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24/07/2009 | FRANCE | N°249681

France | France, Conseil d'État, 10ème sous-section jugeant seule, 24 juillet 2009, 249681


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 août et 12 décembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Thierry B, demeurant ... ; M. et Mme B demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 23 avril 2002 de la cour administrative d'appel de Nantes en tant qu'après avoir annulé le jugement du 30 août 1999 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant notamment à l'annulation de la décision du 12 mars 1996 du maire de Noyant-la-Gravoyère (Maine-et-Loire) leur délivra

nt un certificat d'urbanisme négatif pour la construction d'un bâtiment...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 août et 12 décembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Thierry B, demeurant ... ; M. et Mme B demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 23 avril 2002 de la cour administrative d'appel de Nantes en tant qu'après avoir annulé le jugement du 30 août 1999 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant notamment à l'annulation de la décision du 12 mars 1996 du maire de Noyant-la-Gravoyère (Maine-et-Loire) leur délivrant un certificat d'urbanisme négatif pour la construction d'un bâtiment à usage d'internat sur un terrain sis Château de la Roche et cadastré à la section AB sous le n° 100, il a rejeté cette demande et le surplus des conclusions de leur requête, y compris des demandes d'indemnisation de leurs préjudices financier, économique et moral et a mis à leur charge le versement de la somme de 1 000 euros à la commune de Noyant-la-Gravoyère au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Noyant-la-Gravoyère le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu les notes en délibéré, enregistrées les 3 et 8 avril 2009, présentées pour M. et Mme B ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Gilles Pellissier, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Tiffreau, avocat de M. et Mme Thierry B et de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la commune de Noyant-la-Gravoyère,

- les conclusions de M. Julien Boucher, Rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Tiffreau, avocat de M. et Mme Thierry B et à la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de la commune de Noyant-la-Gravoyère ;

Sur les conclusions dirigées contre les décisions de refus de modification du plan d'occupation des sols :

Considérant que lorsqu'un tribunal administratif est saisi de conclusions qui ne sont pas suffisamment liées entre elles, il doit inviter le requérant à régulariser son pourvoi par la présentation de requêtes distinctes ; que l'irrecevabilité des conclusions qui ne sont pas suffisamment liées avec celles qui sont les premières énoncées dans la requête ne peut être prononcée que dans le cas où le requérant s'est abstenu de donner suite à cette invitation dans le délai que la juridiction saisie lui a imparti à cet effet ;

Considérant qu'après avoir annulé le jugement du 30 août 1999 par lequel le tribunal administratif de Nantes avait rejeté les demandes de M. et Mme B, la cour administrative d'appel de Nantes a jugé irrecevables les conclusions, enregistrées au greffe du tribunal administratif les 13 janvier et 30 juin 1999, tendant à l'annulation des décisions de rejet des demandes adressées par M. et Mme B au maire de la commune les 26 mars et 26 juin 2007 et les 15 et 24 juillet 2008 en vue d'obtenir la modification du zonage du plan d'occupation des sols de la commune, au motif qu'elles constituaient des conclusions distinctes des conclusions initiales, tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme négatif qui lui avait été délivré le 12 mars 1996 ; que la cour ne pouvait déclarer irrecevables ces conclusions qu'après avoir invité les demandeurs à régulariser leurs recours dans les conditions ci-dessus indiquées ; qu'en l'absence d'une telle procédure, l'arrêt attaqué doit être annulé en tant qu'il a rejeté comme irrecevables les conclusions sus-analysées ;

Sur les conclusions dirigées contre le certificat d'urbanisme :

