La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/04/2009 | FRANCE | N°285192

France | France, Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 27 avril 2009, 285192


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 septembre 2005 et 10 janvier 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Hervé A, demeurant ...; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 7 juillet 2005 de la cour administrative d'appel de Bordeaux en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du jugement du 11 décembre 2001 du tribunal administratif de Pau rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au tit

re de l'année 1990 et des pénalités correspondantes ;

2°) réglant l'af...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 16 septembre 2005 et 10 janvier 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Hervé A, demeurant ...; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 7 juillet 2005 de la cour administrative d'appel de Bordeaux en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du jugement du 11 décembre 2001 du tribunal administratif de Pau rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1990 et des pénalités correspondantes ;

2°) réglant l'affaire au fond, d'annuler le jugement du 11 décembre 2001 du tribunal administratif de Pau et de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 77-486 du 13 mai 1977 et le décret n° 77-520 du 20 mai 1977 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Fabienne Lambolez, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Vuitton, Ortscheidt, avocat de M. Hervé A,

- les conclusions de Mme Julie Burguburu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée à nouveau à la SCP Vuitton, Ortscheidt, avocat de M. Hervé A ;

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 2 de la loi du 13 mai 1977 autorisant le Gouvernement à émettre un emprunt bénéficiant d'avantages fiscaux et du 8° ter de l'article 157 du code général des impôts que les plus-values éventuelles de cession ou de remboursement des titres de l'emprunt d'Etat de 1977 au taux de 8,80 % sont exonérées de l'impôt sur le revenu, et que seuls sont soumis à l'impôt sur le revenu les intérêts procurés par ces titres, sous réserve d'un abattement de 1000 francs par an et par déclarant ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'administration fiscale a soumis à l'impôt sur le revenu la totalité de la somme de 3 860 080 francs créditée le 26 décembre 1990 sur le compte bancaire de M. A à la Banque industrielle et mobilière privée (BIMP) par la Banque de marchés et d'arbitrage (BMA), au titre de 2000 parts du fonds commun de placement Brennus constituées de titres de l'emprunt de 1977 à 8,80 %, au motif que le contribuable ne justifiait pas de la nature de ces produits et n'était ainsi pas en mesure d'établir que la somme perçue ne comportait aucune distribution d'intérêts ; que M. A se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la décharge du supplément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti ;

Sur la régularité de l'arrêt attaqué :

Considérant que si M. A a soutenu devant la cour administrative d'appel de Bordeaux que la notification de redressements aurait été insuffisamment motivée pour n'avoir pas comporté les mentions permettant au contribuable de bénéficier des garanties prévues à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, la cour a suffisamment répondu à ce moyen en jugeant que l'administration n'avait pas entendu, même implicitement, fonder le redressement sur une qualification d'abus de droit ;

Considérant que la cour a répondu, sans entacher sa décision d'une insuffisance de motivation, au moyen tiré du défaut de transmission de documents obtenus par l'administration dans l'exercice de son droit de communication auprès de tiers ;

Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :

En ce qui concerne les moyens relatifs à la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'en jugeant, pour écarter le moyen tiré de ce que les investigations de l'administration auprès de la BIMP et de la BMA auraient constitué une vérification de comptabilité, que l'administration s'était bornée à comparer les déclarations du contribuable et des informations qu'elle a recueillies en exerçant son droit de communication auprès de l'organisme gestionnaire du fonds commun de placement Brennus et de l'établissement teneur du compte bancaire de M. A, sans mettre en cause le caractère probant des documents comptables, au demeurant lacunaires, obtenus auprès de ces établissements, ni rapprocher ces documents de leurs propres déclarations, les juges d'appel n'ont, en tout état de cause, pas méconnu la portée de l'article R. 13-1 du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'administration a communiqué à M. A le 20 avril 1995, en réponse à la demande du contribuable, copie des avis de passage adressés à la BMA et à la BIMP, de l'état des souscriptions de M. A au fonds commun de placement Brennus en décembre 1990 et des relevés du compte bancaire de M. A à la BIMP pour la période du 1er juillet au 31 décembre 1990 ; que la cour n'a pas dénaturé les faits en jugeant que l'administration avait communiqué au requérant l'ensemble des documents qu'elle a utilisés pour établir l'imposition ;

