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03/03/2009 | FRANCE | N°300570

France | France, Conseil d'État, 2ème et 7ème sous-sections réunies, 03 mars 2009, 300570


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 janvier 2007 et 2 avril 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Denis A, demeurant ... et pour l'ASSOCIATION OPALE ENVIRONNEMENT, dont le siège est 62, rue Thiers à Boulogne-Sur-Mer (62200) ; M. A et l'ASSOCIATION OPALE ENVIRONNEMENT demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 7 novembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a, d'une part, annulé le jugement en date du 19 décembre 2005 par lequel le tribunal administratif de Lille a ann

ulé l'arrêté en date du 12 novembre 2002 par lequel le préfet du ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 12 janvier 2007 et 2 avril 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Denis A, demeurant ... et pour l'ASSOCIATION OPALE ENVIRONNEMENT, dont le siège est 62, rue Thiers à Boulogne-Sur-Mer (62200) ; M. A et l'ASSOCIATION OPALE ENVIRONNEMENT demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt en date du 7 novembre 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a, d'une part, annulé le jugement en date du 19 décembre 2005 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté en date du 12 novembre 2002 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a déclaré d'utilité publique les travaux de déviation de la route départementale n° 127 sur le territoire des communes de Le Wast, Alincthun, Colombert et Belle Brune, et rejeté le surplus de leurs conclusions, et d'autre part, mis à leur charge le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) réglant l'affaire au fond, de leur adjuger l'entier bénéfice de leurs écritures de première instance et d'appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jérôme Marchand-Arvier, Auditeur,

- les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de M. A et de l'ASSOCIATION OPALE ENVIRONNEMENT et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du Département du Pas-de-Calais,

- les conclusions de M. Frédéric Lenica, Rapporteur public ;

- les nouvelles observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de M. A et de l'ASSOCIATION OPALE ENVIRONNEMENT et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du Département du Pas-de-Calais,

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 12 novembre 2002, le préfet du Pas-de-Calais, à la demande du département du Pas-de-Calais, a déclaré d'utilité publique les travaux de déviation de la route départementale n°127 sur le territoire des communes de Le Wast, Alincthun, Colembert et Bellebrune ; qu'à la demande de M. A et de l'ASSOCIATION OPALE ENVIRONNEMENT, le tribunal administratif de Lille a, par un jugement du 19 décembre 2005, annulé l'arrêté du préfet du Pas-de-Calais du 12 novembre 2002 ; que saisie par le département du Pas-de-Calais, la cour administrative d'appel de Douai a, par un arrêt du 7 novembre 2006, annulé le jugement du tribunal administratif de Lille du 19 décembre 2005 et rejeté la demande d'annulation de l'arrêté ; que M. A et l'ASSOCIATION OPALE ENVIRONNEMENT se pourvoient contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 7 novembre 2006 ;

Sur la régularité de l'arrêt :

Considérant que l'article R. 741-2 du code de justice administrative dispose que la décision rendue par une juridiction administrative contient (...) les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application ; que, si les visas de l'arrêt attaqué ne font pas mention du décret du 12 octobre 1977 pris pour l'application de l'article 2 de la loi n°76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, l'arrêt vise le code de l'environnement qui, à la date à laquelle la cour a statué, avait repris, dans ses articles R. 122-1 à R. 122-16, les dispositions de ce décret ; que l'arrêt attaqué satisfait ainsi aux dispositions précitées ;

Considérant que si les requérants avaient soulevé devant le tribunal administratif de Lille le moyen tiré de ce que la déclaration d'utilité publique était illégale faute d'être accompagnée, conformément aux dispositions du 3 de l'article L. 11-1-1 du code de l'expropriation, d'un document exposant de façon suffisante les motifs et les considérations justifiant le caractère d'utilité publique de l'opération, un tel moyen est inopérant à l'encontre d'un acte déclarant d'utilité publique une opération, les dispositions en cause du code de l'expropriation ne pouvant être interprétées comme imposant une motivation en la forme de la déclaration d'utilité publique qui serait une condition de légalité de cette dernière ; que, par suite, en s'abstenant d'y répondre à l'occasion de l'examen, après effet dévolutif de l'appel, des moyens soulevés devant le tribunal administratif, la cour n'a pas entaché son arrêt d'une insuffisance de motifs ;

Considérant qu'en indiquant, pour écarter le moyen tiré de l'absence d'utilité publique du projet, que celui-ci a pour objet la diminution des nuisances subies par les riverains du bourg du Wast et l'amélioration de la circulation par le contournement du bourg, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet comporterait des risques pour la santé publique et de pollution des eaux, et que ni les atteintes à la propriété privée, ni les incidences sur l'environnement ou l'activité agricole, ni enfin le coût du projet ne sont excessifs par rapport à l'intérêt que l'opération présente, la cour administrative d'appel a suffisamment motivé son arrêt ;

