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21/01/2009 | FRANCE | N°278244

France | France, Conseil d'État, 10ème sous-section jugeant seule, 21 janvier 2009, 278244


Vu le pourvoi, enregistré le 4 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'OUTRE-MER ; le MINISTRE DE L'OUTRE-MER demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 11 janvier 2005 par laquelle le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement du 30 septembre 2004 en tant que celui-ci a, à la demande de M. A, d'une part, annulé la décision implicite du haut-commissaire de la République en Polynésie française refusant à M. A le versement de l'indemnité d'

exercice de missions des préfectures instituée par le décret du 26 d...

Vu le pourvoi, enregistré le 4 mars 2005 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, du MINISTRE DE L'OUTRE-MER ; le MINISTRE DE L'OUTRE-MER demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 11 janvier 2005 par laquelle le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement du 30 septembre 2004 en tant que celui-ci a, à la demande de M. A, d'une part, annulé la décision implicite du haut-commissaire de la République en Polynésie française refusant à M. A le versement de l'indemnité d'exercice de missions des préfectures instituée par le décret du 26 décembre 1997 et, d'autre part, renvoyé l'intéressé devant l'administration pour qu'il lui soit versé le rappel de cette indemnité pour la période du 18 septembre 2002 au 31 août 2004 augmenté des intérêts ;

2°) d'annuler le jugement du 30 septembre 2004 ;

3°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de la Polynésie française ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 ;

Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février ;

Vu la loi organique n° 2004-193 du 27 février 2004 ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu la loi n° 96-313 du 12 avril 1996 ;

Vu le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 ;

Vu le décret n° 97-1223 du 26 décembre 1997 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Brice Bohuon, Auditeur,

- les conclusions de Mme Julie Burguburu, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le MINISTRE DE L'OUTRE-MER demande au Conseil d'Etat d'annuler l'ordonnance du 11 janvier 2005 par laquelle le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son recours tendant à l'annulation du jugement du 30 septembre 2004 en tant que celui-ci a, à la demande de M. A, d'une part, annulé la décision implicite du haut-commissaire de la République en Polynésie française refusant à M. A le versement de l'indemnité d'exercice de missions des préfectures instituée par le décret du 26 décembre 1997 et, d'autre part, renvoyé l'intéressé devant l'administration pour que lui soit versé le rappel de cette indemnité pour la période du 18 septembre 2002 au 31 août 2004 augmenté des intérêts ;

Sur le pourvoi présenté devant le Conseil d'Etat :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 351-2 du code de justice administrative : « Lorsqu'une cour administrative d'appel ou un tribunal administratif est saisi de conclusions qu'il estime relever de la compétence du Conseil d'Etat, son président transmet sans délai le dossier au Conseil d'Etat qui poursuit l'instruction de l'affaire » ; qu'aux termes de l'article R. 351-4 du code de justice administrative : « Lorsque tout ou partie des conclusions dont est saisi un tribunal administratif, une cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat relève de la compétence d'une juridiction administrative, le tribunal administratif, la cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat, selon le cas, est compétent, nonobstant les règles de répartition des compétences entre juridictions administratives, pour rejeter les conclusions entachées d'une irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance ou pour constater qu'il n'y a pas lieu de statuer sur tout ou partie des conclusions » ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsqu'une cour administrative d'appel est saisie d'un recours dirigé contre un jugement d'un tribunal administratif statuant en dernier ressort, quelle que soit la raison pour laquelle le requérant a cru bon de la saisir et sans qu'aient d'incidence sur ce point les mentions portées sur la lettre de notification du jugement attaqué, son président doit transmettre sans délai le dossier au Conseil d'Etat, sauf irrecevabilité manifeste insusceptible d'être couverte en cours d'instance ou constatation d'un non-lieu à statuer ; que tel n'est pas le cas en l'espèce ; qu'ainsi, en rejetant comme entachée d'une irrecevabilité manifeste non susceptible d'être couverte en cours d'instance la requête du MINISTRE DE L'OUTRE-MER, le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris a méconnu son office et commis une erreur de droit ; que, dès lors, il y a lieu de faire droit aux conclusions tendant à l'annulation de son ordonnance du 11 janvier 2005 ;

