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10/04/2009 | FRANCE | N°324783

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 10 avril 2009, 324783


Vu la requête, enregistrée le 5 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Yusuf A, domicilié au cabinet de Me Loïc Bourgeois, 1, rue Louis Blanc à Nantes (44200) ; M. Yusuf A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision du 8 janvier 2009 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 13 février 2008

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Vu la requête, enregistrée le 5 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Yusuf A, domicilié au cabinet de Me Loïc Bourgeois, 1, rue Louis Blanc à Nantes (44200) ; M. Yusuf A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision du 8 janvier 2009 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours dirigé contre la décision du 13 février 2008 de l'Ambassade France en Turquie lui refusant un visa de long séjour en qualité de conjoint de ressortissant français ;

2°) d'enjoindre, à titre principal, à l'Ambassade de France en Turquie de lui délivrer le visa sollicité sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, à l'Ambassade de France en Turquie de procéder au réexamen de la demande de visa dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que sa requête est recevable ; que la condition d'urgence doit être regardée comme remplie dès lors que le refus de visa contesté a pour effet de prolonger la séparation contrainte des époux ; que son épouse ne dispose pas de ressources suffisantes pour rendre plus régulièrement visite à son mari ; que son épouse ne saurait être privée de son droit de mener une vie familiale normale en France ; qu'il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée dès lors qu'elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; que le caractère réel et sincère de leur union n'est pas sérieusement contestable ; que son épouse s'est rendue plusieurs fois en Turquie pour le voir et qu'elle lui apporte son soutien financier ; qu'il communique avec sa femme régulièrement par téléphone et par le biais d'internet ; que l'état de santé de son épouse nécessite sa présence auprès d'elle ; qu'en outre l'absence d'intention matrimoniale ne figure pas au nombre des critères pouvant justifier un refus de visa ; que par suite, l'administration a commis une erreur de droit dans la mesure où elle ne prétend pas que M. A serait coupable de fraude ;

Vu, enregistré le 1er avril 2009, le mémoire en réplique présenté par M. A ; il soutient que son épouse ne peut fournir de relevés téléphoniques démontrant leurs appels téléphoniques dans la mesure où celle-ci bénéficie d'un abonnement téléphonique reposant sur un forfait illimité ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. Yusuf A et, d'autre part, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du jeudi 2009 à 10 heures 30 au cours de laquelle a été entendu Me Molinié, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de M.Yusuf A ;

Considérant qu'en vertu du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la possibilité pour le juge des référés d'ordonner la suspension de l'exécution d'une décision administrative est subordonnée à la double condition que soit invoqué un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de cette décision et qu'il y ait urgence ;

Considérant qu'il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté devant l'autorité judiciaire le visa nécessaire pour que les époux puissent mener une vie familiale normale ; que pour y faire obstacle, il appartient à l'administration, si elle allègue une fraude, d'établir que le mariage a été entaché d'une telle fraude de nature à justifier légalement le refus de visa ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Yusuf A ressortissant turc né le 28 avril 1977 serait entré clandestinement en France le 25 mai 2001 ; que peu après son arrivée en France il a déposé une demande d'asile qui a été rejetée le 22 novembre 2002 ; qu'il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire national jusqu'en février 2006 ; qu'il s'est vu signifier un arrêté de reconduite à la frontière en juin 2004 ; que le 6 mars 2006, soit un mois après son retour en Turquie, M. A a contracté mariage à Besni (Turquie) avec Mme Catherine B, ressortissante française née le 29 juillet 1976, qu'il a rencontrée lors d'une soirée fin octobre 2005 ; que, si M. A fait valoir que le refus de visa qui lui a été opposé le prive de rejoindre son épouse, de nationalité française, dont il vit éloigné, cette circonstance ne suffit pas à elle seule à établir en l'espèce, eu égard notamment à la brève durée de vie commune des intéressés avant le retour de M. A en Turquie, que la décision attaquée préjudicierait à ses intérêts de manière suffisamment caractérisée pour constituer une situation d'urgence au sens de l'article L. 521-1 du code de justice administrative ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de ce que la condition tenant à l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée serait remplie, que les conclusions de M. A aux fins de suspension de l'exécution de la décision lui refusant un visa de long séjour doivent être rejetées ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à M. A la somme que ce dernier demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. Yusuf A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Yusuf A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 324783
Date de la décision : 10/04/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 10 avr. 2009, n° 324783
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Aguila
Rapporteur ?: M. Yann Aguila
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:324783.20090410
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