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22/06/2009 | FRANCE | N°321991

France | France, Conseil d'État, 6ème sous-section jugeant seule, 22 juin 2009, 321991


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 octobre et 28 novembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Pierre A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 23 septembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Nice, d'une part, l'a déclaré inéligible aux fonctions de conseiller général pour une durée d'un an à compter de la date à laquelle ce jugement sera devenu définitif, et, d'autre part, a annulé son élection en tant que conseiller général du 6ème canton

de Nice ;

2°) d'annuler la décision du 2 juillet 2008 de la commission nat...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 octobre et 28 novembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Pierre A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 23 septembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Nice, d'une part, l'a déclaré inéligible aux fonctions de conseiller général pour une durée d'un an à compter de la date à laquelle ce jugement sera devenu définitif, et, d'autre part, a annulé son élection en tant que conseiller général du 6ème canton de Nice ;

2°) d'annuler la décision du 2 juillet 2008 de la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, au besoin de rectifier son compte de campagne, de le relever de la sanction de l'inéligibilité et de lui reconnaître le bénéfice de la bonne foi au titre, notamment, de l'article L. 118-3 du code électoral ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code électoral ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Richard Senghor, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, rapporteur public ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 52-4 du code électoral : Tout candidat à une élection désigne un mandataire au plus tard à la date laquelle sa candidature est enregistrée (...)/ Le mandataire recueille pendant l'année précédant le premier jour du mois de l'élection et jusqu'à la date du dépôt du compte de campagne du candidat, les fonds destinés au financement de la campagne. / Il règle les dépenses engagées en vue de l'élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise, à l'exception des dépenses prises en charge par un parti ou un groupement politique. Les dépenses antérieures à sa désignation payées directement par le candidat ou à son profit font l'objet d'un remboursement par le mandataire et figurent dans son compte bancaire ou postal (...) ; qu'en vertu de l'article L. 52-15 du même code, la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne et, si le compte a été rejeté, saisit le juge de l'élection ; qu'aux termes de l'article L. 118-3 du même code : Saisi par la commission instituée par l'article L. 52-4 le juge de l'élection peut déclarer inéligible pendant un an, le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales. / Dans les autres cas, le juge de l'élection peut ne pas prononcer l'inéligibilité du candidat dont la bonne foi est établie ou relever le candidat de cette inéligibilité ;

Considérant que, par une décision du 2 juillet 2008, la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de M. A, candidat élu à l'élection cantonale de Nice (6è canton), au motif qu'il avait réglé directement une part importante des dépenses de sa campagne sans recourir à son mandataire financier ; que, saisi par la commission en vertu des dispositions de l'article L. 52-15 du code électoral, le tribunal administratif de Nice a, par le jugement attaqué, déclaré M. A inéligible aux fonctions de conseiller général pour une durée d'un an et annulé son élection ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le tribunal administratif n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence en jugeant que, saisi par la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans les conditions ci-dessus rappelées, il lui appartenait seulement de se prononcer sur l'éligibilité de M. A, et le cas échéant d'annuler son élection, mais non d'annuler la décision de la commission établissant son compte de campagne ; que par suite le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté ces dernières conclusions comme irrecevables ;

Sur la régularité de la saisine de la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques :

Considérant d'une part, qu'il résulte de l'instruction que, par lettre du 2 juin 2008, la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rappelé à M A que le mandataire doit régler toutes les dépenses engagées en vue de l'élection et que le candidat ne peut être admis à régler directement certaines dépenses que si ces dernières restent d'un montant faible par rapport au montant total des dépenses engagées et négligeables par rapport au plafond réglementaire, et l'a invité à s'expliquer sur des dépenses exposées par lui directement sans répondre à ces conditions ; qu'ainsi le requérant, qui a d'ailleurs répondu à cette demande, n'est pas fondé à soutenir que la procédure contradictoire prévue par les dispositions de l'article L. 52-15 du code électoral n'aurait pas été respectée, alors même que la commission n'avait pas assorti sa demande d'explications d'un rappel explicite des sanctions encourues et qu'elle n'a pas accédé à sa demande d'être entendu pour présenter des observations orales ;

Considérant, d'autre part, que la circonstance que la commission a rejeté le recours gracieux formé par M. A le 25 juillet 2008 contre sa décision du 2 juillet précédent, au motif qu'ayant entre-temps saisi le juge de l'élection, elle se trouvait dessaisie du dossier, n'est, en tout état de cause, pas de nature à entacher d'irrégularité les conditions dans lesquelles elle a elle-même saisi le juge de l'élection ;

Sur le bien-fondé du rejet du compte de campagne de M. A :

Considérant que si, par dérogation à la formalité substantielle que constitue l'obligation de recourir à un mandataire pour toute dépense effectuée en vue de la campagne, le règlement direct de menues dépenses par le candidat peut être admis, ce n'est, comme l'a rappelé à bon droit la commission à M A, qu'à la double condition que leur montant soit faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et négligeable au regard du plafond de dépenses autorisées fixé par l'article L. 52-11 du code électoral ; qu'en l'espèce, il résulte de l'instruction que M. A a réglé lui-même directement, sans recourir à son mandataire, certaines dépenses de sa campagne pour un montant de 1721 euros, dont il n'y a pas lieu de retrancher 48,90 euros, payés alors que la désignation de son mandataire était faite, mais non encore enregistrée à la préfecture ; que cette somme représente 19% du total des dépenses électorales et 8,7 % du plafond des dépenses autorisé ; qu'ainsi, et quelle que soit la nature de ces dépenses, dont il n'est pas contesté qu'elles ont été exposées en vue de la campagne, c'est à bon droit que la commission nationale des comptes de campagne et des financement politiques a rejeté le compte de campagne de M. A et a saisi le juge de l'élection ;

Sur l'inéligibilité de M. A :

Considérant qu'il résulte des termes mêmes de l'article L. 118-3 du code électoral que, dans le cas où il y a lieu de rejeter le compte de campagne d'un candidat, le juge de l'élection ne peut s'abstenir de prononcer l'inéligibilité de celui-ci que si sa bonne foi est établie ; que, par suite, le moyen tiré par le requérant de ce que la sanction de l'inéligibilité aurait un caractère disproportionné est inopérant ; qu'en outre, eu égard à l'absence d'ambiguïté des dispositions méconnues par M. A et compte tenu de ce que les manquements en cause lui sont imputables, celui-ci n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 118-3 du code électoral ;

Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est, en tout état de cause, pas assorti de précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 23 septembre 2008, le tribunal administratif de Nice, saisi par la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, l'a déclaré inéligible en qualité de conseiller général pendant une période d'un an à compter de la date à laquelle sa décision deviendrait définitive, et a annulé son élection en tant que conseiller général du 6eme canton de Nice ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Pierre A et à la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

Copie en sera adressée à la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.


Synthèse
Formation : 6ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 321991
Date de la décision : 22/06/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 22 jui. 2009, n° 321991
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Schrameck
Rapporteur ?: M. Richard Senghor
Rapporteur public ?: M. Guyomar Mattias

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:321991.20090622
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