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11/03/2009 | FRANCE | N°303396

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 11 mars 2009, 303396


Vu la requête, enregistrée le 6 mars 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la FEDERATION DES SYNDICATS SOLIDAIRES UNITAIRES ET DEMOCRATIQUES - PTT ; la FEDERATION DES SYNDICATS SOLIDAIRES UNITAIRES ET DEMOCRATIQUES - PTT demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2007-12 du 4 janvier 2007 instituant une dérogation au contrôle quotidien et hebdomadaire de la durée du travail et modifiant l'article D. 212-21 du code du travail ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros a

u titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les...

Vu la requête, enregistrée le 6 mars 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la FEDERATION DES SYNDICATS SOLIDAIRES UNITAIRES ET DEMOCRATIQUES - PTT ; la FEDERATION DES SYNDICATS SOLIDAIRES UNITAIRES ET DEMOCRATIQUES - PTT demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2007-12 du 4 janvier 2007 instituant une dérogation au contrôle quotidien et hebdomadaire de la durée du travail et modifiant l'article D. 212-21 du code du travail ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 16 février 2009, présentée pour le syndicat de la distribution directe ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexandre Lallet, Auditeur,

- les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat du syndicat de la distribution directe,

- les conclusions de M. Luc Derepas, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Gatineau, Fattaccini ;

Sur l'intervention du syndicat de la distribution directe :

Considérant que ce syndicat a intérêt au maintien du décret attaqué ; que, par suite, son intervention est recevable ;

Sur la légalité du décret attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 212-1 du code du travail en vigueur à la date du décret attaqué, ultérieurement codifié aux articles L. 3122-46 et L. 3121-34 du même code : Dans les établissements ou professions mentionnés à l'article L. 200-1 (...), la durée légale du travail effectif des salariés est fixée à trente-cinq heures par semaine./ Dans ces mêmes établissements et professions, la durée quotidienne du travail effectif par salarié ne peut excéder dix heures (...) ; qu'il résulte de l'article L. 212-2 du même code alors applicable que les modalités d'application de l'article L. 212-1, notamment le contrôle des horaires de travail, sont fixées, pour l'ensemble des branches d'activité ou des professions ou pour une branche ou une profession particulière, par décret en conseil des ministres, après consultation des organisations d'employeurs et de salariés intéressées ;

Considérant que pour l'application de ces dispositions est intervenu le décret n° 2007-12 du 4 janvier 2007 instituant une dérogation au contrôle quotidien et hebdomadaire de la durée du travail, qui modifie l'article D. 212-21 du code du travail fixant les modalités de décompte des heures de travail des salariés qui ne sont pas occupés selon le même horaire collectif de travail affiché ; que la FEDERATION DES SYNDICATS SOLIDAIRES UNITAIRES ET DEMOCRATIQUES - PTT demande l'annulation de ce décret en tant qu'il prévoit au b) de l'article D. 212-21 du code du travail que le décompte quotidien, par enregistrement, selon tous moyens, des heures de début et de fin de chaque période de travail ou par le relevé du nombre d'heures de travail effectuées et le décompte hebdomadaire, par récapitulation selon tous moyens du nombre d'heures de travail effectuées par chaque salarié n'est pas applicable aux salariés concernés par les conventions ou accords collectifs de branche étendus prévoyant une quantification préalablement déterminée du temps de travail reposant sur des critères objectifs et fixant les modalités de contrôle de la durée du travail ;

Considérant qu'il résulte du premier alinéa de l'article L. 212-2 du code du travail que les modalités d'application de l'article L. 212-1 de ce code, notamment en ce qui concerne le contrôle des heures de travail effectués par les salariés régis par cet article, sont fixées par un décret en conseil des ministres ; que si, en vertu du troisième alinéa du même article, il peut être dérogé par convention ou accord collectif étendu ou par convention ou accord d'entreprise ou d'établissement aux règles fixées par ces décrets, ces dérogations ne peuvent pas concerner les mesures de contrôle du temps de travail ;

Considérant que le décret attaqué, pris en conseil des ministres, ouvre la possibilité pour une convention ou un accord collectif de branche étendu de prévoir que le temps de travail effectif des salariés exerçant leur activité dans cette branche pourra faire l'objet, par dérogation aux trois premiers alinéas de l'article D. 212-21 du code du travail alors en vigueur qui instituent un mode de décompte quotidien et hebdomadaire par enregistrement des heures de travail effectuées, d'un décompte préalable à la prestation de travail reposant sur des critères fixés par cette convention ou cet accord étendu ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'en renvoyant à une convention ou accord collectif étendu le choix, d'une part, de recourir à un mode de décompte de la durée du travail effectué par les salariés entrant dans son champ d'application, sous la seule réserve de fonder ce mode de décompte sur des critères objectifs et, d'autre part, de déterminer les modalités de contrôle des heures de travail, sans préciser les conditions dans lesquelles cette détermination doit intervenir, l'autorité réglementaire a méconnu les dispositions de l'article L. 212-2 du code du travail ; qu'ainsi, le décret attaqué doit, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, être annulé en tant qu'il introduit un b) à l'article D. 212-21 du code du travail ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit versée à ce titre au syndicat de la distribution directe, qui n'a pas la qualité de partie à la présente instance ; qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 100 euros au profit de la FEDERATION DES SYNDICATS SOLIDAIRES UNITAIRES ET DEMOCRATIQUES - PTT ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'intervention du syndicat de la distribution directe est admise.