Sur le bien-fondé de l'arrêt :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 300-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : Les actions ou opérations d'aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat, d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs, de lutter contre l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. L'aménagement, au sens du présent code, désigne l'ensemble des actes des collectivités locales ou des établissements publics de coopération intercommunale qui visent, dans le cadre de leurs compétences, d'une part, à conduire ou à autoriser des actions ou des opérations définies dans l'alinéa précédent et, d'autre part, à assurer l'harmonisation de ces actions ou de ces opérations ; qu'aux termes de l'article L. 300-2 du même code : I - Le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale délibère sur les objectifs poursuivis et sur les modalités d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées dont les représentants de la profession agricole, avant : (...) c) Toute opération d'aménagement réalisée par la commune ou pour son compte lorsque, par son importance ou sa nature, cette opération modifie de façon substantielle le cadre de vie ou l'activité économique de la commune et qu'elle n'est pas située dans un secteur qui a déjà fait l'objet de cette délibération au titre du a) ou du b) ci-dessus. Un décret en Conseil d'Etat détermine les caractéristiques des opérations d'aménagement soumises aux obligations du présent alinéa. (...) II - Les autres personnes publiques ayant l'initiative d'opérations d'aménagement sont tenues aux mêmes obligations. Elles organisent la concertation dans des conditions fixées après avis de la commune ; qu'aux termes de l'article R. 300-1 du même code : Les opérations d'aménagement réalisées par les communes et les autres personnes publiques ou pour leur compte, qui sont soumises aux obligations prévues au c de l'article L. 300-2 sont les opérations suivantes : (...) 2. La réalisation d'un investissement routier dans une partie urbanisée d'une commune d'un montant supérieur à 1 900 000 euros, et conduisant à la création de nouveaux ouvrages ou à la modification d'assiette d'ouvrages existants (...) ; qu'il ressort de ces dispositions que doivent faire l'objet de la concertation prévue à l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme toute action ou opération d'aménagement qui remplit les conditions prévues par les dispositions de l'article R. 300-1 du code, quelle que soit la personne publique qui a pris l'initiative de l'engager ; que, s'agissant des investissements routiers, ceux-ci doivent faire l'objet de la concertation prévue par ces dispositions, dès lors qu'ils conduisent à la création de nouveaux ouvrages ou à la modification d'assiette d'ouvrages existants, qu'ils sont, pour tout ou partie, situés dans une partie urbanisée d'une commune et que la partie du projet située dans la partie urbanisée est d'un montant supérieur à 1 900 000 euros ;

Considérant qu'en estimant que seul le carrefour giratoire prévu à l'intersection formée par le projet de déviation avec la route existante au sud de la commune du Wast pouvait être regardé, compte tenu de son emplacement, comme réalisé dans une partie urbanisée de la commune, et en en déduisant, alors que le coût du carrefour giratoire est inférieur à 1 900 000 euros, que le projet de déviation ne comprenait pas d'ouvrage mentionné à l'article R. 300-1 du code de l'urbanisme et n'avait, par suite, pas à faire l'objet de la concertation prévue par les dispositions précitées de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, la cour administrative d'appel de Douai n'a commis ni erreur de droit ni dénaturation des pièces du dossier ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A et l'ASSOCIATION OPALE ENVIRONNEMENT ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du département du Pas-de-Calais, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. A et l'ASSOCIATION OPALE ENVIRONNEMENT demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A et de l'ASSOCIATION OPALE ENVIRONNEMENT le versement au département du Pas-de-Calais de la somme de 2 000 euros chacun ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de M. A et de l'ASSOCIATION OPALE ENVIRONNEMENT est rejeté.

Article 2 : M. A et de l'ASSOCIATION OPALE ENVIRONNEMENT verseront chacun une somme de 2 000 euros au département du Pas-de-Calais.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Denis A et autres, au département du Pas-de-Calais et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 2ème et 7ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 300570
Date de la décision : 03/03/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-05 URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE. AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE. - CONCERTATION PRÉVUE PAR L'ARTICLE L. 300-2 DU CODE DE L'URBANISME - CHAMP - 1) OPÉRATIONS D'AMÉNAGEMENT MENÉES PAR DES PERSONNES PUBLIQUES (ART. L. 300-1 ET R. 300-1 DU CODE DE L'URBANISME), QUELLE QUE SOIT LA PERSONNE PUBLIQUE AYANT ENGAGÉ L'OPÉRATION - 2) INVESTISSEMENTS ROUTIERS AU SENS DU 2° DE L'ARTICLE R. 300-1 DU CODE DE L'URBANISME - A) NOTION - B) APPRÉCIATION DU SEUIL DE 1 900 000 EUROS POUR LA PARTIE COMPRISE DANS LA ZONE URBANISÉE.

68-05 1) Il ressort des dispositions des articles L. 300-1, L. 300-2 et R. 300-1 du code de l'urbanisme que doivent faire l'objet de la concertation prévue à l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme toute action ou opération d'aménagement qui remplit les conditions prévues par les dispositions de l'article R. 300-1 du code, quelle que soit la personne publique qui a pris l'initiative de l'engager. 2) a) S'agissant des investissements routiers, ceux-ci doivent faire l'objet de la concertation prévue par ces dispositions, dès lors qu'ils conduisent à la création de nouveaux ouvrages ou à la modification d'assiette d'ouvrages existants, qu'ils sont, pour tout ou partie, situés dans une partie urbanisée d'une commune et que la partie du projet située dans la partie urbanisée est d'un montant supérieur à 1 900 000 euros. b) Le seuil de 1 900 000 euros s'apprécie sur la seule partie de l'investissement comprise en zone urbanisée. En l'espèce, carrefour giratoire situé dans la partie urbanisée de la commune, mais dont le coût est inférieur à 1 900 000 euros : projet ne comprenant pas d'ouvrage au sens de l'article R. 300-1 du code de l'urbanisme et n'ayant pas, par suite, à faire l'objet de la concertation prévue à l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme.


Publications
Proposition de citation : CE, 03 mar. 2009, n° 300570
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Stirn
Rapporteur ?: M. Jérôme Marchand-Arvier
Rapporteur public ?: M. Lenica Frédéric
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:300570.20090303
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