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19/06/2009 | FRANCE | N°323438

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 19 juin 2009, 323438


Vu la requête, enregistrée le 22 décembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES (CNCCFP), dont le siège est 33 avenue de Wagram à Paris cedex 17 (75176) ; la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES (CNCCFP) demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 27 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Nantes, qu'elle avait saisi en application de l'article L. 52-15 du code électoral, a annulé sa décision du 24 septembre 2008 rej

etant le compte de campagne de M. Jean-Paul A au titre des...

Vu la requête, enregistrée le 22 décembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES (CNCCFP), dont le siège est 33 avenue de Wagram à Paris cedex 17 (75176) ; la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES (CNCCFP) demande au Conseil d'Etat d'annuler le jugement du 27 novembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Nantes, qu'elle avait saisi en application de l'article L. 52-15 du code électoral, a annulé sa décision du 24 septembre 2008 rejetant le compte de campagne de M. Jean-Paul A au titre des opérations électorales qui se sont déroulées les 9 et 16 mars 2008 en vue de la désignation du conseiller général du canton de Saint-Gilles-Croix-de-Vie (Vendée) ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code électoral ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Rousselle, Conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Catherine de Salins, Rapporteur public ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 52-12 du code électoral : Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection, hors celles de la campagne officielle par lui-même ou pour son compte, au cours de la période mentionnée à l'article L. 52-4. / (...) Chaque candidat ou candidat tête de liste présent au premier tour dépose à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques son compte de campagne et ses annexes (...) ; qu'aux termes de l'article L. 52-15 du même code : La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne (...)./ Lorsque la commission a constaté que le compte de campagne n'a pas été déposé dans le délai prescrit, si le compte a été rejeté ou si, le cas échéant après réformation, il fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales, la commission saisit le juge de l'élection (...) ; que l'article L. 118-3 de ce code dispose : Saisi par la commission instituée par l'article L. 52-14, le juge de l'élection peut déclarer inéligible pendant un an le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales. / Dans les autres cas, le juge de l'élection peut ne pas prononcer l'inéligibilité du candidat dont la bonne foi est établie (...) ;

Considérant que lorsque, après réformation ou rejet d'un compte, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques saisit le juge de l'élection, cette saisine n'a pas pour objet de faire annuler par le juge cette décision de rejet ; qu'elle tend seulement à ce que le juge de l'élection recherche s'il y a lieu ou non de prononcer l'inéligibilité du candidat et, dans l'affirmative, s'il s'agit d'un candidat proclamé élu, d'annuler son élection ou de le déclarer démissionnaire d'office ;

Considérant qu'en l'espèce, le tribunal administratif de Nantes, sur saisine de la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES lui transmettant, en application de l'article L. 52-15 du code électoral, sa décision du 24 septembre 2008 rejetant le compte de campagne de M. A, candidat à l'élection cantonale des 9 et 16 mars 2008 dans le canton de Saint-Gilles-Croix-de-Vie (Vendée), a jugé que c'était à tort que la commission avait prononcé un tel rejet ; que le tribunal en a déduit que la décision de la commission rejetant le compte de campagne de M. A devait être annulée ; que, toutefois, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'en procédant à cette annulation, les premiers juges ont excédé le champ de leur saisine et méconnu leur office ; que, par suite, la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la saisine par laquelle la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES a transmis au juge de l'élection le compte de campagne de M. A ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 52-4 du code électoral : Tout candidat à une élection désigne un mandataire au plus tard à la date à laquelle sa candidature est enregistrée. (...) / Le mandataire (...) règle les dépenses engagées en vue de l'élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise, à l'exception des dépenses prises en charge par un parti ou groupement politique. Les dépenses antérieures à sa désignation payées directement par le candidat ou à son profit font l'objet d'un remboursement par le mandataire et figurent dans son compte bancaire ou postal (...) ;

Considérant que si, par dérogation à la formalité substantielle que constitue l'obligation de recourir à un mandataire pour toute dépense effectuée en vue de la campagne, le règlement direct de menues dépenses par le candidat peut être admis, ce n'est qu'à la double condition que leur montant soit faible au regard du total des dépenses du compte de campagne et du plafond de dépenses autorisées fixé par l'article L. 52-11 du code électoral ; que, pour rejeter le compte de campagne de M. A, la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES a relevé que le candidat avait réglé directement 1 476 euros de dépenses, soit 14,5% de leur montant total et 6,3% du montant du plafond autorisé ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que trois des sept factures en cause, bien qu'établies au nom de M. A, ont, conformément aux dispositions de l'article L. 52-4, été réglées directement par son mandataire sur le compte bancaire ouvert à cet effet ; que, cependant, les quatre autres factures en cause, d'un montant total de 888,98 euros, ont été réglées par des proches de M. A postérieurement à la désignation du mandataire, ce qui constitue une méconnaissance des dispositions de l'article L. 52-4 du code électoral alors même que les sommes ainsi réglées ont fait ensuite l'objet d'un remboursement par le mandataire et figurent dans son compte bancaire retraçant les opérations financières du candidat ; que le montant de 888,98 euros correspond à 8,7% des dépenses électorales du candidat et 4% du plafond autorisé pour l'élection cantonale ; que de telles dépenses ne sauraient, dès lors, être qualifiées de menues dépenses ; que, par suite, c'est à bon droit que la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES a rejeté le compte de campagne de M. A et saisi le juge de l'élection ;

Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que les irrégularités commises par les proches de M. A ont été réalisées à l'insu de celui-ci qui n'a pas été en mesure de s'y opposer ni de les prévenir ; que dès lors, dans les circonstances de l'espèce, M. A est fondé à se prévaloir des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 118-3 du code électoral ; qu'il n'y a par suite pas lieu de le déclarer inéligible par application des dispositions du premier alinéa du même article ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 27 novembre 2008 est annulé.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de déclarer M. A inéligible en application de l'article L. 118-3 du code électoral.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Paul A, à la COMMISSION NATIONALE DES COMPTES DE CAMPAGNE ET DES FINANCEMENTS POLITIQUES (CNCCFP) et à la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 323438
Date de la décision : 19/06/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 2009, n° 323438
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vigouroux
Rapporteur ?: M. Olivier Rousselle

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:323438.20090619
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