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08/04/2009 | FRANCE | N°299946

France | France, Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 08 avril 2009, 299946


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 décembre 2006 et 19 mars 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Daniel A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 20 octobre 2006 par laquelle le président de la troisième chambre du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du recteur de l'académie de Poitiers rejetant implicitement sa demande de mise à la retraite anticipée avec jouissance immédiate de sa pension à compter du

1er septembre 2006 et à ce qu'il soit enjoint à l'administration de l'...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 décembre 2006 et 19 mars 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Daniel A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 20 octobre 2006 par laquelle le président de la troisième chambre du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du recteur de l'académie de Poitiers rejetant implicitement sa demande de mise à la retraite anticipée avec jouissance immédiate de sa pension à compter du 1er septembre 2006 et à ce qu'il soit enjoint à l'administration de l'admettre à la retraite avec jouissance immédiate de sa pension à compter du 2 septembre 2006 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande présentée devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le Traité instituant la Communauté européenne ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 ;

Vu le décret n° 2005-449 du 10 mai 2005 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Raquin, Auditeur,

- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de M. A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A, agent titulaire de la fonction publique d'Etat, est père de trois enfants et a demandé, le 24 mars 2005, son admission à la retraite avec jouissance immédiate de sa pension de retraite à compter du 1er septembre 2006 ; qu'il a contesté devant le tribunal administratif de Poitiers la décision implicite du ministre de l'éducation nationale rejetant cette demande ; qu'il se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 20 octobre 2006 par laquelle le président de la troisième chambre du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article R. 742-2 du code de justice administrative, dans sa rédaction issue du décret du 28 juillet 2005, applicable à la date de l'ordonnance attaquée : Dans le cas prévu au 6° des articles R. 122-12 et R. 222-1, l'ordonnance vise la décision ou l'avis par lequel ont été tranchées ou examinées les questions identiques à celles que la requête présente à juger ;

Considérant que l'ordonnance du 20 octobre 2006 du président de la troisième chambre du tribunal administratif de Poitiers, rendue sur le fondement du 6° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, ne comporte pas le visa de la décision ou de l'avis par lequel auraient été tranchées ou examinées les questions identiques à celles que la requête de M. A présentait à juger ; que l'absence de cette mention, dans les visas comme dans les motifs de l'arrêt, est de nature à entacher d'irrégularité l'ordonnance attaquée ; que celle-ci doit, par suite, être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative et de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans sa rédaction issue du I de l'article 136 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2004 : La liquidation de la pension intervient : (...) / 3º Lorsque le fonctionnaire civil est parent de trois enfants vivants, ou décédés par faits de guerre, ou d'un enfant vivant, âgé de plus d'un an et atteint d'une invalidité égale ou supérieure à 80 %, à condition qu'il ait, pour chaque enfant, interrompu son activité dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ; qu'aux termes du II de l'article 136 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2004 : Les dispositions du I sont applicables aux demandes présentées avant leur entrée en vigueur qui n'ont pas donné lieu à une décision de justice passée en force de chose jugée ; qu'aux termes de l'article R. 37 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans sa rédaction issue du décret du 10 mai 2005 : I. - L'interruption d'activité prévue au premier alinéa du 3° du I de l'article L. 24 doit avoir eu une durée continue au moins égale à deux mois et être intervenue alors que le fonctionnaire était affilié à un régime de retraite obligatoire. En cas de naissances ou d'adoptions simultanées, la durée d'interruption d'activité prise en compte au titre de l'ensemble des enfants en cause est également de deux mois. / Cette interruption d'activité doit avoir eu lieu pendant la période comprise entre le premier jour de la quatrième semaine précédant la naissance ou l'adoption et le dernier jour de la seizième semaine suivant la naissance ou l'adoption. /Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, pour les enfants énumérés aux troisième, quatrième, cinquième et sixième alinéas du II de l'article L. 18 que l'intéressé a élevés dans les conditions prévues au III dudit article, l'interruption d'activité doit intervenir soit avant leur seizième anniversaire, soit avant l'âge où ils ont cessé d'être à charge au sens des articles L. 512-3 et R. 512-2 à R. 512-3 du code de la sécurité sociale. / II. - Sont prises en compte pour le calcul de la durée d'interruption d'activité les périodes correspondant à une suspension de l'exécution du contrat de travail ou à une interruption du service effectif, intervenues dans le cadre : a) Du congé pour maternité, (...) b) Du congé de paternité, (...) c) Du congé d'adoption, (...) d) Du congé parental, (...) e) Du congé de présence parentale, (...) f) D'une disponibilité pour élever un enfant de moins de huit ans (...) / III. - Les périodes visées au deuxième alinéa du 3° du I de l'article L. 24 sont les périodes n'ayant pas donné lieu à cotisation de l'intéressé et pendant lesquelles celui-ci n'exerçait aucune activité professionnelle ;

