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21/07/2009 | FRANCE | N°324809

France | France, Conseil d'État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 21 juillet 2009, 324809


Vu, enregistré le 5 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le jugement du 2 février 2009 par lequel le tribunal administratif de Versailles, avant de statuer sur la demande présentée par Mme Mariama A, demeurant ... relative à la décision du 30 janvier 2008 de la commission de médiation de l'Essonne réorientant sa demande de logement vers une offre d'hébergement, a décidé, par application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmette le dossier au Conseil d'Etat en soumettant à son examen les questions suivantes :r>
" 1°) dans le cadre du recours contentieux spécifique institu...

Vu, enregistré le 5 février 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le jugement du 2 février 2009 par lequel le tribunal administratif de Versailles, avant de statuer sur la demande présentée par Mme Mariama A, demeurant ... relative à la décision du 30 janvier 2008 de la commission de médiation de l'Essonne réorientant sa demande de logement vers une offre d'hébergement, a décidé, par application des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, de transmette le dossier au Conseil d'Etat en soumettant à son examen les questions suivantes :

" 1°) dans le cadre du recours contentieux spécifique institué par l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation en faveur des personnes qui se prévalent d'un droit au logement opposable, les conclusions reconventionnelles du préfet tendant à l'annulation de la décision de la commission départementale de médiation conférant au demandeur un droit à bénéficier d'une offre de logement ou d'une offre d'hébergement sont-elles recevables'

2°) le préfet peut-il, au soutien de conclusions tendant au rejet d'un recours contentieux présenté dans les conditions prévues par l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation, invoquer, par voie d'exception, et dans les conditions de droit commun, l'illégalité de la décision de la commission départementale de médiation conférant au demandeur un droit à bénéficier d'une offre de logement ou d'une offre d'hébergement' "

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de justice administrative, notamment son article L. 113-1 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Bethânia Gaschet, Auditeur,

- les conclusions de M. Yves Struillou, rapporteur public ;

REND L'AVIS SUIVANT :

Aux termes des dispositions de l'article L. 113-1 du code de justice administrative : "Avant de statuer sur une requête soulevant une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel peut, par une décision qui n'est susceptible d'aucun recours, transmettre le dossier de l'affaire au Conseil d'Etat, qui examine dans un délai de trois mois la question soulevée. Il est sursis à toute décision au fond jusqu'à un avis du Conseil d'Etat ou, à défaut, jusqu'à l'expiration de ce délai" ;

L'article L. 441-2-3 du code de la construction et de l'habitation dispose que : " (...) / II. - (...) / Dans un délai fixé par décret, la commission de médiation désigne les demandeurs qu'elle reconnaît prioritaires et auxquels un logement doit être attribué en urgence. Elle détermine pour chaque demandeur, en tenant compte de ses besoins et de ses capacités, les caractéristiques de ce logement, ainsi que, le cas échéant, les mesures de diagnostic ou d'accompagnement social nécessaires. Elle notifie par écrit au demandeur sa décision qui doit être motivée. (...) / La commission de médiation transmet au représentant de l'Etat dans le département la liste des demandeurs auxquels doit être attribué en urgence un logement / (...) Le représentant de l'Etat dans le département désigne chaque demandeur à un organisme bailleur disposant de logements correspondant à la demande (...) / En cas de refus de l'organisme de loger le demandeur, le représentant de l'Etat dans le département qui l'a désigné procède à l'attribution d'un logement correspondant aux besoins et aux capacités du demandeur sur ses droits de réservation. (...) / III. - La commission de médiation peut également être saisie, sans condition de délai, par toute personne qui, sollicitant l'accueil dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale, n'a reçu aucune proposition adaptée en réponse à sa demande. La commission de médiation transmet au représentant de l'Etat dans le département la liste des demandeurs pour lesquels doit être prévu un tel accueil (...) / Dans un délai fixé par décret, le représentant de l'Etat dans le département propose une place dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale aux personnes désignées par la commission de médiation. (...) " L'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation dispose que : " I - Le demandeur qui a été reconnu par la commission de médiation comme prioritaire et comme devant être logé d'urgence et qui n'a pas reçu, dans un délai fixé par décret, une offre de logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités peut introduire un recours devant la juridiction administrative tendant à ce que soit ordonné son logement ou son relogement. (...) Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne statue en urgence, dans un délai de deux mois à compter de sa saisine. (...) Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne, lorsqu'il constate que la demande a été reconnue comme prioritaire par la commission de médiation et doit être satisfaite d'urgence et que n'a pas été offert au demandeur un logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités, ordonne le logement ou le relogement de celui-ci par l'Etat et peut assortir son injonction d'une astreinte. (...) / II. - Le demandeur qui a été reconnu par la commission de médiation comme prioritaire et comme devant être accueilli dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale et qui n'a pas été accueilli, dans un délai fixé par décret, dans l'une de ces structures peut introduire un recours devant la juridiction administrative tendant à ce que soit ordonné son accueil dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale. (...) Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne statue en urgence, dans un délai de deux mois à compter de sa saisine. (...) Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il désigne, lorsqu'il constate que la demande a été reconnue prioritaire par la commission de médiation et que n'a pas été proposée au demandeur une place dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale, ordonne l'accueil dans l'une de ces structures et peut assortir son injonction d'une astreinte. (...) "