Sur le pourvoi dirigé contre le jugement du tribunal administratif de la Polynésie française en date du 30 septembre 2007 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi ;

Considérant que l'article 1er du décret du 26 décembre 1997 portant création d'une indemnité d'exercice de missions des préfectures dispose que : « Une indemnité d'exercice est attribuée aux fonctionnaires de la filière administrative et de service du cadre national des préfectures (...) qui participent aux missions des préfectures dans lesquelles ils sont affectés » ;

Considérant que les services du haut-commissariat de la Polynésie française, qui exercent leurs attributions dans le cadre défini par les lois organiques portant statut de cette collectivité, ne peuvent être assimilés à ceux d'une préfecture ; que, par suite, en jugeant que le haut-commissariat de la Polynésie française devait être regardé comme une préfecture pour l'application du décret du 26 décembre 1997 portant création d'une indemnité d'exercice de missions des préfectures, le magistrat délégué du tribunal administratif de la Polynésie française a commis une erreur de droit ; qu'il en résulte que le MINISTRE DE L'OUTRE-MER est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant que celui-ci a, à la demande de M. A, d'une part, annulé la décision implicite du haut-commissaire de la République en Polynésie française refusant à M. A le versement de l'indemnité d'exercice de missions des préfectures instituée par le décret du 26 décembre 1997 et, d'autre part, renvoyé l'intéressé devant l'administration pour que lui soit versé le rappel de cette indemnité pour la période du 18 septembre 2002 au 31 août 2004 augmenté des intérêts ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond dans cette mesure ;

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées de l'article 41 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat et de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable au litige, un fonctionnaire placé en situation de mise à disposition est réputé occuper son emploi et continue à percevoir la rémunération correspondante, comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire ;

Considérant qu'il résulte des termes mêmes du décret du 26 décembre 1997 que le bénéfice de l'indemnité d'exercice de missions des préfectures est réservé aux seuls agents du cadre national des préfectures qui participent aux missions des préfectures dans lesquelles ils sont affectés, à l'exclusion de ceux des agents du cadre national des préfectures en poste dans une collectivité d'outre-mer ; que toutefois, conformément aux dispositions combinées de l'article 41 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat et de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, les agents du cadre national des préfectures mis à la disposition d'un service qui n'est pas une préfecture, dès lors qu'ils sont réputés occuper leur emploi et continuer à percevoir la rémunération correspondante, peuvent prétendre au versement de l'indemnité litigieuse, dans le cas où ils occupaient, au moment de leur mise à disposition, un emploi dans une préfecture ouvrant droit à cette indemnité ;

Considérant, d'une part, que l'article 1er de l'arrêté du 20 août 2002 du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales « portant mise à disposition » de M. A dispose que : « M. A, attaché de la préfecture du Gers, 7ème échelon, est, à compter du 18 septembre 2002, mis à disposition du ministère de l'outre-mer pour exercer les fonctions de chef du bureau du contrôle de la légalité au haut-commissariat de la République en Polynésie française » ; qu'il résulte des pièces du dossier soumis au juge du fond, et notamment des dispositions précitées de cet arrêté, que M. A a été mis à disposition du secrétariat d'Etat à l'outre-mer à compter du 18 septembre 2002 ;

