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11/02/2009 | FRANCE | N°295712

France | France, Conseil d'État, 7ème sous-section jugeant seule, 11 février 2009, 295712


Vu le pourvoi enregistré le 25 juillet 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 18 mai 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 20 novembre 2002 qui avait rejeté la demande de Madame Aïcha A, veuve de Monsieur B C tendant à l'annulation de la décision du 26 mars 2001 rejetant sa demande de pension de réversion ;

2°) réglant l'affaire au fond ; de lui accor

der une pension de réversion ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le ...

Vu le pourvoi enregistré le 25 juillet 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE LA DEFENSE ; le MINISTRE DE LA DEFENSE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 18 mai 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 20 novembre 2002 qui avait rejeté la demande de Madame Aïcha A, veuve de Monsieur B C tendant à l'annulation de la décision du 26 mars 2001 rejetant sa demande de pension de réversion ;

2°) réglant l'affaire au fond ; de lui accorder une pension de réversion ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu la loi de finances rectificative n° 81-734 du 3 août 1981 ;

Vu la loi de finances rectificative n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Yann Aguila, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Nicolas Boulouis, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 26 de la loi du 3 août 2001 portant loi de finances rectificative pour 1981 : « Les pensions, rentes ou allocations viagères attribuées aux ressortissants de l'Algérie sur le budget de l'Etat ou d'établissements publics de l'Etat et garanties en application de l'article 15 de la déclaration de principe du 19 mars 1962 relative à la coopération économique et financière entre la France et l'Algérie ne sont pas révisables à compter du 3 juillet 1962 et continuent à être payées sur la base des tarifs en vigueur à cette même date. Elles pourront faire l'objet de revalorisations dans des conditions et suivant des taux fixés par décret. » ; qu'aux termes de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 portant loi de finances rectificative pour 2002 : ...I- Les prestations servies en application des articles ... 26 de la loi du 3 août 2001 (n° 81-734 du 3 août 1981).... sont calculées dans les conditions prévues aux paragraphes suivants ... VI- Les prestations servies en application des textes visés au I peuvent faire l'objet, à compter du 1er janvier 2002 et sur demande, d'une réversion. L'application du droit des pensions aux intéressés et la situation de famille sont appréciés à la date d'effet des dispositions visées au I pour chaque Etat concerné.... VII. - (...) le cinquième alinéa de l'article L. 58 du code des pensions civiles et militaires de retraite est complété par les mots à l'exclusion de la perte de cette qualité en raison de l'accession à l'indépendance d'un territoire antérieurement français.» ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme Aicha C a demandé le 17 février 1997 au MINISTRE DE LA DEFENSE à bénéficier de la réversion de la pension de retraite proportionnelle dont bénéficiait son mari, M. Missoun C, sous-officier de l'armée française d'origine algérienne, jusqu'à la date de son décès, le 18 février 1996 ; que, par décision du 26 mars 2001, le MINISTRE DE LA DEFENSE a opposé un refus à cette demande en se fondant sur l'article L. 58 du code des pensions qui excluait du bénéfice de la réversion les personnes ayant perdu la nationalité française en raison de l'indépendance d'un territoire antérieurement français ; que le MINISTRE se pourvoit en cassation contre l'arrêt en date du 18 mai 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a, à la demande de Mme C, annulé cette décision ;

Considérant que les dispositions précitées de l'article 26 de la loi du 3 août 1981, applicable aux nationaux algériens, faisaient obstacle jusqu'à l'entrée en vigueur des dispositions précitées de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002, à ce que l'indemnité personnelle dont M.C était allocataire jusqu'à la date de son décès puisse donner lieu à une prestation de réversion au profit de ses ayants cause ;

