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24/07/2009 | FRANCE | N°312215

France | France, Conseil d'État, 5ème et 4ème sous-sections réunies, 24 juillet 2009, 312215


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 janvier et 11 avril 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jacky A, demeurant ... (92500) ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 15 novembre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 10 juillet 2006 du tribunal administratif de Versailles en tant que le tribunal a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions du ministre de l'intérieur retirant des points de

son permis de conduire à la suite des trois infractions relevées le ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 janvier et 11 avril 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jacky A, demeurant ... (92500) ; M. A demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 15 novembre 2007 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 10 juillet 2006 du tribunal administratif de Versailles en tant que le tribunal a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions du ministre de l'intérieur retirant des points de son permis de conduire à la suite des trois infractions relevées le 18 septembre et le 18 novembre 2003 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de la procédure pénale ;

Vu le code de la route ;

Vu l'arrêté du 29 juin 1992 du garde des sceaux, ministre de la justice et du ministre de l'intérieur et de la sécurité publique fixant les supports techniques de la communication par le ministère public au ministère de l'intérieur des informations prévues à l'article L. 30 (4°, 5°, 6° et 7°) du code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Xavier de Lesquen, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de M. A,

- les conclusions de Mme Catherine de Salins, Rapporteur public,

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de M. A ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que cinq infractions au code de la route ont été relevées à l'encontre de M. Jacky A entre le 18 septembre 2002 et le 18 novembre 2003 ; que ce dernier a demandé l'annulation pour excès de pouvoir des décisions de retraits de points consécutives à ces infractions ; que, par un jugement du 10 février 2006, le tribunal administratif de Versailles a annulé les décisions de retrait de points consécutives aux infractions relevées le 18 septembre 2002 et le 17 septembre 2003 ; que, par un appel formé devant la cour administrative d'appel de Versailles, M. A a recherché l'annulation des retraits de points consécutifs aux trois autres infractions en cause, relevées le 18 septembre 2003 et le 18 novembre 2003 ; que, par l'arrêt attaqué du 15 novembre 2007, la cour a rejeté sa requête ;

En ce qui concerne les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 223-1 du code de la route relatives à l'établissement de la réalité de l'infraction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-1 du code de la route : Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. / (...) / La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive ;

Considérant qu'il résulte des articles 529, 529-1, 529-2 et du premier alinéa de l'article 530 du code de procédure pénale que, pour les infractions des quatre premières classes dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat, le contrevenant peut, dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention, soit acquitter une amende forfaitaire et éteindre ainsi l'action publique, soit présenter une requête en exonération ; que s'il s'abstient tant de payer l'amende forfaitaire que de présenter une requête, l'amende forfaitaire est majorée de plein droit et recouvrée au profit du Trésor public en vertu d'un titre rendu exécutoire par le ministère public, lequel est exécuté suivant les règles prévues pour l'exécution des jugements de police ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 530 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : Dans les trente jours de l'envoi de l'avis invitant le contrevenant à payer l'amende forfaitaire majorée, l'intéressé peut former auprès du ministère public une réclamation motivée qui a pour effet d'annuler le titre exécutoire en ce qui concerne l'amende contestée. Cette réclamation reste recevable tant que la peine n'est pas prescrite, s'il ne résulte pas d'un acte d'exécution ou de tout autre moyen de preuve que l'intéressé a eu connaissance de l'amende forfaitaire majorée. S'il s'agit d'une contravention au code de la route, la réclamation n'est toutefois plus recevable à l'issue d'un délai de trois mois lorsque l'avis d'amende forfaitaire majorée est envoyé par lettre recommandée à l'adresse figurant sur le certificat d'immatriculation du véhicule, sauf si le contrevenant justifie qu'il a, avant l'expiration de ce délai, déclaré son changement d'adresse au service d'immatriculation des véhicules ;

Considérant que l'article L. 225-1 du code de la route fixe la liste des informations qui, sous l'autorité et le contrôle du ministre de l'intérieur, sont enregistrées au sein du système national des permis de conduire ; que sont notamment mentionnés au 5° de cet article les procès-verbaux des infractions entraînant retrait de points et ayant donné lieu au paiement d'une amende forfaitaire en vertu de l'article 529 du code de procédure pénale ou à l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée prévu à l'article 529-2 du code de procédure pénale ; qu'en vertu de l'arrêté du 29 juin 1992 fixant les supports techniques de la communication par le ministère public au ministère de l'intérieur des informations prévues à l'article L. 30 (4°, 5°, 6° et 7°) du code de la route, les informations mentionnées au 6° de l'article L. 30, devenu le 5° de l'article L. 225-1 du code de la route sont communiquées par l'officier du ministère public par support ou liaison informatique ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que le mode d'enregistrement et de contrôle des informations relatives aux infractions au code de la route conduit à considérer que la réalité de l'infraction est établie dans les conditions prévues à l'article L. 223-1 du code de la route dès lors qu'est inscrite, dans le système national des permis de conduire, la mention du paiement de l'amende forfaitaire ou de l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, sauf si l'intéressé justifie avoir présenté une requête en exonération dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention ou formé, dans le délai prévu à l'article 530 du code de procédure pénale, une réclamation ayant entraîné l'annulation du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée ;

