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11/08/2009 | FRANCE | N°325791

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 11 août 2009, 325791


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 et 20 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSISTANCE PUBLIQUE DES HOPITAUX DE PARIS, dont le siège est 3 avenue Victoria à Paris (75004), représentée par son président en exercice ; l'ASSISTANCE PUBLIQUE DES HOPITAUX DE PARIS (AP-HP) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 16 février 2009 par laquelle le juge des référés de la cour administrative d'appel de Paris a, à la demande de la société Laboratoires Alcon, annulé l'ordonnance du juge

des référés du tribunal administratif de Paris du 21 octobre 2008 rejetan...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 et 20 mars 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSISTANCE PUBLIQUE DES HOPITAUX DE PARIS, dont le siège est 3 avenue Victoria à Paris (75004), représentée par son président en exercice ; l'ASSISTANCE PUBLIQUE DES HOPITAUX DE PARIS (AP-HP) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 16 février 2009 par laquelle le juge des référés de la cour administrative d'appel de Paris a, à la demande de la société Laboratoires Alcon, annulé l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Paris du 21 octobre 2008 rejetant la demande de la société laboratoires Alcon tendant au versement à titre de provision d'une somme de 108 425,16 euros, ainsi que des intérêts de droit à compter du 19 mars 2007, correspondant au montant du marché conclu le 22 mai 2002 relatif à la fourniture et la livraison d'instrumentation à usage unique destinée aux services d'ophtalmologie de l'ensemble des établissements de l'ASSISTANCE PUBLIQUE DES HOPITAUX DE PARIS, et l'a condamnée à verser à ladite société une provision de 72 300 euros assortie des intérêts légaux échus à compter du 19 mars 2007 ;

2°) réglant l'affaire au titre de la procédure de référé engagée, de rejeter la demande de la société Laboratoires Alcon ;

3°) de mettre à la charge de la société Laboratoires Alcon la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Agnès Fontana, chargée des fonctions de Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de l'ASSISTANCE PUBLIQUE DES HOPITAUX DE PARIS et de la SCP Roger, Sevaux, avocat de la société Alcon France,

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de l'ASSISTANCE PUBLIQUE DES HOPITAUX DE PARIS et de la SCP Roger, Sevaux, avocat de la société Alcon France ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier soumis au juge des référés de la cour administrative d'appel de Bordeaux, statuant sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, que l'ASSISTANCE PUBLIQUE DES HOPITAUX DE PARIS (AP-HP) a conclu avec la société Alcon France le 16 juillet 2002 un marché fractionné à bons de commande, comprenant un montant minimum et un montant maximum pour trois ans afin de commander des fournitures et des livraisons d'instrumentation à usage unique, consommables pour phakoémulsificateurs, pour appareils de vitrectomie et pour lasers, destinés aux services d'ophtalmologie de l'ensemble des établissements de l'AP-HP ; que l'AP-HP a commandé en urgence à la même société des fournitures supplémentaires fournies sur bons de commande en dépassement du montant maximum contractuel ; qu'ayant accepté sans réserve cet ordre, la société Alcon France a adressé à l'AP-HP, au cours de l'année 2005, plusieurs factures d'un montant total de 108 425,16 euros TTC ; que par lettre du 19 mars 2007, la société Alcon France a demandé le paiement de cette somme ; que, l'AP-HP a proposé le 7 juin 2007 à la société un projet de protocole transactionnel pour le règlement de la somme de 97 582,64 euros TTC à titre d'indemnité forfaitaire et définitive en règlement des sommes restant dues; qu'ayant refusé de signer ce protocole en raison de la réfaction de 10% à laquelle il procédait, la société Alcon France a demandé le 20 mai 2008 au juge des référés du tribunal administratif de Paris le versement de la somme de 108 425,16 euros TTC majorée des intérêts de droit dus à compter du 19 mars 2007 ; que par ordonnance du 21 octobre 2008 le juge des référés désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la société Alcon France au motif que la créance dont elle se prévaut n'est pas non sérieusement contestable ; que, par ordonnance du 16 février 2009, la cour administrative d'appel de Paris a annulé l'ordonnance susvisée et condamné l'AP-HP à verser une provision de 72 300 euros TTC assortie des intérêts légaux échus à compter du 19 mars 2007 ; que l'AP-HP se pourvoit en cassation contre cette ordonnance ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. " ;