Considérant toutefois que si les droits à pension de réversion s'apprécient au regard de la législation applicable à la date du décès du titulaire de la pension , le juge de plein contentieux, lorsqu'il est saisi d'une demande dirigée contre une décision refusant une pension, est tenu de rechercher si les dispositions législatives et réglementaires en vigueur à la date de son jugement sont susceptibles de créer les droits au profit de l'intéressé ; qu'à la date à laquelle la cour administrative d'appel a statué sur la demande de Mme C les dispositions précitées du VII de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 qui rétablissaient le bénéfice d'une pension de réversion pour les personnes ayant perdu la nationalité française en raison de l'indépendance d'un territoire antérieurement français étaient applicables à l'intéressée ;

Considérant que le MINISTRE DE LA DEFENSE qui ne conteste pas devant le juge de cassation le droit de Mme C à obtenir une pension de réversion soutient que l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 prévoit que la situation de famille de l'intéressé doit être appréciée à la date d'effet des lois de cristallisation pour l'Etat dont elle relève, soit s'agissant de l'Algérie le 3 juillet 1962 ; qu'il oppose les dispositions de l'article 64 du code des pensions civiles et militaires de retraite, issues de la loi du 20 septembre 1948, applicables à cette date et qui subordonnaient le droit à la pension de réversion à la condition que le mariage ait été contracté au moins deux ans avant la date de cessation d'activité du mari et relève que Mme C ne remplissait pas cette condition d'antériorité ;

Considérant toutefois que s'il résulte des dispositions du paragraphe VI de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 portant loi de finances rectificative pour 2002 que les prestations servies en application de l'article 26 de la loi du 3 août 1981 peuvent faire l'objet, à compter du 1er janvier 2002, d'une réversion, et que l'application du droit des pensions aux intéressés et la situation de famille sont appréciées à la date d'effet des dispositions du même article 26, soit le 3 juillet 1962, le IV de l'article 68 de la loi du 30 décembre 2002 prévoit que le dispositif spécifique prévu à cet article « s'applique sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée et des contentieux contestant le caractère discriminatoire des textes visés au I, présentés devant les tribunaux avant le 1er novembre 2002 » ; qu'il doit également être fait exception des actions contentieuses engagées avant le 5 novembre 2003 ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que Mme C a saisi le tribunal administratif de Poitiers le 8 août 2000, soit avant cette dernière date ; que, par suite, le décès de son époux étant intervenu le 18 février 1996, les droits de Mme C à une pension de réversion devaient être examinés au regard des dispositions du code dans sa version applicable à la date de ce décès, c'est-à-dire dans sa rédaction issue de la loi du 26 décembre 1964 ; qu'il n'a pas été contesté devant les juges du fond que Mme C remplissait l'ensemble des conditions prévues par le code des pensions civiles et militaires de retraite ainsi applicable pour l'obtention d'une pension de réversion ; que Mme C, qui a présenté le 17 février 1997 une demande en vue d'obtenir le bénéfice d'une pension de réversion avait donc, en application de l'article R. 53 du code des pensions civiles et militaires de retraite, droit à la réversion de la pension de son époux à compter du lendemain de la date du décès de celui-ci, soit le 19 février 1996 ; que ce motif, qui répond à un moyen invoqué devant les juges du fond, et dont l'examen n'implique l'appréciation d'aucune circonstance de fait autre que celles qui n'ont pas été contestées devant les juges du fond, peut être substitué au motif erroné en droit retenu par l'arrêt attaqué ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE dirigé contre l'arrêt par lequel, la cour administrative d'appel de Bordeaux a annulé le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 20 novembre 2002 ainsi que sa décision en date du 26 mars 2001 et lui a enjoint de procéder à la liquidation de la pension de réversion de Mme C à compter de la date du décès de son époux, doit être rejeté ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DE LA DEFENSE est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE LA DEFENSE, au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique et à Madame Aïcha A veuve C.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 11 fév. 2009, n° 295712
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Schwartz
Rapporteur ?: M. Yann Aguila
Rapporteur public ?: M. Boulouis Nicolas

Origine de la décision
Formation : 7ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 11/02/2009
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 295712
Numéro NOR : CETATEXT000020253056 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2009-02-11;295712 ?
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