Considérant que les droits du fonctionnaire relatifs au point de départ de la jouissance de sa pension de retraite doivent être légalement appréciés à la date à compter de laquelle le fonctionnaire demande à bénéficier de cette pension ; qu'il en résulte que les droits à pension de M. A doivent s'apprécier au regard des dispositions législatives et réglementaires applicables à la date du 1er septembre 2006 ; que cette date est postérieure à celle de l'entrée en vigueur des dispositions du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite précitées, intervenue le 12 mai 2005, date d'entrée en vigueur de leur décret d'application du 10 mai 2005 ; qu'ainsi, il n'a été fait aucune application rétroactive des dispositions du I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite dans leur rédaction issue de l'article 136 de la loi du 30 décembre 2004 ; que, par suite, les moyens tirés de ce que ces dispositions méconnaîtraient les stipulations des articles 6§1 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les principes de sécurité juridique et de confiance légitime sont inopérants ;

Considérant qu'eu égard à l'objet du droit, ouvert par la loi, d'entrer en jouissance immédiate de sa pension avant d'avoir atteint l'âge de la retraite, le principe d'égalité des rémunérations entre hommes et femmes n'interdisait pas que le décret pris pour l'application de ces dispositions fixe une durée minimale de deux mois à cette interruption et prévoie, parmi les positions statutaires donnant droit à son bénéfice, le congé de maternité, alors même que de ce fait et en raison du caractère facultatif des autres congés, pour la plupart non rémunérés et dont certains n'étaient pas encore ouverts aux hommes à la date à laquelle leurs enfants sont nés, le dispositif nouveau bénéficiera principalement aux fonctionnaires de sexe féminin ; qu'en outre, la circonstance que les fonctionnaires soient placés dans une situation légale et réglementaire ne peut être utilement invoquée par M. A au soutien de sa demande ;

Considérant que M. A ne soutient pas avoir interrompu son activité dans les conditions prévues par les dispositions de l'article R. 37 du code des pensions civiles et militaires de retraite précitées ; que, dès lors, il n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision implicite du ministre de l'éducation nationale lui refusant le bénéfice d'une pension de retraite à jouissance immédiate à compter du 1er septembre 2006 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'éducation nationale de l'admettre au bénéfice d'une telle pension à compter de cette date doivent être rejetées ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du président de la troisième chambre du tribunal administratif de Poitiers du 20 octobre 2006 est annulée.

Article 2 : La demande de M. A présentée devant le tribunal administratif de Poitiers et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Daniel A, au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique et au ministre de l'éducation nationale.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 08 avr. 2009, n° 299946
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Jouguelet
Rapporteur ?: Mme Cécile Raquin
Rapporteur public ?: M. Collin Pierre
Avocat(s) : SCP VIER, BARTHELEMY, MATUCHANSKY

Origine de la décision
Formation : 9ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 08/04/2009
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 299946
Numéro NOR : CETATEXT000020541150 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2009-04-08;299946 ?
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