Considérant que la cour administrative d'appel de Bordeaux n'a ni dénaturé les termes de la notification de redressements, ni commis d'erreur de qualification juridique en écartant, au motif que le redressement n'était pas fondé sur l'existence d'un abus de droit, le moyen tiré de la méconnaissance des garanties de procédure que l'administration doit respecter lorsqu'elle met en oeuvre la procédure de répression des abus de droit, prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

Considérant que si le requérant soutient que la cour a méconnu les articles L. 55 et suivants du livre des procédures fiscales en refusant d'annuler le jugement attaqué alors que les premiers juges auraient fait droit dans des conditions irrégulières à une substitution de motifs demandée par l'administration, il n'avait pas contesté devant la cour administrative d'appel la régularité de la substitution de motifs qu'aurait acceptée le tribunal administratif ; que par suite, le moyen, qui est soulevé pour la première fois devant le juge de cassation et n'est pas d'ordre public en cassation, n'est pas recevable ;

En ce qui concerne les moyens relatifs au bien-fondé de l'imposition :

Considérant en premier lieu, qu'en jugeant que les versements représentatifs des intérêts de l'emprunt d'Etat de 1977 à 8,80 %, le cas échéant reportés sur l'année suivante, n'avaient pas le caractère de plus-values de remboursement au sens des dispositions du 8° ter de l'article 157 du code général des impôts et par suite, n'entraient pas dans le champ de l'exonération prévue par ces dispositions, la cour n'a commis aucune erreur de droit ; que si la cour a inexactement qualifié d'intérêts capitalisés les intérêts dont la mise en paiement aurait simplement été différée, par application des dispositions du I de l'article 39 de la loi du 2 août 1989 relative à la sécurité et à la transparence du marché financier, cette erreur de qualification n'a pas eu en l'espèce d'incidence sur la règle de droit appliquée par la cour et n'est pas de nature à entraîner la cassation de l'arrêt ;

Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes du I de l'article 125 A du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'imposition litigieuse : (...) les personnes physiques qui bénéficient d'intérêts (...) de fonds d'Etat, obligations, (...) dont le débiteur est domicilié ou établi en France, peuvent opter pour leur assujettissement à un prélèvement qui libère les revenus auxquels il s'applique de l'impôt sur le revenu. /La retenue à la source éventuellement opérée sur ces revenus est imputée sur le prélèvement. / Celui-ci est effectué par le débiteur ou par la personne qui assure le paiement des revenus. ; que si le requérant soutient que la cour aurait dénaturé les pièces du dossier en affirmant que M. A n'établissait pas avoir opté pour l'application du régime du prélèvement libératoire aux intérêts des titres de l'emprunt d'Etat de 1977 à 8,80 % qu'il détenait par l'intermédiaire du fonds commun de placement Brennus, cette critique adressé à un motif surabondant de l'arrêt attaqué est inopérante ;

Considérant en dernier lieu que, comme il a été dit ci-dessus, les intérêts de l'emprunt d'Etat de 1977 à 8,80 % ne sont pas exonérés de l'impôt sur le revenu, sous réserve d'un abattement annuel de 1000 francs par déclarant ; que par suite, la cour n'a entaché son arrêt d'aucune contradiction de motifs en jugeant, après avoir relevé que le contribuable n'établissait pas que la somme de 3 860 080 francs ne comprenait aucun versement d'intérêts, que cette somme ne pouvait être regardée comme entrant dans le champ de l'exonération prévue par le 8° ter de l'article 157 du code général des impôts au bénéfice des seules plus-values de cession ou de remboursement de titres de l'emprunt de 1977 à 8,80 % ;

En ce qui concerne les intérêts de retard :

Considérant que l'intérêt de retard prévu par l'article 1727 du code général des impôts vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non-respect par les contribuables de leur obligation de payer l'impôt ; que si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; que, par suite, la cour n'a commis aucune erreur de droit en se référant au taux moyen pratiqué pour un prêt bancaire non négocié pour juger que l'intérêt de retard appliqué à M. A n'avait pas le caractère d'une sanction ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel de Bordeaux ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. A est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Hervé A et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.


Synthèse
Formation : 10ème et 9ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 285192
Date de la décision : 27/04/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 27 avr. 2009, n° 285192
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: Mme Fabienne Lambolez
Rapporteur public ?: Mme Burguburu Julie
Avocat(s) : SCP VUITTON, ORTSCHEIDT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:285192.20090427
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award