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31/07/2009 | FRANCE | N°295866

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 31 juillet 2009, 295866


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 juillet et 21 novembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE NATIONALE DE RADIODIFFUSION ET DE TELEVISION POUR L'OUTRE-MER (RFO), dont le siège est 35-37 rue Danton à Malakoff (92240) ; la SOCIETE NATIONALE DE RADIODIFFUSION ET DE TELEVISION POUR L'OUTRE-MER (RFO) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 26 mai 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 21 octobre 2003 du tribunal

administratif de Papeete rejetant sa demande tendant à la décharg...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 26 juillet et 21 novembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE NATIONALE DE RADIODIFFUSION ET DE TELEVISION POUR L'OUTRE-MER (RFO), dont le siège est 35-37 rue Danton à Malakoff (92240) ; la SOCIETE NATIONALE DE RADIODIFFUSION ET DE TELEVISION POUR L'OUTRE-MER (RFO) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt du 26 mai 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 21 octobre 2003 du tribunal administratif de Papeete rejetant sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des intérêts de retard correspondants auxquels elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 1998 au 31 décembre 1999 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu la loi n° 96-313 du 12 avril 1996 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu le code des impôts de la Polynésie française ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Karin Ciavaldini, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SOCIETE NATIONALE DE RADIODIFFUSION ET TELEVISION POUR L'OUTRE-MER et de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de la Polynésie française,

- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la SOCIETE NATIONALE DE RADIODIFFUSION ET DE TELEVISION POUR L'OUTRE-MER et à la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de la Polynésie française ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 1998 au 31 décembre 1999, la SOCIETE NATIONALE DE RADIODIFFUSION ET DE TELEVISION POUR L'OUTRE-MER (RFO) a été assujettie à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de son établissement situé en Polynésie française, RFO Polynésie, correspondant, d'une part, à la remise en cause de la déductibilité de la taxe ayant grevé les dépenses engagées par cet établissement pour la diffusion de ses programmes et, d'autre part, à la rectification des montants de taxe à reverser au Trésor au titre de l'activité de diffusion de messages publicitaires soumise à la taxe sur la valeur ajoutée ; que les rappels correspondants, d'un montant total de 65 266 618 F CFP, ont été mis en recouvrement le 28 juin 2001 ; que la SOCIETE RFO se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 26 mai 2006 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 21 octobre 2003 du tribunal administratif de Papeete rejetant sa demande en décharge de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 340-1 du code des impôts de la Polynésie française : Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de service effectuées à titre onéreux par un assujetti ; qu'aux termes de l'article 340-4 du même code : Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une activité économique, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur résidence, le lieu de leur siège social, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. / Les activités économiques soumises à la taxe sur la valeur ajoutée se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services (...) ; qu'en vertu de l'article 340-8 du même code, les prestations de services sont imposables en application de ce code lorsque le service est utilisé en Polynésie française ; qu'aux termes de la seconde phrase du premier alinéa de ce même article : Le bénéficiaire de la prestation s'entend du client direct du prestataire, quelle que soit la personne qui, en définitive, pourrait recueillir le bénéfice du service rendu ; qu'aux termes de l'article 343-3 du même code : En ce qui concerne les prestations de services, la taxe sur la valeur ajoutée est exigible lors de l'encaissement des acomptes, du prix ou de la rémunération (...) ; qu'aux termes de l'article 345-7 du même code : Les assujettis qui ne réalisent pas exclusivement des opérations entrant dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ou des opérations ouvrant droit à déduction, sont autorisés à déduire une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé ces biens et services dans les limites ci-après : / - lorsque les biens autres que les immobilisations et services concourent exclusivement à la réalisation d'opérations ouvrant droit à déduction, la taxe qui les a grevés est déductible ; / - lorsque les biens autres que les immobilisations et services concourent exclusivement à la réalisation d'opérations n'ouvrant pas droit à déduction, la taxe qui les a grevés n'est pas déductible ; / - lorsque les biens autres que les immobilisations et services concourent à la réalisation d'opérations dont les unes ouvrent droit à déduction et les autres n'ouvrent pas droit à déduction, et pour les immobilisations, seule une fraction de la taxe qui les a grevés est déductible, selon le prorata prévu aux articles 345-8 et 345-9 ;

Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée relatifs à l'activité de diffusion de programmes radiotélévisés de RFO Polynésie :

Considérant que la diffusion de programmes radiotélévisés réalisée par RFO Polynésie constitue une opération qui, au regard de l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée, doit être examinée en tant que telle, en application de l'article 345-7 précité du code des impôts de la Polynésie française ; que, pour qu'une prestation de service soit regardée comme effectuée à titre onéreux, au sens de l'article 340-1 du même code, il doit exister un lien direct entre le service rendu et la contre-valeur reçue ; que les auditeurs et téléspectateurs de Polynésie française, qui sont les seuls bénéficiaires de la diffusion de programmes radiotélévisés opérée par RFO Polynésie, ne versent aucune rémunération en contrepartie de ce service ; que la circonstance que RFO Polynésie reçoit une subvention de la SOCIETE RFO est sans incidence au regard du critère d'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée rappelé ci-dessus ; qu'il résulte de ce qui précède que la cour n'a commis ni erreur de droit, ni erreur de qualification juridique des faits en jugeant que l'activité de diffusion de programmes radiotélévisés de RFO Polynésie n'était pas assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée et que, par suite, la société n'était pas fondée à contester la remise en cause par l'administration de la déductibilité de la taxe ayant grevé les dépenses engagées pour les besoins de cette activité ;

Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée relatifs à l'activité de diffusion de messages publicitaires de RFO Polynésie :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, pour rectifier les montants de taxe sur la valeur ajoutée à reverser au Trésor au titre de l'activité de diffusion de messages publicitaires de RFO Polynésie, l'administration s'est fondée sur les montants figurant dans la comptabilité de l'établissement polynésien au compte 4457 Taxes sur le chiffre d'affaires collectées par l'entreprise ; que, pour contester cette méthode, la société requérante soutenait devant la cour qu'il y avait lieu de tenir compte du fait qu'une partie de la taxe inscrite au compte 4457 n'était pas exigible au titre des périodes d'imposition en cause dans le litige, en application des dispositions de l'article 343-3 du code des impôts de la Polynésie française, les créances correspondantes n'ayant pas été encaissées, comme en attestaient les écritures passées dans les comptes d'attente 472631, 478210 et 478230 de l'établissement ; que la société soutenait également qu'à supposer que l'inscription des créances sur les clients non encore encaissées dans des comptes d'attente ait constitué une erreur comptable, celle-ci était sans incidence et ne pouvait conduire à écarter l'application des dispositions de l'article 343-3 du code des impôts de la Polynésie française ; qu'en s'abstenant de répondre à cette argumentation de la société, la cour a, compte tenu des écritures qui lui étaient soumises, entaché son arrêt d'une insuffisance de motivation ; que la société requérante est fondée, pour ce motif, à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque, en tant qu'il concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'activité de diffusion de messages publicitaires de RFO Polynésie ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, dans la mesure de l'annulation prononcée ci-dessus, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

Considérant que la société requérante soutient que l'administration ne pouvait estimer que les montants de taxe sur la valeur ajoutée à reverser au Trésor au titre de l'activité de diffusion de messages publicitaires de RFO Polynésie étaient ceux figurant au compte 4457 Taxes sur le chiffre d'affaires collectées par l'entreprise respectivement pour les périodes du 1er janvier au 31 décembre 1998 et du 1er janvier au 31 décembre 1999 ; qu'il lui appartient d'établir qu'elle détenait, ainsi qu'elle le soutient, des créances sur certains clients, pour lesquelles la taxe sur la valeur ajoutée n'était pas exigible, compte tenu des dispositions de l'article 343-3 du code des impôts de la Polynésie française ; qu'il n'est pas contesté qu'au titre des périodes en cause, aucune créance client n'a été constatée au débit d'un compte de classe 41 Clients et comptes rattachés ; que, si la société soutient que les créances sur les clients étaient enregistrées dans la comptabilité de RFO Polynésie dans les comptes d'attente 472631, 478210 et 478230, ni cette argumentation, non assortie d'éléments probants, ni les autres pièces comptables qu'elle produit ne sont de nature à confirmer ses allégations ; qu'en conséquence, c'est à bon droit qu'ont été assignés à la société les rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de son activité de diffusion de messages publicitaires ; qu'elle n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Papeete a rejeté sa demande sur ce point ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie, le versement de la somme demandée par la SOCIETE NATIONALE DE RADIODIFFUSION ET DE TELEVISION POUR L'OUTRE-MER (RFO) devant le Conseil d'Etat et la cour administrative d'appel de Paris au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SOCIETE NATIONALE DE RADIODIFFUSION ET DE TELEVISION POUR L'OUTRE-MER (RFO) le versement à la Polynésie française de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 26 mai 2006 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé en tant qu'il a statué sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels la SOCIETE NATIONALE DE RADIODIFFUSION ET DE TELEVISION POUR L'OUTRE-MER (RFO) a été assujettie au titre de l'activité de diffusion de messages publicitaires de RFO Polynésie.

Article 2 : La requête de la SOCIETE NATIONALE DE RADIODIFFUSION ET DE TELEVISION POUR L'OUTRE-MER (RFO) présentée devant la cour administrative d'appel de Paris est rejetée, en tant qu'elle portait sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mentionnés à l'article 1er.

Article 3 : Les conclusions présentées par la SOCIETE NATIONALE DE RADIODIFFUSION ET DE TELEVISION POUR L'OUTRE-MER (RFO) devant le Conseil d'Etat et la cour administrative d'appel de Paris au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et le surplus des conclusions de son pourvoi, sont rejetés.

Article 4 : La SOCIETE NATIONALE DE RADIODIFFUSION ET DE TELEVISION POUR L'OUTRE-MER (RFO) versera à la Polynésie française la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE NATIONALE DE RADIODIFFUSION ET TELEVISION POUR L'OUTRE-MER, au Président de la Polynésie française et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 295866
Date de la décision : 31/07/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 31 jui. 2009, n° 295866
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Martin
Rapporteur ?: Mme Karin Ciavaldini
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER ; SCP DE CHAISEMARTIN, COURJON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:295866.20090731
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