Vu la requête, enregistrée le 17 novembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. R'houma A, demeurant ...; M. A demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret du 9 juin 2008 rapportant le décret du 20 janvier 2005 en tant qu'il le naturalisait ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution et notamment son préambule ;
Vu le code civil, notamment son article 27-2 ;
Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Philippe Lutton, chargé des fonctions de Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation du décret du 9 juin 2008 :
Considérant qu'aux termes de l'article 27-2 du code civil : Les décrets portant naturalisation ou réintégration peuvent être rapportés sur avis conforme du Conseil d'Etat dans le délai d'un an à compter de leur publication au Journal officiel si le requérant ne satisfait pas aux conditions légales ; si la décision a été obtenue par mensonge ou fraude, ces décrets peuvent être rapportés dans le délai de deux ans à partir de la découverte de la fraude ;
Considérant que, lors du dépôt de sa demande de naturalisation, le 15 mai 2002, M. A, de nationalité tunisienne, a déclaré être célibataire et a attesté sur l'honneur, par déclaration du 2 juin 2004, de l'absence de tout changement dans sa situation personnelle et familiale ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il avait épousé le 8 juillet 2003 à Gaafour (Tunisie) Mlle Naïma B, ressortissante de la Tunisie, résidant habituellement dans ce pays ; que si M. A, pour prouver sa bonne foi, soutient qu'il n'a pas cherché à dissimuler ce mariage à l'administration mais qu'il a été trompé par l'écrivain public chargé de remplir son dossier, il ressort des pièces du dossier que M. A, qui connaît bien la langue française et qui a signé lui-même tant la demande de naturalisation que la déclaration sur l'honneur, n'a pas pu, de bonne foi, se méprendre sur le sens de l'imprimé qu'il a inexactement rempli ; qu'il a ainsi volontairement dissimulé sa situation familiale ; que la décision prononçant sa naturalisation doit donc être regardée comme ayant été obtenue au vu d'un document mensonger ;
Considérant que le décret attaqué n'a ni pour objet ni pour effet d'interdire au requérant de se marier avec une ressortissante étrangère ; qu'ainsi, et en tout état de cause, il ne méconnaît pas la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le décret du 20 janvier 2005 portant naturalisation de M. A pouvait être légalement rapporté en application des dispositions précitées de l'article 27-2 du code civil ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 741-2 du code de justice administrative, le juge peut, dans les causes dont il est saisi, prononcer la suppression des écrits injurieux, outrageants ou diffamatoires ; que le huitième paragraphe de la troisième page de la requête de M. A en date du 17 novembre 2008 revêt un caractère injurieux et diffamatoire au sens de ces dispositions ; qu'il y a lieu, dès lors, d'accueillir les conclusions du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire tendant à l'application de cet article et d'ordonner le retrait de ce passage ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le huitième paragraphe de la troisième page de la requête de M. A, enregistrée le 17 novembre 2008, est supprimé.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. R'Houma A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.