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24/06/2009 | FRANCE | N°307943

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 24 juin 2009, 307943


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 juillet et 26 octobre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Robert A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 21 mai 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 17 octobre 2005 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande de décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1994 ;

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°) réglant l'affaire au fond, de prononcer la décharge des impositions litigi...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 27 juillet et 26 octobre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Robert A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 21 mai 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 17 octobre 2005 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande de décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1994 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le premier protocole additionnel à cette convention ;

Vu le code de commerce, notamment son article L. 228-24 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Eliane Chemla, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Laurent Olléon, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de M. A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'une vérification de la comptabilité de la S.A. GERPRO portant sur les exercices clos les 31 décembre 1994 et 1995, l'administration fiscale a remis en cause la taxation au taux de 16 %, en tant que plus-value à long terme, du profit résultant pour M. A de la vente d'une partie des titres qu'il détenait dans cette société et a soumis le gain réalisé à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; que M. A, après avoir réclamé vainement, a saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande de décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à sa charge au titre de l'année 1994, que ce tribunal a rejetée, par un jugement du 17 octobre 2005 ; que M. A se pourvoit en cassation contre l'arrêt en date du 21 mai 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de ce jugement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'il n'appartient pas au juge de l'impôt, lorsqu'il n'est pas saisi d'une demande en ce sens, de substituer d'office au fondement retenu par l'administration pour établir l'imposition contestée une autre base légale sur laquelle le maintien ou le rétablissement de celle-ci serait fondé ; que pour justifier l'imposition des gains réalisés par M. A dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, l'administration fiscale s'est bornée à soutenir devant la cour administrative d'appel de Paris que cette imposition résultait de l'application combinée des dispositions du 2° du I de l'article 109 du code général des impôts et de celles de l'article 112 du même code ; que, par suite, en jugeant que les dispositions du b de l'article 111 du même code, en vertu desquelles sont notamment considérées comme revenus distribués les sommes ou valeurs attribuées aux porteurs de parts bénéficiaires ou de fondateurs au titre de rachat de ces parts, qui n'avaient pas été invoquées par l'administration fiscale, justifiaient l'imposition des gains réalisés par M. A à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, la cour administrative d'appel a excédé les limites de sa compétence ; que, dès lors, M. A est fondé à demander l'annulation de son arrêt ;

Considérant qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 821-2 et de régler l'affaire au fond ;

Considérant qu'aux termes de l'article 160 du code général des impôts, en vigueur pour l'année d'imposition en litige : I. Lorsqu'un associé, actionnaire, commanditaire ou porteur de parts bénéficiaires cède à un tiers, pendant la durée de la société, tout ou partie de ses droits sociaux, l'excédent du prix de cession sur le prix d'acquisition - ou la valeur au 1er janvier 1949, si elle est supérieure - de ces droits est taxé exclusivement à l'impôt sur le revenu au taux de 16 % ; qu'aux termes de l'article 161 du même code, alors applicable : Le boni attribué lors de la liquidation d'une société aux titulaires de droits sociaux en sus de leur apport n'est compris, le cas échéant, dans les bases de l'impôt sur le revenu que jusqu'à concurrence de l'excédent du remboursement des droits sociaux annulés sur le prix d'acquisition de ces droits dans le cas où ce dernier est supérieur au montant de l'apport. La même règle est applicable dans le cas où la société rachète au cours de son existence les droits de certains associés, actionnaires ou porteurs de parts bénéficiaires ; qu'il résulte de ces dernières dispositions que, lorsqu'une société rachète, au cours de son existence, à certains de ses associés ou actionnaires personnes physiques, les droits sociaux qu'ils détiennent, notamment sous forme d'actions, l'excédent éventuel du remboursement des droits sociaux annulés sur le prix d'acquisition de ceux-ci, dans la mesure où ce prix d'acquisition est supérieur au montant de l'apport remboursable en franchise d'impôt, constitue, sauf dans les hypothèses particulières où le législateur en aurait disposé autrement, non un gain net en capital relevant du régime d'imposition des plus-values de cession, mais un boni de cession qui a la même nature qu'un boni de liquidation, imposable à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

Considérant que la SA GERPRO a racheté à M. A des droits sociaux que celui-ci détenait, avant de les annuler ; que si M. A fait valoir que l'acquisition des droits par la société est consécutive à un refus d'agrément par celle-ci, en application des dispositions de l'article L. 228-24 du code de commerce alors applicable, issues de l'article 275 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, du cessionnaire auquel il avait formé le projet de céder ses droits, et que, dans ce cas de cession à un tiers, l'excédent du remboursement aurait été soumis à la taxation des plus-values à long terme prévue à l'article 160 précité du code général des impôts, cette circonstance, pour laquelle le législateur n'a pas prévu de dispositions particulières, n'est pas de nature à donner à l'excédent du remboursement de ses droits sociaux le caractère d'un gain net en capital, imposable comme une plus-value à long terme ; que, dès lors, cet excédent constitue, dans les conditions prévues par les dispositions précitées, un boni de cession imposable à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus des capitaux mobiliers ; que les contribuables cédant les droits sociaux à un tiers et ceux les cédant à la société elle-même n'étant pas dans la même situation, M. A n'est pas fondé à soutenir qu'il subit, du fait de la différence des régimes d'imposition applicables, une discrimination contraire aux stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er de son premier protocole additionnel ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 17 octobre 2005, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente affaire, la somme que demande M. A, au titre des frais engagés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 21 mai 2007 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.

Article 2 : Les conclusions de la requête d'appel de M. A ainsi que celles présentées devant le Conseil d'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Robert A et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 307943
Date de la décision : 24/06/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 24 jui. 2009, n° 307943
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vigouroux
Rapporteur ?: Mme Eliane Chemla
Rapporteur public ?: M. Olléon Laurent
Avocat(s) : SCP DE CHAISEMARTIN, COURJON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:307943.20090624
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