Vu la requête, enregistrée le 4 novembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Gustave A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 6 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa protestation dirigée contre les opérations électorales qui se sont déroulées le 16 mars 2008 pour l'élection des conseillers municipaux de la commune d'Halluin (Nord) ;
2°) d'annuler ces opérations électorales, ou, à titre subsidiaire, d'annuler l'élection de M. Mickaël B comme conseiller municipal de la commune d'Halluin ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Karin Ciavaldini, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;
Considérant que lors des opérations électorales qui se sont déroulées le 16 mars 2008 en vue de la désignation, au second tour de scrutin, des conseillers municipaux de la commune d'Halluin (Nord), la liste conduite par M. C, maire sortant, est arrivée en tête avec 51,75 % des suffrages exprimés (4 204 voix) et a obtenu 25 sièges et celle conduite par M. A est arrivée en seconde position avec 48,25 % des suffrages exprimés (3 920 voix) et a obtenu 8 sièges ; que M. A fait appel du jugement du 6 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa protestation tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées les 9 et 16 mars 2008 en vue de l'élection des conseillers municipaux de la commune d'Halluin ;
Sur les fins de non-recevoir opposées par M. C :
Considérant, d'une part, que M. A, qui a reçu notification du jugement qu'il attaque le 11 octobre 2008, a relevé appel par une requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 4 novembre 2008 ; qu'ainsi, son appel, formé dans le délai d'un mois après la notification du jugement, n'est pas tardif ; que, d'autre part, contrairement à ce que soutient M. C, M. A a produit devant le Conseil d'Etat la copie du jugement qu'il attaque ;
Sur le grief tiré d'irrégularités dans la distribution de plis électoraux :
Considérant que la circonstance qu'au second tour de scrutin, environ 1 000 plis, adressés aux électeurs de la commune à l'adresse mentionnée sur les listes électorales et contenant les professions de foi des listes en présence ainsi que les bulletins de vote correspondants, ont été retournés à l'expéditeur avec la mention n'habite pas à l'adresse indiquée ne permet pas d'établir, à elle seule, l'existence d'une manoeuvre destinée à altérer la régularité du scrutin ; que l'existence d'une manoeuvre n'est pas davantage établie par le fait que seulement environ 400 plis de même nature n'ont pas pu être distribués aux électeurs pour le premier tour de scrutin ;
Sur le grief relatif à l'inéligibilité de M. B :
Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 228 du code électoral : Sont éligibles au conseil municipal tous les électeurs de la commune et les citoyens inscrits au rôle des contributions directes ou justifiant qu'ils devaient y être inscrits au 1er janvier de l'année de l'élection ; qu'aux termes de l'article L. 11 du même code : Sont inscrits sur la liste électorale, sur leur demande : / 1° Tous les électeurs qui ont leur domicile réel dans la commune ou y habitent depuis six mois au moins ; / 2° Ceux qui figurent pour la cinquième fois sans interruption, l'année de la demande d'inscription, au rôle d'une des contributions directes communales et, s'ils ne résident pas dans la commune, ont déclaré vouloir y exercer leurs droits électoraux. Tout électeur ou toute électrice peut être inscrit sur la même liste que son conjoint au titre de la présente disposition ; / 3° Ceux qui sont assujettis à une résidence obligatoire dans la commune en qualité de fonctionnaires publics (...) ;
Considérant que, pour solliciter son inscription le 24 décembre 2007 sur la liste électorale de la commune d'Halluin, M. B a indiqué qu'il était domicilié au 37 bis rue du cardinal Liénart, dans un logement propriété de la commune d'Halluin, et a produit un bail conclu le 15 décembre 2007 à titre précaire, pour une durée de seulement six mois ; que, s'il n'appartient pas au juge de l'élection d'apprécier si un électeur inscrit sur les listes électorales remplit effectivement la condition de domicile exigée par l'article L. 11 du code électoral, il lui incombe de rechercher si des manoeuvres dans l'établissement de la liste électorale ont altéré la sincérité du scrutin ; qu'il résulte de l'instruction que le logement objet du bail mentionné ci-dessus était insalubre et inhabitable et n'a d'ailleurs jamais été occupé par M. B ; que ce dernier n'a pas versé les loyers correspondant à la location de ce logement chaque mois, ainsi que le prévoyait le bail, mais au moyen d'un chèque unique, encaissé par le trésorier d'Halluin le 21 mars 2008, soit le lendemain de l'enregistrement au greffe du tribunal administratif de la protestation de M. A ; qu'enfin, il ne résulte pas de l'instruction que M. B ait eu l'intention, ainsi que le soutient M. C, de chercher un autre logement sur le territoire de la commune d'Halluin ; que la conclusion du bail mentionné ci-dessus présente dès lors le caractère d'une manoeuvre destinée à permettre l'inscription de M. B sur la liste électorale de la commune d'Halluin et, en conséquence, sa candidature aux élections municipales sur la liste de M. C ; que toutefois compte tenu, notamment, de l'écart de voix au second tour entre les deux listes en présence, cette manoeuvre n'a pas été, dans les circonstances de l'espèce, de nature à influer sur les résultats du second tour de scrutin ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille n'a pas annulé l'élection de M. B comme conseiller municipal de la commune d'Halluin ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 270 du code électoral, applicable aux communes de 3 500 habitants et plus : Le candidat venant sur une liste immédiatement après le dernier élu est appelé à remplacer le conseiller municipal élu sur cette liste dont le siège devient vacant pour quelque cause que ce soit. La constatation, par la juridiction administrative, de l'inéligibilité d'un ou plusieurs candidats n'entraîne l'annulation de l'élection que du ou des élus inéligibles. La juridiction saisie proclame en conséquence l'élection du ou des suivants de liste (...) ; qu'il y a lieu, par suite, de proclamer élue Mme Bérénice D, inscrite immédiatement après le dernier élu de la liste où figurait M. B ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. C et M. B au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'élection de M. B en qualité de conseiller municipal de la commune d'Halluin est annulée. Mme D est proclamée élue en qualité de conseillère municipale de la commune d'Halluin.
Article 2 : Le jugement du 6 octobre 2008 du tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A et les conclusions présentées par M. C et M. B au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Gustave A, à M. Jean-Luc C, à M. Mickaël B, à Mme Bérénice D et à la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.