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11/05/2009 | FRANCE | N°326289

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 11 mai 2009, 326289


Vu la requête, enregistrée le 20 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Mohamed A, élisant domicile au cabinet de Maître Alain Couderc, 11 rue Royale à Lyon (69001) ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision lui refusant la délivrance d'un visa de court séjour ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de

réexaminer sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de l...

Vu la requête, enregistrée le 20 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Mohamed A, élisant domicile au cabinet de Maître Alain Couderc, 11 rue Royale à Lyon (69001) ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision lui refusant la délivrance d'un visa de court séjour ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de réexaminer sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que la condition d'urgence est satisfaite dans la mesure où la décision litigieuse méconnaît l'autorité de la chose jugée par l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 9 juillet 2008, laquelle a annulé la décision du 20 août 2007 portant obligation de quitter le territoire français, d'une part et a enjoint à l'autorité préfectorale de procéder à la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, d'autre part ; qu'en outre, cette décision préjudicie tant à sa situation personnelle qu'à celle de sa famille, comme en atteste la dégradation de l'état de santé de son épouse ; qu'il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ; que cette dernière méconnaît le droit au respect de la vie privée et familiale, tel que garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en effet, l'ensemble de ses attaches familiales se situe sur le territoire français ; qu'au surplus, un certain nombre de pièces versées au dossier témoigne de son intégration sociale, culturelle et professionnelle en France ; que la décision litigieuse est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dans la mesure où l'arrêt rendu par la cour administrative d'appel de Lyon, le 9 juillet 2008, a procédé à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français prise à son encontre ; qu'en outre, en le maintenant séparé de ses enfants, la décision contestée compromet l'intérêt supérieur de ces derniers, en violation de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu la décision dont la suspension est demandée ;

Vu la requête à fin d'annulation de la même décision et le recours présenté à la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu, enregistré le 24 mars 2009, le mémoire présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que cette dernière est irrecevable dans la mesure où les conclusions présentées par le requérant visent la suspension de la décision des autorités consulaires à Annaba, nonobstant l'intervention de la décision implicite de rejet de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ; qu'en outre, les conclusions aux fins de suspension portant sur le refus opposé à sa demande de visa dit de retour doivent être déclarées irrecevables dans la mesure où le requérant a introduit une requête contre la décision du consul général de France lui refusant la délivrance d'un visa de court séjour pour visite familiale ; il précise, à titre subsidiaire, que la condition d'urgence n'est pas remplie dans la mesure où le requérant ne fait état d'aucune circonstance particulière de nature à établir l'existence d'un préjudice grave et immédiat ; qu'en outre, l'administration n'a pas commis d'erreur d'appréciation quant aux ressources du requérant, lesquelles sont insuffisantes pour lui permettre de subvenir à ses besoins durant son séjour en France et pour assurer son retour en Algérie ; qu'au surplus, l'attestation d'accueil produite par le requérant ne couvre pas la durée de son séjour sur le territoire français ; qu'en outre, il existe un risque de détournement de l'objet du visa eu égard à la situation personnelle du requérant ; que le moyen tiré de l'atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale se trouve revêtu d'une portée relative, compte tenu de la nature du visa sollicité, alors que le requérant ne fait état d'aucune circonstance particulière mettant sa famille dans l'impossibilité de se rendre en Algérie ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté comme non fondé dès lors que la décision de s'installer en France avec ses enfants et de s'y maintenir en situation irrégulière relève d'un choix personnel du requérant ;

Vu, enregistré le 29 avril 2009, le mémoire en réplique, présenté par M. Mohamed A, qui persiste dans les conclusions de sa requête et présente les mêmes moyens ; il précise, en outre, que sa requête est recevable dans la mesure où cette dernière est dirigée en réalité contre la décision implicite de refus de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ; qu'au surplus, l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 9 juillet 2008 implique nécessairement le réexamen de son droit au séjour ; que la condition d'urgence est satisfaite dans la mesure où injonction a été faite à l'administration de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, M. A et, d'autre part, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du jeudi 30 avril 2009 à 11 h 30 au cours de laquelle a été entendu Me de Nervo, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat du requérant et à l'issue de laquelle l'instruction a été prolongée ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ;

Considérant que M. Mohamed A, de nationalité algérienne, qui séjournait irrégulièrement en France en compagnie de son épouse, elle-même en situation irrégulière, et de leurs cinq enfants, et qui avait sollicité la régularisation de sa situation administrative, a fait l'objet le 20 août 2007 d'une décision de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire ; que fin avril 2008, la mesure de reconduite a été exécutée ; que par arrêt du 9 juillet 2008, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé la décision du 20 août 2007 en tant qu'elle l'obligeait à quitter le territoire français, au motif que son épouse était sur le point d'accoucher et a enjoint au préfet du Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ; que M. A s'est vu refuser le visa de court séjour pour visite familiale qu'il avait sollicité ; que sa requête doit être regardée comme tendant à ce que soit ordonnée la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours qu'il avait formé contre ce refus ; que, contrairement à ce que soutient l'administration, M. A ne présente pas de conclusions tendant à ce que lui soit reconnu le droit à un visa de long séjour, de sorte que la fin de non recevoir tirée de ce que cette demande nouvelle serait irrecevable doit, en toute hypothèse, être rejetée ;

Considérant que le moyen tiré de ce que le refus contesté porterait une atteinte disproportionnée au respect de son droit à une vie familiale normale n'est pas, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de cette décision de refus, dès lors que si son épouse séjourne en France avec leurs enfants, elle se trouve elle-même en situation irrégulière et fait l'objet d'une décision de refus de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire, l'appel qu'elle a formé contre le jugement du tribunal administratif de Lyon rejetant sa demande dirigée contre cette décision étant encore pendant ; que la circonstance que des demi-frères et soeur de M. A auraient la nationalité française ne sauraient davantage, dans les circonstances de l'espèce, permettre de regarder ce moyen comme de nature à faire naître un tel doute ; qu'il en est de même, compte tenu des conditions de séjour des époux en France, du moyen tiré de la méconnaissance de la convention internationale relative aux droits des enfants, ainsi que du moyen tiré de ce que l'administration aurait commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation, l'obligation de quitter le territoire dont il a fait l'objet ayant été annulée par la cour administrative d'appel de Lyon, eu égard au motif susrappelé de cette annulation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de ce que la condition d'urgence exigée par les dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative serait remplie, les conclusions de la requête aux fins de suspension doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. Mohamed A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Mohamed A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 326289
Date de la décision : 11/05/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 11 mai. 2009, n° 326289
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Chantepy
Rapporteur ?: M. Christophe Chantepy
Avocat(s) : DE NERVO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:326289.20090511
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