Considérant que, pour demander le rejet de la demande de provision introduite par la société Alcon France, l'AP-HP soutenait notamment qu'elle était irrecevable pour ne pas avoir été précédée de la procédure de réclamation prévue à l'article 34.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de fournitures courantes et de services (CCAG-FCS) tels que le marché en cause ; que la cour n'a pas répondu à ce moyen, qui n'était pas inopérant ; que, par suite, son ordonnance doit être annulée ;

Considérant qu'il y a lieu de régler l'affaire au titre de la procédure de référé provision engagée par la société Alcon France ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 742-2 du code de justice administrative, applicable en matière de référé en vertu de l'article R. 522-11 du même code : " Les ordonnances mentionnent le nom des parties, l'analyse des conclusions ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elles font application (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, si une ordonnance de référé doit en principe, outre le nom des parties et les dispositions législatives et réglementaires dont elle fait application, porter mention de l'ensemble des mémoires produits avant la clôture de l'instruction, l'omission du visa d'un tel mémoire n'est pas, par elle-même, de nature à l'entacher d'irrégularité lorsque celui-ci ne comporte pas d'éléments nouveaux ;

Considérant, en second lieu, que l'article R. 742-2 du code de justice administrative précité n'a pas pour effet d'imposer au juge des référés d'analyser, dans sa décision, les moyens développés par les parties à l'appui de leurs conclusions auxquels le juge devra toutefois répondre, en tant que de besoin, au titre de la motivation de son ordonnance ; que, par suite, la société Alcon France ne peut utilement soutenir que l'ordonnance attaquée, en ce qu'elle ne comporterait pas l'analyse des moyens soulevés devant le juge des référés du tribunal administratif de Paris, méconnaîtrait les exigences de l'article R. 742-2 du code de justice administrative ;

Sur la demande de provision :

Considérant qu'aux termes de l'article 34.1 du CCAG-FCS applicable au marché en cause : " Tout différend entre le titulaire et la personne responsable du marché doit faire l'objet de la part du titulaire d'un mémoire de réclamation qui doit être communiqué à la personne responsable du marché dans le délai de trente jours compté à partir du jour où le différend est apparu. " ; que les stipulations précitées prévoient la mise en oeuvre d'une procédure de recours préalable avant la saisine du juge administratif ; que l'existence même de ce recours prévu au contrat ne permet pas à l'une des parties de saisir directement le juge administratif, y compris le juge statuant en référé ;

Considérant que la proposition de l'AP-HP, par courrier du 7 juin 2007, d'un projet de protocole transactionnel proposant à l'entreprise le règlement de la somme de 97 582,64 euros TTC à titre d'indemnité forfaitaire et définitive en règlement des sommes restant dues a fait naître entre les parties un différend au sens de l'article 34.1 du cahier des clauses administratives générales applicables au marché ; que la société Alcon France a refusé cette proposition par courrier du 4 décembre 2007, lequel doit être regardé comme le mémoire en réclamation prévu à l'article précité ; qu'elle était dès lors recevable à saisir le juge administratif ;

Considérant toutefois que les stipulations précitées prévoient que la saisine de la personne responsable du marché doit intervenir dans un délai de trente jours compté à partir du jour où le différend est apparu ; qu'il est constant que la société Alcon France n'a présenté son mémoire en réclamation que postérieurement audit délai ; que dès lors, l'obligation dont elle se prévaut ne présente pas le caractère d'une obligation non sérieusement contestable au sens de l'article R. 541-1 du code de justice administrative ; que, par suite, la société Alcon n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire application desdites dispositions et de mettre à la charge de la société Alcon France le paiement de la somme de 5 000 euros au titre des frais exposés par l'AP-HP et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés de la cour administrative d'appel de Paris du 16 février 2009 est annulée.

Article 2 : La demande de la société Alcon France devant le juge des référés de la cour administrative d'appel de Paris est rejetée.

Article 3 : La société Alcon France versera à l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'ASSISTANCE PUBLIQUE DES HOPITAUX DE PARIS et à la société Alcon France.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 325791
Date de la décision : 11/08/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 11 aoû. 2009, n° 325791
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vigouroux
Rapporteur ?: Mme Agnès Fontana
Rapporteur public ?: M. Dacosta Bertrand
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET ; SCP ROGER, SEVAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2009:325791.20090811
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