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22/05/2009 | FRANCE | N°297916

France | France, Conseil d'État, 10ème et 9ème sous-sections réunies, 22 mai 2009, 297916


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 octobre 2006 et 2 janvier 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Henri A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 27 juin 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur le recours présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, réformé le jugement du 18 février 2003 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux avait condamné l'Etat à lui verser une somme de 23 642,60 euros, et a ramené le

montant de l'indemnité due à une somme de 2 000 euros, tous intérêts ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 octobre 2006 et 2 janvier 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Henri A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 27 juin 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur le recours présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, réformé le jugement du 18 février 2003 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux avait condamné l'Etat à lui verser une somme de 23 642,60 euros, et a ramené le montant de l'indemnité due à une somme de 2 000 euros, tous intérêts compris ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 57-985 du 30 août 1957 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Gilles Pellissier, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de M. Henri A,

- les conclusions de M. Julien Boucher, Rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, avocat de M. Henri A ;

Considérant que par un arrêt en date du 6 juillet 2000 devenu définitif, la cour administrative d'appel de Bordeaux a confirmé le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 27 février 1997 en tant qu'il a annulé la décision du 2 juin 1993 par laquelle M. A, receveur principal de 1ère classe à la Réunion, a été muté en qualité de fondé de pouvoir à la recette principale régionale des douanes de Bordeaux, pour absence de vacance de ce poste ; que M. A a demandé à l'Etat réparation des préjudices que cette mutation illégale lui avait causés ; que la même cour a jugé par un arrêt du 27 juin 2006 que le fait que M. A a été muté sur un poste qui n'a été libéré que cinq jours plus tard a été à l'origine d'un préjudice ; qu'elle a toutefois réformé le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en ramenant le montant de l'indemnité allouée pour ce préjudice de 23 642 euros à 2 000 euros ; que M. A demande l'annulation de l'arrêt ;

Considérant que dans ses conclusions d'appel, M. A a soulevé, outre l'illégalité de l'arrêté de mutation du 2 juin 1993 tirée de l'absence de vacance de poste, d'autres motifs d'illégalité tirés de ce que l'administration ne pouvait légalement le nommer sur un poste de fondé de pouvoir par suite du défaut de publication de l'arrêté du 25 mars 1993 autorisant la nomination des receveurs principaux de 1ère classe dans de telles fonctions, de ce que cette mutation était constitutive d'un détournement de pouvoir et de ce que, enfin, elle le privait illégalement de ses fonctions de comptable ; que la cour ne s'est prononcée que sur le moyen retenu par le juge de l'excès de pouvoir pour annuler la décision du 2 juin 1993 et a omis d'examiner les autres moyens qui n'étaient pas inopérants ; que, dès lors, M. A est fondé à demander l'annulation de l'arrêt du 27 juin 2006 ;

Considérant qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond et de statuer sur les appels de M. A et du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie devant la cour administrative d'appel de Bordeaux ;

Sur l'appel de M. A :

Considérant d'une part qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 6 du décret du 30 août 1957 relatif au statut des agents de la catégorie A des services extérieurs de la direction générale des douanes et droits indirects : Le receveur principal est chargé du recouvrement des droits et taxes perçus par la douane et de l'ensemble des opérations comptables effectuées dans sa recette. Il peut être chargé, sous l'autorité du receveur principal régional, de l'aliénation des marchandises confisquées ou abandonnées. Il peut, en outre, contrôler l'activité d'inspecteurs centraux et d'inspecteurs ; que l'article 36 alinéa 2 du même décret prévoit que des inspecteurs centraux peuvent être chargés, par arrêté du directeur général des douanes et des droits indirects, des fonctions de fondé de pouvoir auprès d'un receveur principal ; que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie n'a pas méconnu l'article 6 du décret du 30 août 1957, qui définit les fonctions des agents de catégorie A des services extérieurs de la direction générale des douanes et droits indirects titulaires du grade de receveur principal de première classe, en promouvant M. A dans les fonctions de fondé de pouvoir à la recette principale régionale de Bordeaux ; que, si l'article 36 alinéa 2 du même décret prévoit que des inspecteurs centraux peuvent être chargés des fonctions de fondé de pouvoir auprès d'un receveur régional, cette disposition, qui revêt un caractère dérogatoire, n'empêche pas la nomination dans ces fonctions de receveurs principaux ;

Considérant d'autre part que la décision d'affecter M. A sur un poste vacant à la recette principale régionale de Bordeaux est justifiée par l'intérêt du service ; que le détournement de pouvoir allégué n'est ainsi pas établi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander que l'Etat soit condamné à lui verser une somme supplémentaire de 25 000 euros ;

Sur l'appel du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie :

Considérant, en premier lieu, que si le préjudice résultant des troubles dans les conditions d'existence a été évalué à une somme supérieure à celle demandée à ce titre par M. A, le ministre n'est pas fondé à soutenir que le tribunal administratif de Bordeaux a statué au-delà des conclusions dont il était saisi, dès lors que le montant total de la somme allouée au requérant n'excède pas celui de la demande de première instance ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'autorité de la chose jugée qui s'attache à l'arrêt du 6 décembre 2001 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté la demande de remboursement des frais de déménagement de M. A entre la métropole et la Réunion après son admission à la retraite, au motif que l'intéressé ne faisait pas l'objet d'un rapatriement au lieu de sa résidence habituelle, ne faisait pas obstacle à ce que M. A se prevalût du préjudice né de ce refus de remboursement en invoquant l'illégalité de sa nomination en métropole ;

Considérant enfin que si la décision en date du 2 juin 1993 nommant M. A à la recette régionale des douanes de Bordeaux est illégale pour avoir été prise sans consultation préalable de la commission administrative paritaire et pour l'avoir nommé à compter du 1er juillet 1993, alors que le poste n'est devenu vacant que le 5 juillet 1993, M. A n'était pas fondé à prétendre, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Bordeaux, à une indemnité en réparation de préjudices qui résulteraient de la perte d'avantages financiers et de sa carrière, de troubles dans ses conditions d'existence, de l'atteinte à sa réputation, ainsi que des frais de réinstallation à la Réunion, qui ne sont pas la conséquence des illégalités en cause ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné l'Etat à verser à M. A la somme de 23 642,60 euros ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux en date du 27 juin 2006 est annulé.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 18 février 2003 est annulé.

Article 3 : La demande de M. A devant le tribunal administratif de Bordeaux et ses conclusions devant la cour administrative d'appel de Bordeaux sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions de M. A devant le Conseil d'Etat tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Henri A et à la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.


Synthèse
Formation : 10ème et 9ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 297916
Date de la décision : 22/05/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 22 mai. 2009, n° 297916
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Gilles Pellissier
Rapporteur public ?: M. Boucher Julien
Avocat(s) : SCP MASSE-DESSEN, THOUVENIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:297916.20090522
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