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29/05/2009 | FRANCE | N°310356

France | France, Conseil d'État, 1ère et 6ème sous-sections réunies, 29 mai 2009, 310356


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 octobre 2007 et 30 janvier 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE LABORATOIRES MAYOLY SPINDLER, dont le siège est 6, avenue de l'Europe à Chatou (78401) ; la SOCIETE LABORATOIRES MAYOLY SPINDLER demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 2 septembre 2007 par laquelle le Comité économique des produits de santé a prononcé à son encontre une sanction financière d'un montant de 280 200 euros en application des dispositions du troisième alinéa de l

'article L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale ;

2°) de condamner ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 octobre 2007 et 30 janvier 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE LABORATOIRES MAYOLY SPINDLER, dont le siège est 6, avenue de l'Europe à Chatou (78401) ; la SOCIETE LABORATOIRES MAYOLY SPINDLER demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du 2 septembre 2007 par laquelle le Comité économique des produits de santé a prononcé à son encontre une sanction financière d'un montant de 280 200 euros en application des dispositions du troisième alinéa de l'article L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale ;

2°) de condamner solidairement l'Etat et l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) au remboursement de cette sanction financière augmentée des intérêts moratoires au taux légal, à compter du jour du paiement ;

3°) subsidiairement, de réduire le montant de cette sanction financière et de condamner solidairement l'Etat et l'ACOSS au remboursement du surplus, augmenté des intérêts moratoires au taux légal, à compter du jour du paiement ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pascal Trouilly, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de la SOCIETE LABORATOIRES MAYOLY SPINDLER,

- les conclusions de Mlle Anne Courrèges, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Vier, Barthélemy, Matuchansky, avocat de la SOCIETE LABORATOIRES MAYOLY SPINDLER ;

Considérant que l'article L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale dispose que : (...) Lorsqu'une mesure d'interdiction de publicité a été prononcée par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé dans les conditions prévues à l'article L. 5122-9 du code de la santé publique, le Comité économique des produits de santé prononce, après que l'entreprise a été mise en mesure de présenter ses observations, une pénalité financière à l'encontre de ladite entreprise. / Cette pénalité ne peut être supérieure à 10 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France par l'entreprise au titre des spécialités ayant fait l'objet de la publicité interdite durant les six mois précédant et les six mois suivant la date d'interdiction. / Son montant est fixé en fonction de la gravité de l'infraction sanctionnée par la mesure d'interdiction et de l'évolution des ventes des spécialités concernées durant la période définie à l'alinéa précédent. / (...) Le recours présenté contre la décision prononçant cette pénalité est un recours de pleine juridiction ;

Considérant qu'à la suite d'une décision du directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) en date du 15 juin 2005 interdisant un document publicitaire se rapportant à la spécialité pharmaceutique Nabucox exploitée par la SOCIETE LABORATOIRES MAYOLY SPINDLER, le Comité économique des produits de santé (CEPS) a, en application des dispositions précitées du code de la sécurité sociale, prononcé le 2 septembre 2007 une pénalité financière d'un montant de 280 200 euros à l'encontre de cette société, qui en demande l'annulation ou, à titre subsidiaire, la réformation ;

Sur la motivation de la décision attaquée :

Considérant qu'une pénalité financière prononcée en application de l'article L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale constitue une décision administrative infligeant une sanction qui doit être motivée au sens de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; qu'en l'espèce, la décision litigieuse, après avoir fait mention des textes applicables, se réfère aux manquements constatés par l'AFSSAPS et indique en quoi ils lui apparaissent suffisamment graves pour justifier une pénalité financière ; que si l'article L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale prévoit que le montant de la pénalité prononcée par le CEPS ne peut être supérieur à 10 % du chiffre d'affaires hors taxes réalisé en France par l'entreprise au titre de la spécialité en cause durant les six mois précédant et les six mois suivant la date d'interdiction, cette disposition n'impose pas au comité, contrairement à ce que soutient la société requérante, de faire apparaître dans sa décision l'évolution des ventes de la spécialité concernée ; que le comité n'avait pas davantage à préciser, dans les motifs de sa décision, quelle spécialité du même laboratoire avait fait dans la période récente l'objet d'une interdiction de publicité ; qu'ainsi, la décision attaquée énonce suffisamment les éléments de droit et de fait sur lesquels le comité s'est fondé pour prononcer à l'encontre de la société requérante une pénalité de 280 200 euros ;

Sur l'existence d'un manquement :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, le CEPS est saisi à la suite d'une interdiction de publicité décidée par l'AFSSAPS en raison de manquements aux dispositions du code de la santé publique relatives à la publicité des médicaments qu'elle a relevés ; que ce comité est chargé d'apprécier la gravité de ces mêmes manquements et de décider en conséquence s'il y a lieu d'assortir l'interdiction de publicité d'une pénalité financière et quel doit être le montant de celle-ci ; que, dès lors, la société sanctionnée peut utilement soutenir, à l'appui de sa contestation devant le juge de la pénalité financière prononcée à son encontre, que c'est à tort que des manquements lui ont été imputés ;

