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08/04/2009 | FRANCE | N°301599

France | France, Conseil d'État, 9ème sous-section jugeant seule, 08 avril 2009, 301599


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 février et 14 mai 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Marcel A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 16 décembre 2006 par laquelle le ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat a rejeté sa demande tendant au bénéfice de la majoration pour enfant prévue par l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

2°) d'enjoindre à l'Etat, au besoin sous astreinte, de prendre les mesures

d'exécution qu'impliquera l'annulation de cette décision ;

3°) de mettre à la ch...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 février et 14 mai 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Marcel A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 16 décembre 2006 par laquelle le ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat a rejeté sa demande tendant au bénéfice de la majoration pour enfant prévue par l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

2°) d'enjoindre à l'Etat, au besoin sous astreinte, de prendre les mesures d'exécution qu'impliquera l'annulation de cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le Traité instituant la Communauté européenne ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le premier protocole additionnel à cette convention ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Raquin, Auditeur,

- les observations de la SCP Tiffreau, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Tiffreau, avocat de M. A ;

Considérant que M. A demande l'annulation de la décision du 16 décembre 2006 par laquelle le ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat a rejeté sa demande tendant à l'attribution de la majoration de pension prévue par l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite en faveur des titulaires ayant élevé trois enfants, au motif que la condition tenant à ce que les enfants aient été élevés pendant neuf ans, à l'exception des enfants décédés par faits de guerre, n'était pas satisfaite ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite : I. - Une majoration de pension est accordée aux titulaires ayant élevé au moins trois enfants (...)/ III. - A l'exception des enfants décédés par faits de guerre, les enfants devront avoir été élevés pendant au moins neuf ans, soit avant leur seizième anniversaire, soit avant l'âge où ils ont cessé d'être à charge au sens des articles L. 512-3 et R. 512-2 à R. 512-3 du code de la sécurité sociale ;

Considérant que si M. A soutient que l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires précité méconnaît le principe constitutionnel d'égalité des citoyens devant la loi énoncé par l'article 2 de la Constitution et l'article 6 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen en tant qu'il ne dispense de la condition de neuf ans d'éducation des enfants que dans le seul cas d'un décès par fait de guerre, il n'appartient pas au juge administratif, dans l'attente de la loi organique portant application de l'article 61-1 de la Constitution, d'apprécier la conformité à la Constitution de cette disposition législative ;

Considérant qu'aux termes de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur (...) la fortune ; qu'aux termes de l'article premier du premier protocole additionnel à la convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens ;

Considérant que le législateur, en créant une exception à l'exigence de durée d'éducation énoncée au III de l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite, concernant les enfants décédés par faits de guerre, a entendu tenir compte de la circonstance particulière de l'engagement de l'Etat dans un conflit armé, et s'est fondé sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec les buts de la loi ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les dispositions de l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite porteraient une atteinte disproportionnée au droit au respect de leurs biens ou méconnaîtraient le principe de non-discrimination dans le droit au respect des biens qui résulte des stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article premier du premier protocole additionnel à la convention ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 18 du code des pensions civiles et militaires de retraite ouvrent aux fonctionnaires ayant élevé au moins trois enfants une majoration de leur pension de retraite ; que, dès lors que cet avantage est ouvert tant aux hommes qu'aux femmes, ces dispositions ne sont pas incompatibles avec le principe d'égalité des rémunérations entre hommes et femmes tel qu'il est affirmé par l'article 141 du Traité instituant la Communauté européenne, et interprété par la Cour de justice des Communautés européennes dans son arrêt du 29 novembre 2001 ;

Considérant que la circonstance que les trois enfants en cause puissent être pris en compte dans la liquidation de la pension d'assurance vieillesse du régime général de la sécurité sociale, en vertu du texte propre à cette pension, est sans incidence sur les droits à pension de M. A qui sont régis par un texte différent ; que les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne font pas obstacle à ce que le législateur règle différemment les situations des personnes régies par des systèmes de sécurité sociale distincts ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par la décision attaquée, le ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat a rejeté sa demande ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Marcel A, au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique et au ministre de la défense.


Synthèse
Formation : 9ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 301599
Date de la décision : 08/04/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 08 avr. 2009, n° 301599
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Jouguelet
Rapporteur ?: Mme Cécile Raquin
Rapporteur public ?: M. Collin Pierre
Avocat(s) : SCP TIFFREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:301599.20090408
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