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04/03/2009 | FRANCE | N°296030

France | France, Conseil d'État, 7ème sous-section jugeant seule, 04 mars 2009, 296030


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 juillet 2006 et 30 novembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE CAMPENON BERNARD MEDITERRANEE, dont le siège est 10 place de la Joliette à Marseille (13567) ; la SOCIETE CAMPENON BERNARD MEDITERRANEE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 29 mai 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation d'un jugement du tribunal administratif de Marseille du 3 mai 2003 rejetant sa demande tendant d'une

part, à ce que l'Etat et le département des Bouches-du-Rhône soien...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 juillet 2006 et 30 novembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE CAMPENON BERNARD MEDITERRANEE, dont le siège est 10 place de la Joliette à Marseille (13567) ; la SOCIETE CAMPENON BERNARD MEDITERRANEE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 29 mai 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation d'un jugement du tribunal administratif de Marseille du 3 mai 2003 rejetant sa demande tendant d'une part, à ce que l'Etat et le département des Bouches-du-Rhône soient condamnés à lui verser les sommes de 8 297 377,20 F (soit 1 264 317,20 euros) et 128 416 francs (soit 19 576,85 euros), augmentées des intérêts au taux légal à compter du 3 juillet 1997 et du produit de leur capitalisation, en réparation de 25 % du préjudice subi du fait de désordres affectant le parc de stationnement situé place de la préfecture à Marseille, d'autre part, à la prise en charge par l'Etat et le département de 25 % des frais des deux expertises ordonnées dans cette affaire ;

2°) réglant l'affaire au fond, de condamner l'Etat et le département des Bouches-du-Rhône à lui verser la somme de 1 264 317,20 € augmentée des intérêts au taux légal, correspondant au quart des dépenses exposées par elle pour remédier au préjudice qu'elle a subi, ainsi que la somme de 19 576,85 € en réparation de 25 % des frais exposées par elle et non compris dans les dépens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Agnès Fontana, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la SOCIÉTÉ CAMPENON BERNARD MEDITERRANEE et de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat du département des Bouches du Rhône,

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la commune de Marseille a confié à la société méditerranéenne de stationnement un contrat de concession portant sur la réalisation et l'exploitation d'un parc de stationnement situé à proximité de la préfecture ; que le concessionnaire a sous-traité la réalisation de l'ouvrage à la société Sogéa Sud-Est ; que cette société a employé, à titre de variante, une technique dite « paroi berlinoise » consistant en la mise en place de profilés métalliques verticaux, suivie de la réalisation de terrassements horizontaux, puis de la mise en place de panneaux de béton ; que les travaux ont débuté au mois de juillet 1992 ; qu'au mois de septembre 1992, un premier sinistre est survenu, en l'espèce un glissement de terrain dans la fouille, entraînant l'effondrement d'une partie de la chaussée et l'apparition de fissures sur la chaussée parallèle au parc de stationnement et le long du trottoir proche de la préfecture ; qu'au mois de janvier 1993 est apparu un second sinistre se manifestant par des fissures dans le mur des bâtiments de la préfecture ; qu'il ressort également des pièces du dossier soumis au juge du fond, et notamment des rapports d'expertise, non contestés que l'entreprise Sogéa Sud-Est a dû exposer des dépenses d'un montant de 4 731 434 euros, pour faire face à ces sinistres ; qu'à l'occasion des expertises réalisées pour rechercher les causes de ces sinistres, ont été mis en évidence, d'une part le mauvais état du bassin ornemental de la préfecture, qui était à l'origine d'importantes fuites d'eau, d'autre part, la présence de vastes cavités creusées ou aggravées par ces fuites d'eau ;

