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10/07/2009 | FRANCE | N°327514

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 10 juillet 2009, 327514


Vu la requête, enregistrée le 29 avril 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentée pour le B dont le siège est ..., représenté par le président de son directoire ; le B demande au juge des référés du Conseil d'État :

1°) d'enjoindre à M. Jérôme A, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, de lui verser la somme de 100 000 euros qu'il a été condamné à payer à titre de sanction pécuniaire par la décision de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers en date du 19 octobre 2006 ;

2°)

de mettre à la charge de M. Jérôme A le versement de la somme de 4 000 euros au titre ...

Vu la requête, enregistrée le 29 avril 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, présentée pour le B dont le siège est ..., représenté par le président de son directoire ; le B demande au juge des référés du Conseil d'État :

1°) d'enjoindre à M. Jérôme A, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, de lui verser la somme de 100 000 euros qu'il a été condamné à payer à titre de sanction pécuniaire par la décision de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers en date du 19 octobre 2006 ;

2°) de mettre à la charge de M. Jérôme A le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que M. Jérôme A a été condamné, par une décision de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers en date du 19 octobre 2006, à payer à titre de sanction pécuniaire une somme de 100 000 euros ; que M. A s'est abstenu de régler cette somme ; que deux lettres de mise en demeure lui ont été adressées, les 12 septembre 2008 et 18 mars 2009 ; que le recours qu'a formé M. A contre la décision de sanction a été rejeté par le Conseil d'État par une décision du 16 janvier 2008 ; qu'il a intérêt à agir devant les juge des référés, en qualité de bénéficiaire désigné par la loi du produit des sanctions pécuniaires prononcées par la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers et en l'absence de versement spontané par M. A du montant de la sanction à laquelle il a été condamné ; que la mesure demandée ne met en jeu aucune question de fond ; que la condition d'urgence est remplie, en considération du comportement dilatoire de M. A et de la crainte qu'il organise son insolvabilité afin de se soustraire au paiement de la sanction prononcée à son encontre ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 juin 2009, présenté par M. Jérôme A, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge du B au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient qu'il n'a jamais reçu notification de la décision du Conseil d'État du 16 janvier 2008 rejetant son recours contre la décision de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers en date du 19 octobre 2006 ; qu'il a reçu un courrier du Conseil d'État lui communiquant une décision qui ne le concernait pas personnellement ; que la mention de la décision du Conseil d'État sur le site internet de l'Autorité des marchés financiers n'est pas un mode de notification valable au regard des dispositions du code de justice administrative ; que la procédure de notification doit être reprise et réalisée ; que la condition d'urgence n'est pas remplie, dès lors que le B n'apporte aucune preuve tangible d'un début d'organisation d'insolvabilité ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code monétaire et financier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part le représentant du B et, d'autre part, M. A ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 30 juin 2009 à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Ohl, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, avocat du B ;

- M. A ;

Considérant que le B, personne morale de droit privé instituée par la loi du 25 juin 1999, demande au juge des référés du Conseil d'État, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, de faire injonction à M. Jérôme A de lui verser la somme de 100 000 euros correspondant à la sanction pécuniaire qui lui a été infligée par une décision de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers en date du 19 octobre 2006 ; qu'en effet, le III de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce, prévoit que les sommes correspondant aux sanctions pécuniaires prononcées par la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers sont versées au fonds de garantie auquel est affiliée la personne morale sous l'autorité ou pour le compte de qui agit la personne sanctionnée ou, à défaut, au Trésor public ; qu'il n'est pas contesté que la société CIC Securities, prestataire de services d'investissement, au sein de laquelle M. A exerçait les fonctions de responsable des activités d'arbitrage pour compte propre, était affiliée au B ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-3 du code de justice administrative : En cas d'urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l'absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative ;

Considérant, d'une part, que par une décision du 19 octobre 2006, la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a notamment infligé à M. Jérôme A une sanction pécuniaire de 100 000 euros ; qu'à la suite de cette décision, M. A n'a pas procédé au versement de cette somme au B malgré deux lettres de mise en demeure ; que, contrairement à ce que soutient M. A, le recours qu'il a formé devant le Conseil d'Etat contre la décision du 19 octobre 2006 n'avait pas un caractère suspensif ; qu'il n'a pas demandé au juge des référés du Conseil d'Etat la suspension de l'exécution de cette décision sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative ; que si M. A fait valoir que le secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat lui aurait adressé, dans l'enveloppe de notification, une autre décision que celle du 16 janvier 2008, rejetant son recours, cette circonstance est sans incidence sur son obligation de payer ; que M. A s'est abstenu de signaler au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat l'erreur dont il se prévaut ; qu'ainsi, eu égard au comportement dilatoire de M. A et au risque qu'il organise son insolvabilité, la condition d'urgence doit être regardée comme remplie ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce, qu'il appartient au B de procéder au recouvrement de la somme à laquelle M. A a été condamné ; qu'en l'absence de dispositions législatives ou réglementaires lui permettant de poursuivre l'exécution forcée du paiement de ces sanctions, le B, personne morale de droit privé chargée de la mission de service public de recouvrer les sanctions prononcées par le Conseil des marchés financiers, peut demander au juge des référés du Conseil d'État, compétent en premier et dernier ressort pour connaître d'une demande qui se rattache à l'exécution d'une décision relevant de la compétence directe du Conseil d'État, de prendre une décision, revêtue de la formule exécutoire, ordonnant à la personne qui a fait l'objet d'une sanction pécuniaire par la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers, le versement des sommes dues ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, de faire droit à la demande du B ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par le B et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce que le B qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à M. A la somme que celui-ci demande au même titre;

O R D O N N E :

------------------

Article 1er : Il est enjoint à M. Jérôme A de verser au B la somme de 100 000 euros qu'il a été condamné à payer à titre de sanction pécuniaire par la décision de la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers en date du 19 octobre 2006.

Article 2 : M. A versera au B une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de M. A tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au B et à M. Jérôme A.

Copie en sera adressée pour information à l'Autorité des marchés financiers et à la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 10 jui. 2009, n° 327514
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: M. Philippe Martin
Avocat(s) : SCP VINCENT, OHL

Origine de la décision
Formation : Juge des référés
Date de la décision : 10/07/2009
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 327514
Numéro NOR : CETATEXT000020936358 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2009-07-10;327514 ?
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