Considérant, d'une part, qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, dans leur rédaction alors en vigueur : Le certificat d'urbanisme indique, en fonction du motif de la demande, si, compte tenu des dispositions d'urbanisme et des limitations administratives au droit de propriété applicables à un terrain, ainsi que de l'état des équipements publics existants ou prévus, et sous réserve de l'application éventuelle des dispositions législatives et réglementaires relatives aux zones d'aménagement concerté, ledit terrain peut : a) Etre affecté à la construction ; b) Etre utilisé pour la réalisation d'une opération déterminée (...) / Lorsque toute demande d'autorisation pourrait, du seul fait de la localisation du terrain, être refusée en fonction des dispositions d'urbanisme, et notamment des règles générales d'urbanisme, la réponse à la demande de certificat d'urbanisme est négative ;

Considérant, d'autre part, que les dispositions conjuguées des articles ND 1 et ND 2 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Noyant-la-Gravoyère, applicables à la date de la décision contestée, définissaient la zone ND comme étant inconstructible sauf, pour le secteur NDd notamment, en ce qui concerne l'extension des habitations existantes, la réfection et l'extension mesurée des constructions existantes, les constructions liées aux activités sociales, touristiques et sportives et les constructions nouvelles à usage d'habitation sous réserve qu'elles soient liées à des fonctions de surveillance ou de gardiennage des constructions et installations autorisées dans ce secteur ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la demande de certificat d'urbanisme présentée par M. et Mme B avait pour objet la réalisation d'une opération déterminée consistant en l'extension d'un immeuble existant par adjonction d'un bâtiment sur une parcelle située en zone NDd du plan d'occupation des sols de la commune de Noyant-la-Gravoyère ; que, dès lors que le demandeur prétendait au bénéfice de l'une des exceptions mentionnées aux articles ND 1 et 2 du règlement du plan d'occupation des sols, la cour, en estimant, pour écarter comme inopérants les moyens dirigés contre le certificat d'urbanisme négatif, que, du seul fait de la localisation du terrain, le préfet était tenu de délivrer un certificat d'urbanisme négatif, a entaché son arrêt d'erreur de droit ; qu'il y a lieu, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, d'annuler l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 23 avril 2002 en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. et Mme B dirigées contre le certificat d'urbanisme négatif qui leur a été délivré le 12 mars 1996 ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au fond ;

Sur les conclusions dirigées contre les décisions de refus de modification du plan d'occupation des sols :

Considérant en premier lieu que la commune, qui n'était pas liée, pour déterminer au sein du plan d'occupation des sols, l'affectation des différents secteurs des zones qu'elle institue, par les modalités existantes d'utilisation des terrains ni par le zonage dont ils faisaient antérieurement l'objet, a pu sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, classer en zone naturelle non constructible la parcelle des requérants, qui, si elle est située en limite de la zone urbanisée de la commune, est comprise dans un vaste espace naturel ;

Considérant en deuxième lieu que la circonstance que le règlement du plan d'occupation des sols classe en zone non constructible une parcelle supportant une construction utilisée à des fins d'enseignement ne saurait, par elle-même et du seul fait qu'elle pourrait faire obstacle à des extensions futures du bâtiment, constituer une atteinte à la liberté d'enseignement ;

Considérant en dernier lieu que la définition de la zone NDd étant justifiée par des motifs d'urbanisme, les requérants ne sont en tout état de cause pas fondés à soutenir qu'elle n'aurait été décidée que pour faire obstacle à l'extension de l'établissement d'enseignement privé qu'il dirige ; qu'ainsi, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

Sur les conclusions dirigées contre le certificat d'urbanisme :

En ce qui concerne les moyens tirés de l'illégalité des plans d'occupation des sols antérieurs et postérieurs à celui en vigueur à la date du certificat d'urbanisme :

Considérant que l'illégalité alléguée du plan d'occupation des sols en vigueur avant celui opposable à la décision attaquée, ou de celui adopté postérieurement, est sans aucune incidence sur la légalité du certificat contesté ; que les moyens dirigés contre ces documents sont inopérants et ne peuvent, par suite, qu'être écartés ;

En ce qui concerne la légalité du plan d'occupation des sols en vigueur lors de la délivrance du certificat d'urbanisme contesté :