Considérant que la société Sogéa Sud-Est a dès lors recherché devant la juridiction administrative la réparation par l'Etat et le département des Bouches-du-Rhône d'une partie du préjudice subi par elle ; que par jugement rendu le 13 mai 2003, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que la cour administrative d'appel de Marseille, par son arrêt du 29 mai 2006 contre lequel la SOCIETE CAMPENON BERNARD MEDITERRANEE, venant aux droits de la société Sogéa Sud-Est, se pourvoit en cassation, a rejeté la requête de cette société ;

Considérant en premier lieu que le moyen tiré de ce que la cour administrative d'appel de Marseille n'aurait pas visé et analysé avec une précision suffisante les conclusions et moyens de la requérante n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Considérant en deuxième lieu qu'en jugeant qu'il résulte du rapport du 29 novembre 1995 qu'en définissant des coefficients de causalité les experts se sont bornés à identifier les causes matérielles des sinistres et leurs poids respectifs, sans préjudice du partage de responsabilité entre les intervenants, la cour administrative d'appel de Marseille a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation ; qu'elle a ainsi pu, sans erreur de droit, en déduire que le coefficient de 25 % affecté par les experts à la fuite d'eau ne pouvait être regardé comme un coefficient d'imputabilité des désordres au département et à l'Etat ;

Considérant en troisième lieu que, contrairement à ce que soutient la société CAMPENON BERNARD MEDITERRANEE, la cour administrative d'appel, en relevant l'existence d'une importante cavité préexistante qui ne pouvait, compte tenu de sa taille et de sa proximité du chantier, être ignorée d'études des sols sérieuses, a suffisamment répondu au moyen tiré par la société de ce que les fuites d'eau et les cavités qui les ont recueillies n'auraient pu être mises en évidence par des études approfondies ; que par suite, le moyen tiré de ce que la cour administrative d'appel aurait insuffisamment motivé son arrêt sur ce point doit être écarté ;

Considérant en quatrième lieu qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêt attaqué que, pour écarter la responsabilité de l'Etat au titre des dommages causés à un tiers par un ouvrage public, la cour administrative d'appel a relevé que les fuites d'eau préexistaient aux opérations de conception et de construction du parc de stationnement et qu'elles auraient pu être mises en évidence par des études de sols sérieuses ; qu'elle n'a pas ainsi refusé par principe l'indemnisation de la société sur le fondement de la théorie des dommages de travaux publics mais a regardé la demande présentée à cet égard par la société CAMPENON BERNARD comme non fondée ; que, par suite, la société CAMPENON BERNARD MEDITERRANEE ne peut utilement soutenir que la cour administrative d'appel aurait commis une erreur de droit et de qualification juridique des faits en écartant la mise en jeu de la responsabilité pour travaux public au motif que la société, étant engagée dans une relation contractuelle, ne pouvait demander réparation que sur le seul terrain de la responsabilité contractuelle ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter le pourvoi de la société CAMPENON BERNARD MEDITERRANEE ;

Sur les conclusions aux fins d'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions susmentionnées font obstacle à ce que la somme demandée par la SOCIETE CAMPENON BERNARD MEDITERRANEE au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat et du département des Bouches-du-Rhône qui ne sont pas, dans la présente affaire, les parties perdantes ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la SOCIETE CAMPENON BERNARD MEDITERRANEE le versement de la somme de 4 000 euros demandée à ce titre par le département des Bouches-du-Rhône ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la SOCIETE CAMPENON BERNARD MEDITERRANEE est rejeté.

Article 2 : La SOCIETE CAMPENON BERNARD MEDITERRANEE versera au département des Bouches-du-Rhône la somme de 4 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société SOCIETE CAMPENON BERNARD MEDITERRANEE, au département des Bouches-du-Rhône et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.


Synthèse
Formation : 7ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 296030
Date de la décision : 04/03/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 04 mar. 2009, n° 296030
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Schwartz
Rapporteur ?: Mme Agnès Fontana
Rapporteur public ?: M. Dacosta Bertrand
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET ; SCP BARADUC, DUHAMEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:296030.20090304
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