Article 2 : Le décret n° 2007-12 du 4 janvier 2007 est annulé en tant qu'il introduit un b) à l'article D. 212-21 du code du travail.

Article 3 : L'Etat versera à la FEDERATION DES SYNDICATS SOLIDAIRES UNITAIRES ET DEMOCRATIQUES - PTT une somme de 100 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par le syndicat de la distribution directe sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la FEDERATION DES SYNDICATS SOLIDAIRES UNITAIRES ET DEMOCRATIQUES - PTT, au Premier ministre et au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.

Copie en sera adressée pour information au syndicat de la distribution directe.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITÉ DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA RÈGLE DE DROIT - LOI - VIOLATION - EXISTENCE - CONTRÔLE DU TEMPS DE TRAVAIL (ART - L - 212-2 DE L'ANCIEN CODE DU TRAVAIL) - DISPOSITIONS D'UN DÉCRET RENVOYANT À UNE CONVENTION OU À UN ACCORD COLLECTIF LE CHOIX DE RECOURIR À UN MODE DE DÉCOMPTE DE LA DURÉE DU TRAVAIL EFFECTUÉ PAR LES SALARIÉS ENTRANT DANS SON CHAMP D'APPLICATION ET DE DÉTERMINER LES MODALITÉS DE CONTRÔLE DES HEURES DE TRAVAIL - SANS PRÉCISER LES CONDITIONS DANS LESQUELLES CETTE DÉTERMINATION DOIT INTERVENIR.

01-04-02-02 Le décret n° 2007-12 du 4 janvier 2007 instituant une dérogation au contrôle quotidien et hebdomadaire de la durée du travail et modifiant l'article D. 212-21 du code du travail (alors en vigueur) ouvre la possibilité, pour une convention ou un accord collectif de branche étendu, de prévoir que le temps de travail effectif des salariés exerçant leur activité dans cette branche pourra faire l'objet, par dérogation aux trois premiers alinéas de l'article D. 212-21 du code du travail qui instituent un mode de décompte quotidien et hebdomadaire par enregistrement des heures de travail effectuées, d'un décompte préalable à la prestation de travail reposant sur des critères fixés par cette convention ou cet accord étendu. En renvoyant à une convention ou accord collectif étendu le choix, d'une part, de recourir à un mode de décompte de la durée du travail effectué par les salariés entrant dans son champ d'application, sous la seule réserve de fonder ce mode de décompte sur des critères objectifs et, d'autre part, de déterminer les modalités de contrôle des heures de travail, sans préciser les conditions dans lesquelles cette détermination doit intervenir, l'autorité réglementaire a méconnu les dispositions de l'article L. 212-2 du code du travail.

TRAVAIL ET EMPLOI - CONDITIONS DE TRAVAIL - CONTRÔLE DU TEMPS DE TRAVAIL (ART - L - 212-2 DE L'ANCIEN CODE DU TRAVAIL) - DISPOSITIONS D'UN DÉCRET RENVOYANT À UNE CONVENTION OU À UN ACCORD COLLECTIF LE CHOIX DE RECOURIR À UN MODE DE DÉCOMPTE DE LA DURÉE DU TRAVAIL EFFECTUÉ PAR LES SALARIÉS ENTRANT DANS SON CHAMP D'APPLICATION ET DE DÉTERMINER LES MODALITÉS DE CONTRÔLE DES HEURES DE TRAVAIL - SANS PRÉCISER LES CONDITIONS DANS LESQUELLES CETTE DÉTERMINATION DOIT INTERVENIR - ILLÉGALITÉ.

66-03 Le décret n° 2007-12 du 4 janvier 2007 instituant une dérogation au contrôle quotidien et hebdomadaire de la durée du travail et modifiant l'article D. 212-21 du code du travail (alors en vigueur) ouvre la possibilité, pour une convention ou un accord collectif de branche étendu, de prévoir que le temps de travail effectif des salariés exerçant leur activité dans cette branche pourra faire l'objet, par dérogation aux trois premiers alinéas de l'article D. 212-21 du code du travail qui instituent un mode de décompte quotidien et hebdomadaire par enregistrement des heures de travail effectuées, d'un décompte préalable à la prestation de travail reposant sur des critères fixés par cette convention ou cet accord étendu. En renvoyant à une convention ou accord collectif étendu le choix, d'une part, de recourir à un mode de décompte de la durée du travail effectué par les salariés entrant dans son champ d'application, sous la seule réserve de fonder ce mode de décompte sur des critères objectifs et, d'autre part, de déterminer les modalités de contrôle des heures de travail, sans préciser les conditions dans lesquelles cette détermination doit intervenir, l'autorité réglementaire a méconnu les dispositions de l'article L. 212-2 du code du travail.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 11 mar. 2009, n° 303396
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: M. Alexandre Lallet
Rapporteur public ?: M. Derepas Luc
Avocat(s) : SCP GATINEAU, FATTACCINI

Origine de la décision
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Date de la décision : 11/03/2009
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 303396
Numéro NOR : CETATEXT000020381734 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2009-03-11;303396 ?
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