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.