Considérant d'une part et en tout état de cause, que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le rapport de présentation comporte une étude suffisante de l'impact sur l'environnement des modifications apportées au plan d'occupation des sols de la commune ; que le moyen tiré de ce qu'il ne préciserait pas les conditions de compatibilité avec le schéma directeur applicable est dépourvu de précisions permettant d'en apprécier le bien fondé ;

Considérant d'autre part qu'ainsi qu'il a été dit, le classement des terrains des requérants en zone NDd n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ni ne porte atteinte à la liberté de l'enseignement ;

En ce qui concerne les autres moyens :

Considérant en premier lieu qu'il ressort des pièces du dossier que les dispositions des articles ND 1 et ND 2 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Noyant-la-Gravoyère, dans leur rédaction en vigueur lors de la délivrance du certificat d'urbanisme contesté, rendaient inconstructible la zone ND à l'exception, pour le secteur NDd notamment, dans lequel étaient classés les terrains des requérants, de l'extension des habitations existantes, de l'extension mesurée des constructions existantes et des constructions à caractère social ainsi que des équipements sportifs et touristiques ; que, compte tenu de son importance, la réalisation d'un bâtiment de 268 m², distinct du bâtiment existant et destiné à servir de dortoir à 18 pensionnaires, ne saurait être regardé comme une extension mesurée d'une construction existante ; que le bâtiment initial, affecté à un usage d'enseignement, ne saurait davantage être regardé comme un immeuble à usage d'habitation ou comme une construction à caractère social, au sens des dispositions applicables du règlement du plan d'occupation des sols ; que, par suite, le maire de la commune de Noyant-la-Gravoyère, a pu légalement décider que les dispositions applicables à la zone ND faisaient obstacle à la réalisation du projet qui lui était soumis ;

Considérant en deuxième lieu qu'il ne ressort d'aucun élément du dossier que le maire se serait fondé sur des considérations étrangères aux règles d'urbanisme ; que le détournement de pouvoir allégué n'est, par suite, pas établi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B ne sont pas fondés à demander l'annulation du certificat d'urbanisme négatif que le maire de la commune de Noyant-la-Gavoyère leur a délivré le 12 mars 1996, ni des décisions de rejet de leurs demandes en date des 26 mars et 26 juin 1997 et du 15 juillet 1998 en vue d'obtenir la modification du zonage du plan d'occupation des sols ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant que les décisions attaquées du maire de la commune de Noyant-la-Gavoyère n'étant pas entachées d'illégalité, M. et Mme B ne sont pas fondés à soutenir qu'elles constituent une faute de nature à engager la responsabilité de la commune à leur égard ; que leurs conclusions indemnitaires ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement de la somme réclamée par les requérants au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme B le versement de la somme réclamée par la commune de Noyant-la-Gravoyère au titre de ces mêmes dispositions ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 23 avril 2002 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. et Mme B présentée au tribunal administratif de Nantes tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme négatif délivré le 12 mars 1996 et des décisions de rejet de leurs demandes de modification du plan d'occupation des sols.

Article 2 : Les demandes de M. et Mme B présentées au tribunal administratif de Nantes tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme négatif délivré le 12 mars 1996 et des décisions de rejet de leurs demandes de modification du plan d'occupation des sols ainsi qu'à l'indemnisation du préjudice qu'ils en auraient subi sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi de M. et Mme B est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Noyant-la-Gravoyère tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Thierry B, à la commune de Noyant-la-Gravoyère et au ministre d'Etat, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 24 jui. 2009, n° 249681
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Tuot
Rapporteur ?: M. Brice Bohuon
Rapporteur public ?: M. Boucher Julien
Avocat(s) : SCP TIFFREAU ; SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Formation : 10ème sous-section jugeant seule
Date de la décision : 24/07/2009
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 249681
Numéro NOR : CETATEXT000021031748 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2009-07-24;249681 ?
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