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01/04/2009 | FRANCE | N°318605

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 01 avril 2009, 318605


Vu la requête, enregistrée le 21 juillet 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Latifa A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 26 mai 2008 par laquelle le consul général de France à Casablanca a refusé de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en France ;

2°) d'enjoindre au consul général de France à Casablanca de lui délivrer le visa sollicité dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard

;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros en a...

Vu la requête, enregistrée le 21 juillet 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Latifa A, demeurant ... ; Mme A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 26 mai 2008 par laquelle le consul général de France à Casablanca a refusé de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en France ;

2°) d'enjoindre au consul général de France à Casablanca de lui délivrer le visa sollicité dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Dominique Guihal, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, rapporteur public,

Considérant que Mme A demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 26 mai 2008 par laquelle le consul général de France à Casablanca a refusé de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en France en qualité de conjoint de ressortissant français ; que la requête de Mme A doit être regardée comme dirigée contre la décision implicite par laquelle la commission des recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a confirmé le refus de délivrance d'un visa de long séjour ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision attaquée :

Considérant que l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que le visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ne peut être refusé à un conjoint de Français qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A est entrée en France en juillet 2007 sous le couvert d'un visa « de circulation » lui permettant d'effectuer plusieurs séjours successifs d'une durée totale de quatre-vingt dix jours sur une période de six mois ; qu'elle a fait la connaissance de M. B en octobre de la même année et que leur mariage a été célébré en France le 28 décembre 2007 ; que Mme A est retournée en avril 2008 au Maroc, où elle a présenté la demande de visa de long séjour en France en qualité de conjoint de français qui lui a été refusé ;

Considérant que le ministre fait valoir que Mme A s'est établie avec M. B en novembre 2007, au moment où la durée de séjour de quatre-vingt dix jours mentionnée ci-dessus étant accomplie, sa situation n'était plus régulière, et que le mariage a eu lieu la veille de l'expiration de la période de six mois sus rappelée ; que ces éléments ne sont pas suffisamment précis et concordants pour établir de façon certaine que le mariage a été contracté dans le seul but de permettre à Mme A d'obtenir un visa, alors que la requérante produit au dossiers des attestations de l'existence d'une vie commune entre les époux quelques semaines avant le mariage, de relations téléphoniques très fréquentes entre eux depuis leur séparation, et qu'il n'est pas contesté que M. B se soit rendu régulièrement au Maroc ; qu'ainsi la commission de recours contre les décisions de refus de visas a méconnu les dispositions de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et porté une atteinte disproportionnée au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à demander l'annulation de la décision attaquée ;

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'eu égard aux motifs de la présente décision et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation de Mme A se serait modifiée, en droit ou en fait, depuis l'intervention de la décision attaquée, l'exécution de cette décision implique nécessairement la délivrance d'un visa de long séjour à l'intéressée ; que, par suite, il y a lieu, pour le Conseil d'Etat, d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de faire délivrer à Mme A un visa de long séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions précitées et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1500 euros demandée par Mme A au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : La décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de faire délivrer à Mme A un visa de long séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A la somme de 1500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme Latifa A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 318605
Date de la décision : 01/04/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 01 avr. 2009, n° 318605
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Schrameck
Rapporteur ?: Mme Dominique Guihal
Rapporteur public ?: M. Guyomar Mattias

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:318605.20090401
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