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10/04/2009 | FRANCE | N°307485

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 10 avril 2009, 307485


Vu le pourvoi, enregistré le 16 juillet 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par la MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 2 mai 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, après avoir annulé le jugement du 28 juin 2006 du tribunal administratif de Paris annulant la décision du 29 juillet 2002 du ministre de l'intérieur refusant à l'association Clichy Montmartre Billard C

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Vu le pourvoi, enregistré le 16 juillet 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par la MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 2 mai 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, après avoir annulé le jugement du 28 juin 2006 du tribunal administratif de Paris annulant la décision du 29 juillet 2002 du ministre de l'intérieur refusant à l'association Clichy Montmartre Billard Club le renouvellement de son autorisation de pratiquer les jeux de hasard ensemble sa décision confirmative du 11 septembre 2002, a annulé lesdites décisions ;

2°) réglant l'affaire au fond de rejeter la demande formée par l'association Clichy Montmartre Billard Club auprès du tribunal administratif tendant à l'annulation des décisions des 29 juillet et 11 septembre 2002 ;

3°) de mettre à la charge de l'association Clichy Montmartre Billard Club la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi de finances du 30 juin 1923 modifiée ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;

Vu le décret n° 47-798 du 5 mai 1947 modifié ;

Vu l'instruction en date du 15 juillet 1947 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'association Clichy Montmartre Billard Club ,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, Rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'association Clichy Montmartre Billard Club ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'aux termes de l'article 47 de la loi de finances du 30 juin 1923 modifiée : Les jeux de hasard ne peuvent être pratiqués dans les cercles constitués sous le régime de la loi du 1er juillet 1901 qu'en vertu d'une autorisation toujours révocable du ministre de l'intérieur, et sous réserve : (...) 2° que la direction et le fonctionnement des jeux soient assurés en conformité des règles posées par le décret qui déterminera les modalités d'application du présent article ou par des instructions administratives, (...) ; que le décret du 5 mai 1947 portant règlement de la police des jeux dans les cercles, pris en application de l'article 47 de la loi, dispose en son article 1er que : L'autorisation de jeux... confère aux membres du cercle qui l'a obtenue ... le droit de pratiquer des jeux de hasard... et renvoie, en son article 7, à une instruction du ministre de l'intérieur le soin de fixer les conditions d'application du décret ; que cette instruction, intervenue le 15 juillet 1947, a été publiée au Journal officiel du 19 juillet 1947 ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision en date du 29 juillet 2002, confirmée le 11 septembre 2002, le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales a rejeté la demande de renouvellement de l'autorisation de pratiquer le poker et le multicolore dans ses salons de jeux présentée par l'association Clichy Montmartre Billard Club , au motif que les irrégularités précédemment constatées relatives à la disposition des locaux demeurent et ... que leur libre accès, notamment celui des deux salles de billard, où aucun filtrage ni contrôle n'est exercé, alors que l'entrée du cercle doit être exclusivement réservée aux membres de l'association, constitue une infraction au regard de la réglementation des jeux dans les cercles et que, en outre, le manque d'autonomie de la direction des jeux par rapport à l'association ne permet pas l'exploitation normale de l'établissement ;

Considérant qu'après avoir annulé pour irrégularité le jugement du tribunal administratif de Paris du 28 juin 2006 qui lui était déféré en appel par le ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, la cour administrative d'appel de Paris, statuant par la voie de l'évocation sur la demande de première instance de l'association Clichy Montmartre Billard Club , a annulé la décision du ministre au motif que les dispositions du décret du 5 mai 1947 n'interdisaient ni le libre accès de personnes étrangères à l'association aux salles où se pratiquent d'autres activités que les jeux de hasard, ni la possibilité pour le directeur des jeux d'être membre du conseil d'administration de l'association gestionnaire d'un cercle ouvert, sans répondre au moyen soulevé par le ministre tiré de ce que ces interdictions trouvaient leur base légale dans les articles 7 et 37 et 38 ainsi que dans les articles 16 et 17 de l'instruction du 15 juillet 1947 ; que la cour a ainsi entaché sur ce point sa décision d'une insuffisance de motivation ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler l'arrêt attaqué en tant seulement qu'il annule en son article 2, après évocation, la décision du 29 juillet 2002 ainsi que la décision confirmative du 11 septembre 2002 ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond, dans la mesure de la cassation prononcée ;

Sur les conclusions à fin de non-lieu :

Considérant que la circonstance que le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales ait, par arrêté du 10 février 2003, autorisé à nouveau, pour une période d'un an, l'association Clichy Montmartre Billard Club à ouvrir à ses membres les salons où se pratiquent le multicolore et le poker, n'a pas eu pour effet de rendre sans objet la demande de la requérante tendant à l'annulation du refus du renouvellement d'autorisation qui lui avait été opposé le 29 juillet 2002, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorisation ainsi délivrée fasse entièrement droit à la demande qui avait été initialement présentée par l'association ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

