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19/06/2009 | FRANCE | N°327115

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 19 juin 2009, 327115


Vu la requête, enregistrée le 15 avril 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Aga A, demeurant ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire en date du 1er décembre 2008 lui refusant un visa de long séjour en France en qualité de conjoint d'une ressortissante française ;

2°) d'enjoindr

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Vu la requête, enregistrée le 15 avril 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Aga A, demeurant ... ; M. A demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire en date du 1er décembre 2008 lui refusant un visa de long séjour en France en qualité de conjoint d'une ressortissante française ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire de réexaminer sa demande de visa dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'État, le versement de la somme de 1 500 euros au profit de son avocat, qui renoncerait, dans l'hypothèse d'une admission à cette aide, à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

il soutient que la condition d'urgence est remplie, eu égard aux délais anormalement longs, écoulés depuis son mariage et sa demande de visa, pendant lesquels il a été séparé de son épouse ; qu'il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée ; qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que les autorités administratives n'apportent pas la preuve de l'absence d'intention matrimoniale des époux, qui se connaissent depuis 2001 ; que le Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Lyon ne s'est pas opposé à leur mariage ; qu'il a cessé toute relation avec son ex-épouse en Turquie ; que l'absence de communauté de vie avec son épouse ne saurait être opposée par le ministre, cette absence résultant directement du refus du ministre de lui délivrer un titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française ; que la décision contestée porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect d'une vie privé et familiale normale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la décision dont la suspension est demandée ;

Vu la requête à fin d'annulation de la même décision ;

Vu la demande d'aide juridictionnelle, présentée devant le bureau d'aide juridictionnelle de Lyon, transmise au Conseil d'État le 4 mai 2009 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 juin 2009, présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la décision contestée n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation, dès lors que l'administration disposait d'un faisceau d'indices précis et concordants permettant de penser que le mariage du requérant a été contracté dans le seul but de régulariser sa situation administrative ; que le requérant n'est pas en mesure de justifier de l'existence d'une communauté de vie après le mariage avec son épouse ; que celle-ci ne s'est rendue qu'une seule fois en Turquie, en juin 2007, pour déposer la demande de visa ; qu'aucune preuve relative à d'autres séjours n'est apportée ; qu'il ne justifie pas non plus avoir de contacts réguliers avec son épouse depuis son retour en Turquie ; que les époux ne parlent pas la même langue ; qu'il n'y a pas de solidarité financière entre eux ; que la chronologie des événements démontre que le requérant a tenté de régulariser sa situation administrative en France par tous les moyens entre 2002 et 2007 ; qu'il s'est maintenu en France de manière irrégulière ; qu'il a déposé des demandes d'asile qui ont été rejetées ; qu'il est retourné dans son pays pour régulariser sa situation, alors qu'il a déposé en 2003 et 2004 des demandes d'asile faisant état de menaces pour sa vie dans son pays ; qu'il n'est pas séparé de son ex-épouse en Turquie et qu'il a reconstitué sa cellule familiale dans ce pays ; qu'eu égard à ces éléments, la condition d'urgence n'est pas remplie ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 11 juin 2009, présenté par M. A, qui reprend les conclusions de sa requête et produit des pièces complémentaires ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part M. Aga A, et, d'autre part, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 16 juin 2009 à 10 heures 30 au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Gatineau, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, avocat de M. Aga A ;

- la représentante du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a décidé de prolonger l'instruction jusqu'au jeudi 18 juin 2009 ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 17 juin 2009, présenté pour M. A, qui reprend les conclusions de sa requête et produit des nouvelles pièces ;

Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 17 juin 2009, présenté par le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, qui reprend les conclusions de son précédent mémoire ; il soutient que les nouvelles pièces produites ne permettent toujours pas de justifier de manière probante de l'existence d'une relation suivie et régulière entre les époux;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Considérant qu'en vertu de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, le juge des référés peut ordonner la suspension de l'exécution d'une décision administrative lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de cette décision ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A, ressortissant turc, entré en France en 2002, a épousé Mme Rebecca B, ressortissante française, le 12 mai 2007, après avoir divorcé le 12 décembre 2006 de son épouse, ressortissante turque, dont il avait eu cinq enfants ; qu'il s'est vu refuser, par une décision du ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire en date du 1er décembre 2008 le visa de long séjour en qualité de conjoint de Français qu'il sollicitait ; que M. A demande la suspension de cette décision ;

Considérant qu'eu égard à l'absence d'indices convaincants relatifs à une communauté de vie entre M. A et Mme B en France et au maintien de relations suivies après son départ de France, et compte tenu d'indices sérieux concernant le maintien d'une vie familiale entre M. A, son ancienne épouse et ses enfants, les moyens tirés d'une erreur manifeste d'appréciation quant à la réalité de l'intention matrimoniale et de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne paraissent pas, en l'état de l'instruction, de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu d'accorder à M. A le bénéfice de l'aide juridictionnelle, que sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de M. Aga A est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Aga A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 327115
Date de la décision : 19/06/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 2009, n° 327115
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Philippe Martin
Avocat(s) : SCP GATINEAU, FATTACCINI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:327115.20090619
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