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01/07/2009 | FRANCE | N°287321

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 01 juillet 2009, 287321


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 novembre 2005 et 17 mars 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Philip A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 15 septembre 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 4 décembre 2003 du tribunal administratif de Lille rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle, auxquelles il a été assujetti au

titre des années 1997 et 1998 et, d'autre part, à la décharge demandée...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 novembre 2005 et 17 mars 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Philip A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 15 septembre 2005 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 4 décembre 2003 du tribunal administratif de Lille rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle, auxquelles il a été assujetti au titre des années 1997 et 1998 et, d'autre part, à la décharge demandée ;

2°) réglant l'affaire au fond, de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Florian Blazy, Auditeur,

- les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Pierre Collin, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de M. A ;

Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 1476 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : Pour les sociétés civiles professionnelles, les sociétés civiles de moyens et les groupements réunissant des membres de professions libérales, l'imposition est établie au nom de chacun des membres. Toutefois, ces dispositions ne s'appliquent pas aux sociétés civiles professionnelles, à compter de l'année qui suit celle où elles sont, pour la première fois, assujetties à l'impôt sur les sociétés ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société civile professionnelle d'avocats Triplet et Associés, dont M. A est associé, n'a pas opté pour l'impôt sur les sociétés ; qu'en vertu de l'article 1476 du code général des impôts, M. A a été assujetti à titre personnel à la taxe professionnelle au titre des années 1997 et 1998 ; qu'eu égard à la tolérance prévue par l'instruction 6 E-331 du 1er juin 1995 dispensant de souscription d'une déclaration annuelle de taxe professionnelle certains contribuables, notamment les titulaires de bénéfices non commerciaux s'ils exercent leur activité professionnelle dans une seule commune et s'ils emploient moins de cinq salariés, M. A n'a pas souscrit de déclaration au titre de cet impôt ; que l'administration fiscale, exerçant son droit de reprise afin de déterminer la base imposable à partir des immobilisations corporelles et du dixième des recettes imposables, et non pas des immobilisations et de la masse salariale comme déterminée initialement, a adressé au contribuable des avis d'impositions supplémentaires en date du 31 décembre 2000 pour 1997 et du 31 décembre 2001 pour 1998 ; que M. A se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 15 septembre 2005 de la cour administrative d'appel de Douai rejetant sa requête tendant à l'annulation du jugement du 4 décembre 2003 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles il a été assujetti au titre des années 1997 et 1998 ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 174 du livre des procédures fiscales : Les omissions ou les erreurs concernant la taxe professionnelle peuvent être réparées par l'administration jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due (...) ; que le cours du délai de prescription est interrompu par la mise en recouvrement de l'imposition, la date de cette mise en recouvrement s'entendant de celle spécifiée dans la décision homologuant le rôle dans laquelle elle est comprise ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les décisions portant homologation des rôles en vertu desquels ont été mises en recouvrement les cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles M. A a été assujetti, au titre des années 1997 et 1998, ont été prises respectivement les 26 décembre 2000 et 14 décembre 2001, et ont fixé aux 31 décembre 2000 et 2001 les dates de mise en recouvrement de ces cotisations ; que, par suite, en en déduisant que la mise en recouvrement était intervenue avant l'expiration du délai de reprise imparti à l'administration fiscale, et en jugeant sans incidence la circonstance, à la supposer même établie, que les avis d'impositions supplémentaires, qui ont été reçus les 8 janvier 2001 et 14 janvier 2002, aient été expédiés après la date de mise en recouvrement, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt, n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en deuxième lieu, que, lorsqu'une imposition est, telle la taxe professionnelle, assise sur la base d'éléments qui doivent être déclarés par le redevable, l'administration ne peut établir, à la charge de celui-ci, des droits excédant le montant de ceux qui résulteraient des éléments qu'il a déclarés qu'après l'avoir, conformément au principe général des droits de la défense, mis à même de présenter ses observations ; que les dispositions de l'article L. 56 du livre des procédures fiscales, en vertu desquelles la procédure de redressement contradictoire prévue par les articles L. 55 à L. 61 de ce livre n'est pas applicable en matière d'impositions directes perçues au profit des collectivités locales, ont pour seul effet d'écarter cette procédure de redressement contradictoire mais ne dispensent pas du respect, en ce qui concerne la taxe professionnelle, des obligations qui découlent du principe général des droits de la défense ; que, toutefois, dans le cas d'une personne qui, dispensée par l'administration de la souscription d'une déclaration annuelle spécifique de taxe professionnelle, a fait usage de cette dispense et ne conteste pas son statut de redevable de la taxe, l'administration n'est pas tenue à l'obligation de mettre le contribuable à même de présenter ses observations dès lors qu'elle assoit la cotisation litigieuse en se bornant à utiliser des éléments déclarés par lui à un autre titre, en l'espèce dans une déclaration de bénéfices non commerciaux, compte tenu de ce que les recettes servant de base à la taxe litigieuse s'entendent de celles retenues pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, en vertu des dispositions combinées des articles 310 HC et 310 HE de l'annexe II au code général des impôts ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles M. A a été assujetti au titre des années 1997 et 1998 procèdent de ce que l'administration fiscale, exerçant son droit de reprise prévu à l'article L. 174 précité du livre des procédures fiscales, a déterminé la base de taxe professionnelle, en application des dispositions de l'article 1467 du code général des impôts, à partir des immobilisations corporelles et du dixième des recettes imposables, en utilisant à cette fin, sans les rehausser, les bases déclarées par le contribuable au titre de l'impôt sur le revenu pour les années 1995 et 1996 ; que, par suite, en se fondant sur les circonstances que M. A ne contestait ni sa qualité de redevable de la taxe en litige, ni le fait qu'il se trouvait dans le cas où l'administration dispense de déclaration de taxe professionnelle les titulaires de bénéfices non commerciaux exerçant dans une seule commune et employant moins de cinq salariés, pour juger que les cotisations de taxe professionnelle litigieuses avaient pu régulièrement être établies par l'administration, sur la base des recettes par ailleurs déclarées pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, sans que M. A en ait, préalablement, été avisé, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant, en troisième et dernier lieu, que les stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ne s'opposent pas à ce que des dispositions différentes s'appliquent à des personnes placées dans des situations différentes ; que l'option éventuelle pour l'impôt sur les sociétés, si elle crée une différence d'imposition entre personnes exerçant leur activité dans le cadre de sociétés civiles professionnelles distinctes, est librement décidée par les associés et, de ce fait, résulte d'une décision qui leur est opposable ; que, par suite, en jugeant, pour ce motif, qu'en tout état de cause, les dispositions du 2° de l'article 1467 n'étaient pas incompatibles avec les stipulations combinées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. A est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Philip A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 01 jui. 2009, n° 287321
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Florian Blazy
Rapporteur public ?: M. Collin Pierre
Avocat(s) : SCP GATINEAU, FATTACCINI

Origine de la décision
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Date de la décision : 01/07/2009
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 287321
Numéro NOR : CETATEXT000020829684 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2009-07-01;287321 ?
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