Considérant, d'autre part, qu'il est constant que M. A, alors en poste à la préfecture du Gers, bénéficiait du versement de l'indemnité d'exercice de missions des préfectures pendant la période antérieure à sa mise à disposition ; que, dès lors, la décision implicite par laquelle le haut-commissaire de la République en Polynésie française a refusé de verser l'indemnité d'exercice de missions des préfectures à M. A pendant la période de sa mise à disposition doit être annulée ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que M. Castells demande qu'il soit enjoint au MINISTRE DE L'OUTRE-MER de lui verser le rappel de l'indemnité d'exercice de missions de préfectures ; que, toutefois, le contentieux opposant M. Castells au MINISTRE DE L'OUTRE-MER est un contentieux de pleine juridiction ; qu'il appartient, dès lors, au juge saisi de se prononcer lui-même sur les droits des intéressés, sauf à renvoyer à l'administration compétente, et sous son autorité, le règlement de tel aspect du litige dans des conditions précises qu'il lui appartient de fixer ;

Considérant que l'article 4 du décret du 23 juillet 1967 relatif au régime de rémunération des magistrats et des fonctionnaires de l'Etat en service dans les territoires d'outre-mer dispose que : « Les indemnités payables aux magistrats et fonctionnaires de l'Etat en service dans les territoires d'outre-mer ne sont affectées du coefficient de majoration que lorsque leur montant est fixé directement en francs métropolitains » ;

Considérant qu'en conséquence de ce qu'il vient d'être jugé, il y lieu de condamner l'Etat à verser à M. A le rappel de l'indemnité d'exercice de missions des préfectures, à laquelle sera appliquée le coefficient de majoration en vigueur en Polynésie française, qui lui est due pour les périodes de sa mise à disposition du secrétariat d'Etat à l'outre-mer, du 18 septembre 2002 au 31 août 2004 ;

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :

Considérant, d'une part, que M. Castells a droit aux intérêts afférents à l'indemnité qui lui sera versée pour la période de sa mise à disposition du secrétariat d'Etat à l'outre-mer du 18 septembre 2002 au 31 août 2004, à compter du 11 août 2004, date d'enregistrement de sa première demande de versement de l'indemnité d'exercice de mission des préfectures ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : « Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière » ; que pour l'application de ces dispositions, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande ne peut toutefois prendre effet que lorsque les intérêts sont dus au moins pour une année entière ; que , le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que M. Castells a demandé la capitalisation des intérêts le 11 août 2004 ; que cette demande doit être accueillie à compter du 12 août 2005, date à laquelle les intérêts étaient dus pour une année entière ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 350 euros demandée par M. A devant le tribunal administratif de la Polynésie française au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 11 janvier 2005 du président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris est annulée.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de la Polynésie française du 30 septembre 2004 est annulé en tant que celui-ci a, à la demande de M. A, d'une part, annulé la décision implicite du haut-commissaire de la République en Polynésie française refusant à M. A le versement de l'indemnité d'exercice de missions des préfectures instituée par le décret du 26 décembre 1997 et, d'autre part, renvoyé l'intéressé devant l'administration pour que lui soit versé le rappel de cette indemnité pour la période du 18 septembre 2002 au 31 août 2004 augmenté des intérêts.

Article 3 : La décision implicite par laquelle le haut-commissaire de la République en Polynésie française a refusé de verser l'indemnité d'exercice de missions des préfectures à M. A est annulée.

Article 4 : Il est enjoint à la MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES de procéder au versement du rappel de l'indemnité d'exercice de missions des préfectures dû à M. A, à laquelle sera appliqué le coefficient de majoration, pour la période du 18 septembre 2002 au 31 août 2004 dans le délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 11 août 2004. Les intérêts échus le 12 août 2005 seront capitalisés pour porter eux-mêmes intérêts à compter de cette date, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 5 : L'Etat versera à M. A la somme de 350 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à la MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES et à M. Bernard A.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 21 jan. 2009, n° 278244
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Tuot
Rapporteur ?: M. Brice Bohuon
Rapporteur public ?: Mme Burguburu Julie

Origine de la décision
Formation : 10ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 21/01/2009
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 278244
Numéro NOR : CETATEXT000020165943 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2009-01-21;278244 ?
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