Considérant que le ministre de l'intérieur a versé au dossier des juges du fond le relevé d'information intégral relatif à la situation de M. A, extrait du système national du permis de conduire ; qu'eu égard aux mentions de ce document et en l'absence de tout élément avancé par l'intéressé de nature à mettre en doute leur exactitude, la cour n'a ni dénaturé les pièces du dossier, ni commis une erreur de droit, ni porté atteinte aux droits de la défense, ni méconnu les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en tenant pour établi que M. A avait acquitté l'amende forfaitaire lors de la constatation de l'infraction commise le 18 septembre 2003 et que des titres exécutoires d'amendes forfaitaires majorées avaient été émis le 10 juin 2004 à la suite des deux infractions commises le 18 novembre 2003 ; qu'elle a pu, sans commettre une erreur de droit de nature à justifier l'annulation de son arrêt, qualifier de décisions pénales la constatation, sur le relevé, du paiement de l'amende forfaitaire et l'émission des titres exécutoires ;

Considérant que c'est par une exacte application des dispositions précitées de l'article L. 223-1 que la cour a jugé que l'émission des titres exécutoires établissait la réalité des infractions commises le 18 novembre 2003, sans rechercher si M. A avait reçu notification des avis d'amende forfaitaire majorée ; que la circonstance alléguée par l'intéressé qu'il n'avait pas eu connaissance de ces amendes pouvait seulement lui permettre, s'il estimait qu'il demeurait recevable à le faire eu égard aux dispositions précitées de l'article 530 du code de procédure pénale, de saisir le ministère public d'une réclamation susceptible d'entraîner l'annulation du titre exécutoire et, par suite, l'obligation pour le ministre de l'intérieur de rapporter la décision de retrait de points ;

En ce qui concerne le moyen tiré des conditions de notification des retraits de points :

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 223-3 du code de la route : Le retrait de points est porté à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand il est effectif ;

Considérant que les conditions de la notification au conducteur des retraits de points de son permis de conduire, prévue par les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 223-3 du code de la route, ne conditionnent pas la régularité de la procédure suivie et partant la légalité de ces retraits ; que cette procédure a pour seul objet de rendre ceux-ci opposables à l'intéressé et de faire courir le délai dont il dispose pour en contester la légalité devant la juridiction administrative ; que, par suite, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la circonstance que l'administration ne soit pas en mesure d'apporter la preuve que la notification des retraits successifs, effectuée par lettre simple, a bien été reçue par son destinataire, ne saurait lui interdire de constater que le permis a perdu sa validité, dès lors que, dans la décision procédant au retrait des derniers points, il récapitule les retraits antérieurs et les rend ainsi opposables au conducteur ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demandé l'annulation de l'arrêt attaqué ; que doivent, par voie de conséquence, être rejetées ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M. A est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Jacky A et à la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.


Synthèse
Formation : 5ème et 4ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 312215
Date de la décision : 24/07/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-04-01-04 POLICE ADMINISTRATIVE. POLICE GÉNÉRALE. CIRCULATION ET STATIONNEMENT. PERMIS DE CONDUIRE. - RETRAIT DE POINTS - PROCÉDURE - INFORMATIONS DUES À L'AUTEUR DE L'INFRACTION - PREUVE DE LA RÉALITÉ DE L'INFRACTION - CARACTÈRE SUFFISANT DES MENTIONS FIGURANT SUR LE RELEVÉ D'INFORMATION INTÉGRAL - EXISTENCE [RJ1].

49-04-01-04 Il résulte de la combinaison des articles L. 223-1 et L. 225-1 du code la route, des articles 529, 529-1, 529-2 et 530 du code de procédure pénale et de l'arrêté du 29 juin 1992 fixant les supports techniques de la communication par le ministère public au ministère de l'intérieur des informations prévues par ces articles que le mode d'enregistrement et de contrôle des informations relatives aux infractions au code de la route conduit à considérer que la réalité de l'infraction est établie dans les conditions prévues à l'article L. 223-1 du code de la route dès lors qu'est inscrite, dans le système national des permis de conduire, la mention du paiement de l'amende forfaitaire ou de l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, sauf si l'intéressé justifie avoir présenté une requête en exonération dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention ou formé, dans le délai prévu à l'article 530 du code de procédure pénale, une réclamation ayant entraîné l'annulation du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée. Ainsi, l'émission d'un titre exécutoire établit la réalité d'une infraction, sans que le juge ne doive rechercher si l'intéressé a reçu notification d'un avis d'amende forfaitaire majorée.


Références :

[RJ1]

Rappr. 31 mars 2008, Croquenois et Vincent, n° 311095, p. 127.


Publications
Proposition de citation : CE, 24 jui. 2009, n° 312215
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vigouroux
Rapporteur ?: M. Xavier de Lesquen
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:312215.20090724
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