Mais considérant qu'en l'espèce, si la société requérante soutient que l'absence de majoration du risque cardio-vasculaire lié au suivi d'un traitement par la spécialité Nabucox, soulignée par la brochure litigieuse, était bien avérée à la date de diffusion du message et aurait été ultérieurement confirmée par des études visant tous les anti-inflammatoires non stéroïdiens, il résulte de l'instruction que ces études se bornent à conclure que les données disponibles sont encore insuffisantes pour trancher la question de l'existence d'un risque thrombotique lié à l'usage de la nabumétone, principe actif du médicament Nabucox, sans exclure pour autant un tel risque ; que, dès lors, la SOCIETE LABORATOIRES MAYOLY SPINDLER n'est pas fondée à soutenir que ce document ne pouvait faire l'objet d'une interdiction de publicité par l'AFSSAPS ni, par suite, donner lieu à une pénalité financière prononcée par le CEPS ;

Sur la sanction financière prononcée :

Considérant que l'article L. 162-17-4 précise, ainsi qu'il a été dit plus haut, que le montant de la sanction pécuniaire est fixé par le CEPS en fonction de la gravité de l'infraction sanctionnée par la mesure d'interdiction et de l'évolution des ventes des spécialités concernées durant la période définie à l'alinéa précédent. ; que le CEPS indique, sans être contredit, que le montant de 280 200 euros qu'il a retenu correspond à environ 5 % du chiffre d'affaires en France du produit Nabucox pendant la période de référence, soit la moitié du plafond prévu par la loi ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que la mention erronée, dans la décision attaquée, des AINS et en particulier des COX , au lieu des AINS et en particulier de Nabucox , traduise une erreur du CEPS dans son analyse des circonstances de l'espèce ;

Considérant, en second lieu, que dans son appréciation de la gravité de l'infraction sanctionnée, le CEPS a pu estimer, sans méconnaître les dispositions précitées, que la publicité illégale concernant la spécialité pharmaceutique en cause a conduit à favoriser indûment un anti-inflammatoire non stéroïdien (AINS) plus cher que les autres médicaments de cette catégorie, induisant ainsi potentiellement des dépenses supplémentaires pour l'assurance maladie et créant une distorsion de concurrence à l'égard des autres AINS ; qu'il a pu également relever l'existence d'un autre manquement aux règles de publicité des médicaments à usage humain, dans la période récente, concernant une autre spécialité pharmaceutique commercialisée par la SOCIETE LABORATOIRES MAYOLY SPINDLER, prenant ainsi en compte, pour apprécier la gravité de l'infraction sanctionnée, le comportement persistant de l'entreprise au regard des dispositions en cause du code de la santé publique, sans que cette référence ait pour effet de sanctionner une seconde fois la précédente infraction ; qu'en revanche, si les ventes de la spécialité concernée ont diminué au cours de la période de référence, le CEPS n'était pas tenu de réduire de ce fait le montant de la pénalité envisagée au regard de la gravité de l'infraction ;

Considérant que, compte tenu de ce qui précède, l'infraction ayant consisté à alléguer que la consommation de Nabucox n'entraînait pas de majoration du risque cardio-vasculaire, ce qui n'est pas établi, présente un caractère de gravité suffisant pour justifier la sanction prononcée, alors même que, ainsi que le comité l'admet, l'élévation du risque de thrombose artérielle associé à une utilisation des AINS est faible ; qu'il n'apparaît donc pas que le montant de 280 200 euros retenu par le CEPS méconnaisse le principe selon lequel les sanctions doivent être proportionnées à la gravité des faits reprochés ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de la SOCIETE LABORATOIRES MAYOLY SPINDLER tendant à l'annulation ou, subsidiairement, à la réformation de la décision du 2 septembre 2007 du Comité économique des produits de santé doivent être rejetées, de même que ses conclusions tendant au remboursement corrélatif des sommes versées en application de cette décision ; qu'il en va de même, par voie de conséquence, de ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la SOCIETE LABORATOIRES MAYOLY SPINDLER est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE LABORATOIRES MAYOLY SPINDLER et au Comité économique des produits de santé.

Copie en sera adressée pour information à la ministre de la santé et des sports.


Synthèse
Formation : 1ère et 6ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 310356
Date de la décision : 29/05/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 29 mai. 2009, n° 310356
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vigouroux
Rapporteur ?: M. Pascal Trouilly
Rapporteur public ?: Mlle Courrèges Anne
Avocat(s) : SCP VIER, BARTHELEMY, MATUCHANSKY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:310356.20090529
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