Il résulte de ces dispositions qu'eu égard à la nature de son office, il n'appartient pas au juge saisi en vertu des dispositions de l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation d'apprécier la légalité des décisions des commissions départementales de médiation, tant à la demande de l'administration qu'à celle du demandeur de logement ou d'hébergement. Il doit s'assurer, en revanche, avant d'ordonner le logement, le relogement ou l'hébergement de l'intéressé :

- dans le cas d'une décision de la commission départementale de médiation reconnaissant un droit à un hébergement : que la demande de l'intéressé a été reconnue comme prioritaire par la commission et que ne lui a pas été proposée une place dans une structure d'hébergement, un établissement ou logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale :

- dans le cas d'une décision de la commission départementale de médiation reconnaissant un droit à un logement : que la demande de l'intéressé a été reconnue comme prioritaire et devant être satisfaite d'urgence par la commission et que ne lui a pas été offert un logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités définis par la commission.

Toutefois, il n'y a pas matière à ordonner le logement, le relogement ou l'hébergement de l'intéressé lorsque l'administration apporte la preuve que l'urgence a complètement disparu.

Il résulte de ce qui précède que le représentant de l'Etat dans le département ne peut utilement, dans le cadre d'un recours exercé par un demandeur de logement ou d'hébergement en vertu de l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation, ni demander l'annulation, par la voie d'une demande reconventionnelle, ni exciper de l'illégalité de la décision de la commission départementale de médiation, qui présente par ailleurs le caractère de décision créatrice de droit, faisant grief, contre laquelle il est possible au représentant de l'Etat, s'il s'y croit fondé, d'exercer un recours tendant à son annulation, et, le cas échéant, à sa suspension ;

Le présent avis sera notifié au tribunal administratif de Versailles, à Mme Mariama A et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

38-07-01 LOGEMENT. - DROIT AU LOGEMENT OPPOSABLE - DÉCISION DE LA COMMISSION DE MÉDIATION SUR UNE DEMANDE DE LOGEMENT OU D'HÉBERGEMENT - 1) DÉCISION FAISANT GRIEF - CONSÉQUENCE - OUVERTURE DES RECOURS EN ANNULATION ET EN SUSPENSION DE DROIT COMMUN - 2) OFFICE DU JUGE DU DROIT AU LOGEMENT OPPOSABLE (ART. L. 441-2-3-1 DU CODE DE LA CONSTRUCTION ET DE L'HABITATION) - A) POSSIBILITÉ D'APPRÉCIER LA LÉGALITÉ DE LA DÉCISION DE LA COMMISSION DE MÉDIATION, PAR VOIE D'ACTION OU D'EXCEPTION - ABSENCE - B) ETENDUE DE SON OFFICE.

38-07-01 1) La décision d'une commission départementale de médiation statuant sur le droit d'un demandeur de logement ou d'hébergement, qui présente le caractère de décision créatrice de droits, fait grief. Il est ainsi possible au représentant de l'Etat d'exercer un recours tendant à son annulation, et, le cas échéant, à sa suspension, selon les règles du droit commun.... ...2) a) Eu égard à la nature de son office, il n'appartient pas au juge du droit au logement opposable, saisi en vertu des dispositions de l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation, d'apprécier la légalité des décisions des commissions départementales de médiation, tant à la demande de l'administration qu'à celle du demandeur de logement ou d'hébergement. Par conséquent, le représentant de l'Etat dans le département ne peut utilement, dans le cadre d'un recours exercé par un demandeur de logement ou d'hébergement devant le juge du droit au logement opposable, ni demander l'annulation, par la voie d'une demande reconventionnelle, ni exciper de l'illégalité de la décision de la commission départementale.... ...b) Dans le cadre de son office, le juge du droit au logement opposable, saisi en vertu des dispositions de l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation, doit s'assurer, avant d'ordonner le logement, le relogement ou l'hébergement de l'intéressé :,,- s'agissant du droit à un hébergement, que la demande de l'intéressé a été reconnue comme prioritaire et qu'une place adaptée ne lui a pas été proposée ;,,- s'agissant du droit à un logement, que la demande de l'intéressé a été reconnue comme prioritaire et urgente et qu'un logement tenant compte de ses besoins et de ses capacités ne lui a pas été proposé ;,,- dans les deux cas, que l'administration n'apporte pas la preuve que l'urgence a disparu, ce qui ferait obstacle à ce que le logement, le relogement ou l'hébergement soit ordonné.


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 21 jui. 2009, n° 324809
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Bethânia Gaschet
Rapporteur public ?: M. Struillou Yves

Origine de la décision
Formation : 4ème et 5ème sous-sections réunies
Date de la décision : 21/07/2009
Date de l'import : 23/03/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 324809
Numéro NOR : CETATEXT000021646735 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2009-07-21;324809 ?
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