Considérant que si, ainsi qu'en dispose l'article 4 du décret du 5 mai 1947, Les membres du cercle ont seuls le droit de pénétrer dans les salles où sont pratiqués les jeux , il ne ressort ni de l'article 7 de l'instruction du 15 juillet 1947 aux termes duquel : Le cercle doit être absolument indépendant de tout café, restaurant, hôtel, dancing ou établissements similaires existant dans le même immeuble... Le cercle doit, enfin, posséder une entrée spéciale nettement séparée de celle de tout établissement ouvert au public... , ni de celle de l'article 37 de cette même instruction selon lequel : Un contrôle est exercé à l'entrée des salles de jeu par un physionomiste ... En dehors des personnes qui ne sont pas membres du cercle, l'accès des salles de jeux doit être refusé à tous individus en état d'ivresse ou susceptible de provoquer un scandale ou des incidents , ni davantage de l'article 38 de ladite instruction qui dispose que Les personnes qui ont fait l'objet d'une décision d'interdiction des jeux du ministère de l'intérieur ne peuvent pénétrer, ni dans les salles de jeux, ni dans les autres locaux du cercle , que l'accès à l'établissement, où se pratique à titre principal le billard, soit exclusivement réservé aux membres du cercle de jeux ; que par suite en se fondant sur ce que l'entrée du cercle doit être exclusivement réservée aux membres de l'association et en déduisant, alors que l'accès au cercle de jeu lui-même était contrôlé, que le libre accès à l'établissement et aux salles de billard constituait une infraction à la réglementation des jeux, le ministre a commis une erreur de droit ; qu'en relevant que ces irrégularités relatives à la disposition des locaux avaient été précédemment constatées le ministre a, en outre, entaché sa décision d'une erreur de fait, dès lors qu'aucune des pièces du dossier, au nombre desquelles figure le registre renseigné par l'administration lors des visites de contrôle effectuées en application de l'article 65 de l'instruction, n'a fait état des irrégularités reprochées à l'association préalablement à la décision attaquée ;

Considérant que si la décision attaquée est fondée, en outre , sur le manque d'autonomie de la direction des jeux par rapport à l'association , il ne résulte pas du dossier que le ministre aurait, si il n'avait retenu que ce motif, pris la même décision ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande, l'association Clichy Montmartre Billard Club est fondée à soutenir que la décision du 29 juillet 2002 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de lui accorder le renouvellement de son autorisation de pratiquer les jeux de hasard ainsi que sa décision confirmative en date du 11 septembre 2002, sont illégales ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que la présente décision n'implique pas nécessairement que le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités locales prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé ; que par suite la requérante n'est pas fondée à demander au Conseil d'Etat d'enjoindre au ministre de renouveler l'autorisation dont elle disposait ; qu'au demeurant après examen d'une demande nouvelle présentée le 9 septembre 2002 une autorisation de pratiquer les jeux de hasard lui a délivrée le 10 février 2003 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros que demande l'association Clichy Montmartre Billard Club au titre des frais exposés par elle devant le Conseil d'Etat et non compris dans les dépens tant en appel que devant le Conseil d'Etat ; qu'en revanche ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de cette association la somme demande le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES au même titre ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'article 2 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 2 mai 2007 ainsi que les décisions du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en date du 29 juillet 2002 et du 11 septembre 2002 refusant à l'association Clichy Montmartre Billard Club le renouvellement de son autorisation de pratiquer des jeux de hasard sont annulés.

Article 2 : Les conclusions à fin d'injonction présentées par l'association Clichy Montmartre Billard Club sont rejetées.

Article 3 : L'Etat versera à l'association Clichy Montmartre Billard Club la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES et à l'association Clichy Montmartre Billard Club .


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 307485
Date de la décision : 10/04/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

63 ÉLECTIONS ET RÉFÉRENDUM. ÉLECTIONS MUNICIPALES. CAMPAGNE ET PROPAGANDE ÉLECTORALES. CAMPAGNE ÉLECTORALE. - DISPOSITIONS RÉGLEMENTANT L'ACCÈS AUX SALLES DE JEU (ART. 4 DU DÉCRET DU 5 MAI 1947 ET INSTRUCTION DU 15 JUILLET 1947) - CHAMP - SALLES DE BILLARD - EXCLUSION.

63 Les dispositions combinées de l'article 4 du décret n° 47-798 du 5 mai 1947 et des articles 7, 37 et 38 de l'instruction du 15 juillet 1947 ne peuvent sans erreur de droit être interprétées comme permettant au ministre de l'intérieur de refuser au pétitionnaire une autorisation d'exploiter les jeux au motif que le libre accès à l'établissement et aux salles de billard constitue une infraction à ces dispositions, qui ne visent que l'accès aux salles de jeu.


Publications
Proposition de citation : CE, 10 avr. 2009, n° 307485
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Daël
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle
Rapporteur public ?: M. Thiellay Jean-Philippe
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:307485.20090410
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